Entre les 29 novembre 2019 et 2 avril 2021 @BenjaminForant et @Schoepfer68, accompagnés ponctuellement par d’autres membres de la rédaction, ont dressé le portrait de certains des acteurs méconnus ou sous-estimés de la NBA. Au total, ce sont 63 articles qui vous ont été proposés : un par année, entre les saisons 1950 – 1951 et 2009 – 2010, avec quelques bonus par-ci, par-là.
Pour cette saison 2, Le Magnéto change de format. Si l’idée est toujours de narrer la carrière des joueurs dont on parle finalement trop peu, il ne s’agira plus de traverser de part en part la si vaste histoire de la Grande Ligue. Désormais, chaque portrait sera l’occasion de braquer les projecteurs sur une franchise en particulier, avec l’ambition d’évoquer l’ensemble des équipes ayant un jour évolué en NBA, mais également en ABA.
Replongez avec nous dans ce grand voyage que constitue Le Magnéto. Notre 85ème épisode nous emmène à San Francisco, ville dans laquelle un grand attaquant a évolué pendant plus d’une décennie, à mi chemin entre les années 1980 et 1990 : Chris Mullin.
Il était une fois dans l’Ouest
Philadelphie, 1946
Ce n’est pas sous le soleil clément de la Baie de San Francisco que notre histoire commence ; c’est bien loin de là, en plein cœur de la froide Pennsylvanie. En 1946, quelques mois après la fin de la guerre, la National Basketball Association est créée (sous le nom de BAA à l’époque, mais passons ces détails qui ne feraient que nous ralentir dans notre histoire).
Si la Grande Ligue est loin de ressembler à celle que l’on connaît aujourd’hui, avec ses trente franchises et ses joueurs venus des quatre coins de la planète, elle accueille dès ses débuts certaines franchises historiques : les Knicks de New York, les Celtics de Boston, ou encore les Lakers… de Minneapolis. Parmi ces équipes présentes dès le premier jour, nous retrouvons les Warriors… de Philadelphia. En effet, si ces derniers vont rapidement déménager en Californie, les “Guerriers” ont débuté leur vie d’équipe dans l’Est du pays. Et plutôt bonne manière, c’est un euphémisme de le dire.
Derrière un franchise player nommé Joe Fulks, qui tourne à plus de 23 points par match lors de cette première année d’existence de la NBA, les Warriors décrochent le premier titre de l’histoire en expédiant les Chicago Stags en finales (4-1).
Une saison, un titre. Un ratio que l’on peut qualifier de correct pour les Warriors de Philadelphie, qui seront, jusqu’à la fin des temps, la première équipe championne. Les saisons suivantes mêleront des “presque succès” et des échecs. Autour de Paul Arizin et Neil Johnston, les Guerriers jouent de nouveau les finales NBA en 1948, participent à des demi-finales de conférence (entre 1949 et 1952), avant un passage à vide jusqu’à 1955. Puis, en 1955-1956, deuxième titre pour les Philadelphia Warriors, avec un Arizin phénoménal.
Autour des deux franchise players cités ci-dessus, et de joueurs de complément comme Tom Gola, Joe Graboski et Jack George, la ville de l’amour fraternel ne fera qu’une bouchée des Fort Wayne Pistons de Larry Foust en finales.
À l’aube des années 1960, deux révolutions arrivent en quelques années au sein de la franchise. La première est draftée en 1959, et s’appelle Wilt Chamberlain. 37 points de moyenne accompagnés de 27 rebonds par match (!) lors de sa saison rookie (des standards qui ne bougeront que très peu lors des années suivantes)… On peut dire que les codes sont statistiquement bouleversés, sans que cela ne permette à l’équipe de décrocher un troisième titre suprême.
L’autre révolution n’est pas liée au terrain. En 1962, un certain Franklin Mieuli achète la majeure partie de la franchise. Originaire de la baie de San Francisco, il décide de relocaliser sa nouvelle équipe dans sa Californie natale. Fini le froid de Pennsylvanie, bienvenue dans la Bay Area.
C’est donc pour l’exercice 1962-63 que les Warriors prennent le nom de “San Francisco Warriors” pour la première fois. Wilt Chamberlain y joue encore trois saisons, et deux d’entre elles se finiront avec un bilan négatif. Il y a malgré tout une vraie réussite : l’exercice 1963-64, qui s’est conclu sur une défaite en finales face aux ennemis jurés du pivot, les Celtics de Boston.
