A l’issue des 2 premiers matchs de ces Playoffs, les critiques pleuvent sur les Phoenix Suns et leur difficulté à attaquer au niveau attendu.
L’angle me semble mauvais. La vraie histoire de ces 2 rencontres paraît bien être ailleurs. Les Wolves, meilleure défense de la saison régulière par une large marge ressemblent à un véritable étouffoir, brillant encore à un niveau supérieur maintenant les Playoffs arrivées.
Les Wolves possèdent un defensive rating de 98,9 sur les 2 premiers matchs. A l’inverse des performances des Cavaliers opposés à un Magic très léger offensivement, ou du Thunder opposé à des Pelicans privés de leur franchise player, les Wolves font face à un trident offensif qui avait de quoi faire frémir et un supporting cast à la hauteur.
Mais pour attaquer efficacement, il faut pouvoir se mouvoir dans la défense adverse. Je vous propose un petit tour d’horizon de l’irrespirable défense des Minnesota Timberwolves.
Des Suns armés pour poser des problèmes
Avant la série, nous voyions ce match-up des Suns comme un cadeau empoisonné pour Minnesota. Oui, la défense de Minnesota était effrayante, mais Phoenix avait des esthètes du tir à mi-distance qui pouvaient, à haut volume, punir la défense en drop des Wolves.
Les stars de Phoenix n’ont pas besoin d’aller à répétition dans la raquette, protégée par l’imposante présence de Rudy Gobert pour produire une attaque efficace. En ce sens, ils ont les armes pour sanctionner le principal système défensif de leur opposant et représentaient ainsi un danger malgré l’absence d’avantage du terrain.
Mais pour cela, il faut être capable de se créer de l’espace et donc passer le premier rideau des Wolves. Le tout de manière répétée. Et c’est là que Minnesota est exceptionnel dans ce début de campagne de Playoffs.
… Mais encore faut-il en avoir l’occasion
Lorsqu’on se souvient des critiques faites à Rudy Gobert en carrière, revenait souvent sa non-domination défensive dans le contexte des Playoffs. Comme expliqué dans cet article sur Gobert, la critique était pourtant assez injuste. A Utah, ce n’est pas les performances du pivot qui étaient problématiques, mais l’incapacité de ses coéquipiers à fournir un premier rideau un minimum solide.
A Minnesota, il a enfin trouvé les défenseurs capables de ralentir les attaquants adverses. Et dans ce premier tour, ils font bien plus que ça. Entre Anthony Edwards, Nickeil Alexander-Walker, Jaden McDaniels, Mike Conley voire Kyle Anderson, les Wolves possèdent un panel de défenseurs allant de fantastiques à compétents.
Dans ces 2 premiers matchs, ils ont pratiqué une défense harassante qui génère une difficulté constante à mettre en place l’attaque, un manque de lucidité de l’adversaire, une difficulté à saisir les opportunités voire un lot important de pertes de balles (18,4% de ballons perdus sur 2 matchs, pire % de ces Playoffs jusqu’ici).
Depuis le début de la série, les Wolves pratiquent le type de pression que l’on voit parfois sur des fins de rencontre mais ce, sur l’essentiel des rencontres, faisant complètement dérailler les Suns. Ici par exemple, NAW met une pression sur Devin Booker dès la remise en jeu et cela se termine… comme ça :
Cet harcèlement permanent, combiné à une protection de Rudy Gobert en second rideau joue un double jeu. D’une part cela rend la défense des Wolves particulièrement efficace, mais cela semble aussi jouer sur la lucidité des Suns qui finissent par rater des passes simples ou les pousse à prendre des tirs particulièrement peu favorables. Ces “ratés”, sont autant directs (mauvaises passes, ballons perdus), qu’indirects (voit les lignes de passes trop tard, voire pas du tout). Cela influe donc à la fois sur le nombre de possessions dont dispose les adversaires, mais aussi, leur capacité à dérouler leur attaque.
Ainsi, nous avons vu diverses scènes assez rares, parmi lesquelles, des Suns obligés de poser des écrans pour pouvoir faire une remise en jeu et éviter une violation des 8 secondes, des pertes de balles répétées dans leur moitié de terrain, etc.