En 1965 donc, après une saison avec seulement 17 victoires, une nouvelle page de la franchise est tournée. Au revoir Wilt Chamberlain, qui est envoyé aux Sixers de Philadelphia (quelle ironie). Il est remplacé par un duo composé de Nate Thurmond (drafté en 1964) et Rick Barry (drafté en 1966).
Le choix s’avèrera payant, car l’équipe va enchaîner les bons résultats entre la fin de la décennie (finales NBA perdues en 1967, finales de conférence l’année suivante) et le début des seventies (finales de conférence en 1973). La consécration arrive en 1975, lorsque Rick Barry, au top de sa forme, fait un magnifique run de playoffs qui permet aux Golden State Warriors (l’équipe est passée de San Francisco à Golden State en 1972) de décrocher leur troisième titre, le dernier avant l’arrivée d’un certain Stephen…
S’en est suivi une décennie de disette, entre fin de l’ère Barry, les deux saisons de Bernard King, ou encore passage de Purvis Short. C’est la draft 1985 qui va tout bouleverser, pour relancer l’intérêt des fans pour l’équipe de la Baie.
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Pendant ce temps, à New York
Le 30 juillet 1963, le petit Christopher Paul Mullin est né à New York City, plus précisément à Brooklyn. Pur produit de Big Apple, celui qu’on appelait Chris écume les parquets et bitumes de la ville à longueur de journée, à la recherche de nouveaux défis basketballistiques. De son plus jeune âge à la fin de sa scolarité, New York restera son terrain de jeu que ce soit via la Catholic Xaverian High School de Brooklyn pour la fin de son adolescence, ou l’établissement de Saint John’s dans le Queen’s pour la faculté, entre 1981 et 1985.
Pour Mullin, le basket est toute sa vie. Quand il commence à enchaîner les belles performances à l’Université, qui n’est pas l’un des fleurons de NCAA, les questions se posent donc. Qui est cet ailier blanc, qui déchaine la foudre dans cette petit fac de New York et qui est d’une efficacité redoutable ?
Les scouts du pays mettent rapidement un visage sur les performances, et l’ailier commence à être listé parmi les tops prospects de sa génération. Cette reconnaissance lui a permis, au milieu de son cursus universitaire, de faire partie de la Team USA qui participe aux Jeux Olympiques de 1984 de Los Angeles. Si cette Olympiade a une saveur particulière (boycott des pays du bloc soviétique), les Américains décrochent plutôt facilement l’or, permettant à Chris Mullin et à ses amis (Alvin Robertson, Patrick Ewing ou encore Michael Jordan) de ramener leur premier vrai titre en carrière à la maison.
Pour sa dernière année à l’Université, en 1984-85, Chris Mullin frappe encore plus fort que les saisons précédentes, alors même qu’il a déjà été élu MVP de sa conférence à plus de 55% au shoot. S’il ne tourne qu’à 19,8 points de moyenne à 52% au tir (23 points à 57% l’année précédente, à titre d’exemple), il est le leader, aux côtés de Mark Jackson, d’une équipe de Saint John’s qu’il mènera au final four NCAA pour la deuxième fois de l’histoire, sous les ordres de Lou Carnesecca, légende parmi les légendes des coachs NCAA, décédé il y a quelques jours. La faculté n’y est d’ailleurs plus retournée depuis. Par la même occasion, Mullin remporte le trophée Wooden du meilleur joueur universitaire. Il se trouve donc au palmarès aux côtés de Zion Williamson, Jalen Brunson, Anthony Davis, Kevin Durant, Tim Duncan ou Michael Jordan.
Il aura donc fait un cursus complet de quatre ans à l’Université, et il restera comme l’une des icônes de Saint John.
A 22 ans, il fait donc le grand saut et rejoint la Grande Ligue, du côté de Golden State.
Coup de foudre à Golden State
Ivresse et Hennessy
La draft 1985 est excellente. Elle est pourtant peu citée parmi les meilleures de l’histoire, alors qu’elle mérite le coup d’œil. Arvydas Sabonis, Michael Adams, Xavier McDaniel, Detlef Schrempf ou Charles Oakley entourent les Hall of Famers que sont Patrick Ewing choisi avec le premier choix, Karl Malone (13e choix), Joe Dumars (18e choix) et Chris Mullin.
Ce dernier, qui vient, comme nous l’avons précisé plus tôt, de passer l’entièreté de sa vie à New York, se retrouve drafté en #7 par les Warriors de Golden State, à l’autre bout du pays. Un élément qui aura son importance pour plus tard.