Cette pression de tous les instants, cette implication collective totale se retrouve également sur la défense de transition. Comme Ben Taylor le montre dans cet extrait où, non seulement les Wolves reviennent tous en défense, mais réussissent à créer un surnombre avec des joueurs qui se trouvaient pourtant dans les corners au moment de la perte de balle, puis à défendre la possession dans la foulée en retrouvant immédiatement leur organisation collective :
En ce sens, la défense des Wolves ne brille pas uniquement par l’engagement collectif de ce côté du terrain (qui permet cette intensité), mais par la discipline dont elle fait preuve et la coordination collective.
Game 1 : la domination de Rudy
Cette agressivité de tous les instants des extérieurs de Minnesota facilite, de fait, grandement le travail de Rudy Gobert, qui peut montrer ses qualités sans avoir, comme à Utah, besoin de combler des brèches de toutes parts.
Dans le Game 1, les Suns ont eu beau tenter d’obtenir un régime de tir honorable au cercle, le résultat fut désastreux. Obligés de défier le français dans la raquette, ils se sont heurtés à répétition sur sa présence.
Ainsi, ils ont réalisé une de leurs pires marques de la saison près du cercle (42,9%), malgré leur volonté de s’offrir des tirs dans la zone la plus rentable du jeu :
Outre sa présence qui pousse toujours les attaquants adverses à ressortir lorsqu’il se trouve en position près du cercle, les tentatives pour le défier furent globalement un échec et ajoutent au un 2eme casse-tête aux Suns une fois le premier rideau passé.
En prime, même au large, Rudy a réussi à réaliser plusieurs bonnes possessions lors qu’il a été éloigné de sa zone de confort. Rappelant qu’il est également polyvalent grâce à ses longs segments et sa capacité à annuler les espaces créés par l’adversaire grâce à son bon timing.
Toujours capable de tenir son rang face à des attaquants plus mobiles, pouvant s’appuyer en prime sur la présence d’autres bigs (même si pas forcément de bons protecteurs de cercle), il a largement contribué à cette débâcle des Suns dans le Game 1.
La présence au cercle, une affaire collective
Avec leur multitude de défenseurs collants, longs, athlétiques, les Wolves réussissent à être disruptifs dans l’attaque du cercle même lorsque Rudy est sur le banc ou qu’il est éloigné de sa zone de confort.
A l’instar de Jaden McDaniels, Nickeil Alexander-Walker et Anthony Edwards profitent de leur longueur et de leurs qualités athlétiques pour gêner le tir voire réaliser du playmaking défensif. Entre leur faculté à générer des pertes de balles et à contrer leurs adversaires, les défenseurs des Wolves s’imposent en étant capables de mettre la pression du périmètre jusqu’au cercle :
En tête de proue, Jaden McDaniels s’est imposé comme un des tous meilleurs défenseurs NBA, brillant par sa polyvalence et la multitude de profils qu’il est capable de garder. Maintenant en Playoffs, l’ensemble de l’effectif semble vouloir se mettre au diapason de cette pressurisation constante et les Wolves ressemblent, sur ces 2 premiers matchs, à une des meilleures défenses de Playoffs qu’il m’ait été donné de voir dans le contexte de post-saison.
Privés de McDaniels la saison passée suite à une fracture à la main contractée pendant le Playin, NAW avait été particulièrement mis en avant grâce à sa défense sur Jamal Murray. Avec une saison de plus au compteur, un effectif au complet et une alchimie clairement supérieure, la défense des Wolves pourrait bien en faire un contender de premier plan. Dans l’histoire récente de la NBA, l’attaque a souvent été plus déterminante que la défense dans la conquête du titre, mais posséder un tel écart défensif avec le reste de l’élite de la ligue de ce côté du terrain pourrait bien limiter les doutes qui pesaient sur le niveau offensif de Minnesota à l’aube des Playoffs.
En effet, alors que l’attaque des Wolves demeurait comme une source de réserve quant à leur statut de favori dans la quête du titre, ce niveau défensif affiché très tôt dans cette campagne pourrait bien à la fois être une source de compensation plus que suffisante. D’une part parce qu’une défense aussi disruptive et agressive permet de transformer des séquences défensives en attaque rémunératrice (transition), mais aussi car ils semblent capables de délivrer une campagne qui ferait date de ce côté du terrain. Reste à maintenir ce niveau-là, et le transposer ça en demi-finale de conférence.