A cette époque, la glorieuse franchise d’antan connaît un véritable creux : seulement 22 victoires en 1984-85, 37 la saison précédente. L’arrivée de Mullin est un vrai vent de fraîcheur pour les Californiens.
Si la première saison est sympathique pour le rookie, avec 14 points de moyenne à 47% au tir, et seulement 30 victoires, Chris Mullin change tout pour les fans des Warriors. Il est smooth, plaisant à voir jouer, jeune, et donne de l’ambition aux supporters.
Malheureusement, la seconde année est dans le même acabit individuellement. Une quinzaine de points à 52% au tir. C’est un peu mieux mais pas autant qu’espéré. Pourtant, ça tourne bien collectivement. Les Warriors atteignent les demi-finales de conférences, Sleepy Floyd et Joe Barry Carroll sont All-star. De quoi bien préparer l’avenir.
Mais quelque chose ne tourne pas rond chez ces Warriors, et plus particulièrement chez Chris Mullin. L’ambiance n’est pas au beau fixe, les coéquipiers ne sont pas des exemples à suivre, et le jeune joueur est isolé. Il est loin de sa famille, de ses proches, dans un Etat qu’il ne connaît pas, et il ne s’y plait pas.
Chris Mullin trouve alors du réconfort dans la boisson et plus particulièrement la bière. Et cette dernière est devenue de plus en plus envahissante dans sa vie de basketteur. “Je voulais devenir un grand joueur, et la bière m’empêchait d’en devenir un”, a-t-il notamment exprimé plusieurs décennies après les faits.
Nous sommes en 1987-88, et Mullin est au plus bas, comme sa franchise. Ce qui est intéressant, c’est que la structure et le joueur vont réussir à faire un reset à un an d’intervalle.
De son côté, Chris Mullin, sous l’impulsion de son GM (puis coach), Don Nelson, qui l’a beaucoup aidé à traverser cette crise, part en centre de désintoxication plusieurs semaines à l’intersaison 1987 (entre 31 et 48 jours selon les sources).
« Don Nelson m’a peut-être sauvé la vie. Sans lui, je n’aurais jamais franchi le pas et tout ce qui a suivi ne serait jamais arrivé. Sans m’en rendre compte, j’étais en train de me suicider lentement. Là, j’ai repris le contrôle de ma vie. J’y ai remis de l’ordre. Je me sens beaucoup mieux”, racontera-t-il plus tard, propos repris par Basket USA.
Du côté des Warriors, un vrai remaniement d’effectif va avoir lieu un an plus tard. Mais nous y reviendrons.
La saison 1987-88 est celle de l’explosion pour le natif de New York. Bien mieux dans ses baskets, en forme physiquement, sevré de cette boisson du diable, Chris Mullin produit sa meilleure saison de son début de carrière. Plus de 20 points de moyenne, trois surchauffes à plus de 30 points dont un très beau match à 4/5 à trois-points face au Jazz en mars 1988. Cette saison ne sera malheureusement pas une réussite d’un point de vue collectif (20 victoires, 62 défaites), et comme nous l’avons précisé quelques lignes plus haut, c’est au tour de la franchise de faire un grand remaniement.
Première étape du GM Don Nelson : licencier George Karl et se placer lui-même en tant que coach. Deuxième étape, faire le ménage dans l’effectif : plus de Sleepy Floyd et Joe Barry Carroll (All-star la saison précédente tout de même), haut choix de draft bien utilisé avec la sélection de Mitch Richmond. Tout est en route pour une nouvelle ère.
Et cette stratégie porte immédiatement ses fruits. En 1988-89, les Warriors sont de retour dans le positif (43-39), Chris Mullin tourne à plus de 26 points de moyenne à 50% au tir et est sélectionné au All-star game pour la première fois de sa carrière ainsi qu’une All NBA Second Team. De son côté, Mitch Richmond s’adapte plutôt bien à la vie en NBA en inscrivant plus de 22 points par match. Un vrai one-two-punch est né.
C’est lors de cet exercice que les qualités au scoring de Mullin se révèlent au grand jour : 3 matchs au dessus des 40 points, 10 au dessus des 35, dont un pic à 47 points (à 16/25 au shoot, 15/15 aux lancers), accompagnés de 7 rebonds et 4 passes et 4 interceptions dans une défaite face aux Clippers.
Cette saison, qui était déjà une réussite avec la 7e place décrochée, devient encore plus épique lorsque les playoffs sont arrivés. Opposés au Jazz d’un certain duo Stockton-Malone, les guerriers de la Baie dépassent les attentes.
Autour d’un duo Mullin-Richmond tonitruant (71 points à deux dans le game 1, 43 dans le game 2 et 61 dans le game 3), les Californiens sweepent les 2e de l’Ouest.
Si les espoirs de titre s’arrêtent en demi-finales de conférence, avec un 4-1 encaissé par les Suns de Kevin Johnson, Mullin et consorts auront de nouveau montré que le futur était pour eux.
Le duo arrière-ailier étant âgé de 22 et 25 ans, l’avenir se montrait radieux. Pour devenir l’une des darlings de la Ligue, il ne manquait plus qu’un joueur, un meneur qui serait un bon complément au duo Richmond-Mullin. Et la franchise allait vite le trouver.
Run Chris, run !
Lors de la draft 1989, les Warriors ont le 14e choix. Ils choisissent un certain Tim Hardaway, meneur d’1m83, explosif, vif et déroutant. Tout ce que recherchait Don Nelson. Il a enfin la touche finale de son projet offensif.
Il leur faudra une saison de mise en route. Si Mullin est toujours aussi fort (plus de 25 points à 53% au tir dont 37% à trois-points pour 3 tentatives par match, accompagné de 6 rebonds et 4 passes, les résultats ne suivent pas tellement. Avec un bilan de 37-45, ils terminent à la 10e place de la conférence Ouest.
Mais le Run TMC est né. Inspiré du groupe Run DMC, une seule lettre est changée pour rendre hommage à Tim-Mitch et Chris. Et dès l’année 1990-91, les choses sérieuses commencent.
Les Warriors vont tout miser sur l’attaque et le jeu de leurs joueurs extérieurs dans une époque où le basket intérieur et la défense sont plébiscités. Pour situer, Charles Barkley sera MVP de la saison. David Robinson, Olajuwon, Malone, Ewing et consorts dominent la Ligue.
Et pourtant, Don Nelson et le Run TMC ira à contre-courant. 2e équipe en points par match, 6e offensive rating, les 3 joueurs tourneront au minimum à 22,9 points par soir. Deux d’entre eux seront All-star (Mullin et Hardaway, qui ajouteront près de 10 passes par match à ses 23 points). Une bien belle équipe, révolutionnaire pour l’époque.
Pour parfaitement représenter ce qu’était le trio, ils inscriront 104 points à trois un soir de janvier à Philadelphie. Dans une NBA où les 100 points n’étaient pas une chose acquise, cette performance montre l’efficacité offensive du trio.
Mullin continuera sur sa lancée. 25 points, 4 passes et 5,5 rebonds, une sélection en All NBA Second Team, et les plus beaux moments de sa vie. “C’était le basket le plus fun auquel j’ai joué dans ma carrière”, expliquera-t-il. “Ce que Tim avait, je ne l’avais pas. Ce que Mitch savait faire, je ne savais pas le faire. Ensemble, on a trouvé comment coordonner ce que l’on savait faire. J’adore ce style de jeu.”
Comme deux ans auparavant, les Warriors arrivent en playoffs 1991 avec le 7e seed, un rôle d’outsider et de poil à gratter. Et cette fois-ci, ce sont les Spurs de Robinson qui en feront les frais. Après avoir perdu le game 1, Golden State réagit en remportant les trois rencontres suivantes. Tout en contrôle, Mullin inscrira 29, 27, 22 et 23 points, bien accompagné de ses deux collègues.
Le tour suivant, ce sont les Lakers d’un certain Magic Johnson en folie qui se présentent. Dès le premier match, un duel des titans oppose le meneur Angeleno (44 points, 12 rebonds, 9 passes) à l’ailier de la baie (41 points à 71% au tir dont 4/4 à 3 points). Ce premier match verra les Warriors l’emporter.
Cependant, ce sera la seule victoire des guerriers de la série. Mullin passe à côté des matchs 2 et 3, en inscrivant seulement 13 et 9 points. Comme deux ans plus tôt, la marche était trop haute pour aller en finale de conférence.
Après une saison d’acclimatation et une seconde de mise en route, la troisième doit être celle de la confirmation. Sauf que les Warriors ne le voient pas du même œil. Fini le Run TMC, retour aux intérieurs qui défendent et jouent un rôle important offensivement : Mitch Richmond est tradé contre Billy Owens et cet échange signe la fin du trio.
En tout cas, pour Mullin, cette saison 1991-92 ce sera celle de la consécration. Une troisième place de la conférence Ouest, toujours une moyenne qui flirte avec les 25 points à plus de 50% au tir, et toujours Tim Hardaway qui rend fou les défenses adverses.
Les deux extérieurs sont invités au All-star game, et les deux sont nommés dans les All NBA Team : la première pour Mullin, la seconde pour Hardaway. Malheureusement, malgré le fait d’arriver dans le costume de favoris en playoffs pour la première fois de sa carrière, Mullin et consorts passent à côté de leur série. Face à Gary Payton et Shawn Kemp, les Warriors se cassent les dents. Mullin passe à côté des quatre matchs de playoffs qu’il dispute en 1992, et Golden State sort au premier tour.
Cependant, cette déception sera vite compensée. Car pendant l’été 1992, Chris Mullin va vivre le mois le plus fou de toute sa carrière.
Hola Barcelona, somos la Dream Team !
Nous vous avons parlé il y a quelques paragraphes de la première Olympiade de Chris Mullin. À l’été 1992, le multiple All-star est de retour sous le maillot américain, mais cette fois-ci au sein d’une équipe qui marquera bien plus les esprits : la Dream Team.
Comme vous le savez tous, pour la première fois, les joueurs qui portent le maillot de Team USA ne sont pas des universitaires, mais bien les stars de NBA. Aux côtés de Michael Jordan, Magic Johnson, Larry Bird, Charles Barkley ou Karl Malone, on retrouve donc Chris Mullin. Et sans surprise, cette campagne sera une véritable boucherie à l’américaine : 6 matchs, 6 victoires, Mullin à 50% à trois-points sur 30 tentatives et 3e meilleur scoreur de l’équipe américaine derrière Barkley et Malone avec 14 points de moyenne.
Surtout, au-delà du sportif, Chris Mullin s’inscrit comme l’un des membres phares de l’une des équipes les plus influentes, importantes et connues de tous les temps. Le jeune alcoolique originaire de New York entre à pieds joints dans la légende.
De retour dans la baie, auréolé d’une médaille d’or, le franchise player des Warriors est de retour aux affaires pour la saison 1992-93. Un jeune joueur rejoint l’armada de Golden State, toujours composée de Mullin, Hardaway ou Owens : Latrell Sprewell, drafté en 24ème position, qui s’impose immédiatement comme un élément essentiel de l’équipe.
Mais l’explosion du rookie est corrélée à un élément moins joyeux : Chris Mullin se blesse. Il ne joue qu’une quarantaine de matchs à très haut niveau (25,5 points de moyenne, 5 rebonds, 3,5 passes à 45% à trois-points) avant de se blesser au genou. Saison terminée en février, pas de playoffs pour les Warriors qui finissent à la 10e place à l’Ouest pour cette saison 1992-93.
L’année suivante est celle d’une véritable transition ; Chris Mullin dépasse la trentaine et l’âge commence à se faire ressentir. Il ne tourne “qu’à” 16 points, 5,5 rebonds et 5 passes, plus haut total en carrière. Il débute une partie des matchs sur le banc. Tim Hardaway, quant à lui, fait une saison blanche, en raison d’une blessure. Le scoring est donc assuré par une doublette de jeunes affamés : Sprewell, évoqué précédemment, et Chris Webber.
Le rookie et le sophomore portent les Warriors jusqu’en playoffs. Malheureusement, la jeunesse ne paiera pas pendant ces joutes de postseason où l’expérience domine. Golden State se fait sèchement sortir au premier tour face aux Suns de Barkley, sans remporter le moindre match. Mullin retrouve ses couleurs lors des deux derniers matchs (32 et 30 points, à des % plus qu’honnêtes), sans que cela ne suffise.
Ces deux rencontres face aux Suns étaient les dernières de l’ère Mullin aux Warriors. A partir de là, c’est une chute lente vers la retraite pour notre double médaillé olympique.
L’espoir du titre
Après une saison plus qu’enthousiasmante, avec un alliage entre jeunesse et expérience qui promettait pour les exercices à venir, les choses ne tournent pas comme prévu à Golden State en 1994-95. Après de gros désaccords avec Don Nelson, Chris Webber est échangé, après une seule saison sous le maillot des Warriors.
Si Tim Hardaway est bien revenu de sa blessure et propose un duo intéressant avec Sprewell, Chris Mullin se blesse de nouveau et ne dispute que 25 matchs. Bilan final : 26 victoires, 56 défaites.
Le constat est le même la saison suivante. Mullin a 32 ans et joue 55 matchs, dont 19 en tant que titulaire. Alors qu’il ne tourne plus qu’à 13 points de moyenne, la franchise californienne passe à côté de sa saison en ne remportant que 30 rencontres. Sprewell fait ce qu’il peut, mais les deux stars d’antan n’ont plus le même impact. Bilan : 36 victoires et une 9e place frustrante.
L’exercice 1996-97 est celui de trop. Si les blessures semblent avoir laissé Mullin de côté, le front office semble avoir décidé de faire le ménage. Ils échangent Hardaway en 1996 et après une nouvelle saison avec seulement 30 victoires, ils font de même avec Chris Mullin. Après 11 saisons au sein de la franchise de la baie, il est envoyé dans l’Indiana, contre Erik Dampier notamment.
Après ce transfert, qui laissait penser qu’il était plus proche de la fin que du début, Chris Mullin réussit une belle saison de rédemption chez les Pacers. Titulaire 82 fois, il se révèle être un joueur de complément utile, intelligent et complémentaire du duo Reggie Miller – Rik Smits.
Deuxième de l’Est à la fin de la régulière, Mullin réalise quelques performances intéressantes en playoffs. Il joue toujours sa vingtaine de minutes, montant à plus de 30 lors de certaines rencontres. Après un premier tour où les Cavaliers n’ont pas su résister (3-1), les Pacers affrontent leurs ennemis jurés de New-York en demi-finales de conférence. En cinq rencontres, la série est pliée. Lors du game 4, alors qu’Indiana mène 2-1, le new-yorkais de naissance plante un couteau dans le cœur de sa ville natale en inscrivant 18 points à 7/12 au tir.
Malheureusement, les Pacers ne feront pas le poids face à l’armada des Bulls en finales de conférence, malgré une série qui se jouera au meilleur du 7ème et dernier match. Chicago va ensuite remporter son troisième titre consécutif.
En 1998-99, Mullin a 35 ans. L’équipe tourne toujours aussi bien et est l’une des places fortes de l’est et l’ailier conserve son rôle dans la rotation. Les Pacers rêvent de titre. En effet, Michael Jordan vient de prendre sa seconde retraite et la conférence semble plus ouverte que jamais.
La saison régulière se passe sans encombre. En playoffs, le premier tour est facilement remporté face à Milwaukee. Mullin score même 15 et 13 points lors des matchs 1 et 3. Le tarif est similaire face à Philadelphia en demi-finale : 4 – 0. L’ancien de Golden State score notamment 15 et 16 points lors des deux dernières rencontres. En finale de conférence, arrive le duel tant attendu : la revanche face aux Knicks. Cette fois-ci, après une série rugueuse, disputée, marquée par l’action à quatre points de Larry Johnson, les Pacers échouent de nouveau en finale de conférence. Si Mullin fait sa série, il commence cependant à voir un jeune joueur lui prendre des minutes : Jalen Rose.
Cette saison était la dernière où Chris a vraiment joué. Il restera une saison de plus à Indiana et atteindra les Finales NBA, mais il n’est plus qu’un joueur de fond de banc.
Comme un symbole, l’ailier signe à l’été 2000 aux Warriors, pour y jouer 20 derniers matchs. Il prend sa retraite, à 37 ans, à l’endroit où tout a commencé.
La place au box-office des Warriors
Arrivé à Golden State alors que la franchise était dans le dur, Chris Mullin reste l’un des visages les plus importants de l’Histoire des Warriors. Sur le terrain, il a révolutionné le jeu de l’époque, en étant l’un des tous premiers artilleurs à trois-points, mais aussi en proposant avec le Run TMC un jeu anachronique. En dehors, il a su trouver sa place dans le cœur des fans, en faisant montre de résilience, de courage et de motivation pour sortir de sa dépendance.
Un quart de siècle après sa retraite, et malgré l’émergence dans la baie de certains joueurs légendaires – Stephen Curry, Klay Thompson, Draymond Green, par exemple – il demeure bien classé dans de nombreuses statistiques :
Intronisé à deux reprises au hall-of-fame – en tant que joueur et en tant que membre de la Dream team – Mullin a également figuré dans le front-office de sa franchise de toujours au courant des années 2000. Il figure très probablement dans le top 5 des joueurs les plus marquants de l’une des franchises les plus emblématiques de tous les temps.
Il quitte les bureaux californiens pour retrouver les bancs de Saint John’s. De New York à San Francisco, d’est ou ouest, Chris Mullin a désormais deux maisons.