Incompréhensible. Après avoir rallié les finales de conférence 2022 au terme d’un parcours globalement convaincant, les Dallas Mavericks ont réalisé une saison 2022-23 de bien mauvaise facture, conclue par une opération tanking inimaginable quelques mois auparavant. Après un départ en demi-teinte – une habitude de la maison depuis quelques années – Dallas s’est écroulée une première fois début janvier, avant de rendre complètement les armes à la mi-février, en ne remportant que 7 de ses 25 derniers matchs.
Pourtant, le front-office s’était donné les moyens de ses ambitions, en attirant Kyrie Irving à la trade deadline. On réclamait un second ball-handler aux côtés de Luka Doncic ? On réclamait une seconde superstar ? Irving remplissait à merveille ces deux cases. C’est peu dire que ses deux premiers mois sous le maillot frappé du cheval texan n’ont collectivement pas rendu hommage à son immense talent.
Après une intersaison mouvementée, Dallas doit tenter de repartir de l’avant pour, à nouveau, afficher un niveau global conforme au talent qui peuple son roster. L’optimisme pousse à nous dire qu’il en faudrait beaucoup pour que l’exercice à venir soit plus décevant encore que le précédent. L’heure est venue de retourner aux affaires… et en playoffs !
In & out : le point sur le roster
Arrivées : Greg Brown III, Seth Curry, Dante Exum, Richaun Holmes, Derrick Jones Jr, Dreck Lively II, Mike Miles Jr, Olivier-Maxence Prosper, Jordan Walker, Joe Wieskamp, Grant Williams.
Départs : Facundo Campazzo, Davis Bertans, Reggie Bullock, Tyler Dorsey, Justin Holiday, AJ Lawson, JaVale McGee, Frank Ntilikina, Theo Pinson, Chris Silva, Kemba Walker, Christian Wood, McKinley Wright IV.
Le roster 2023/2024
Meneurs : Luka Doncic, Kyrie Irving, Mike Miles Jr,
Arrières : Seth Curry, Dante Exum, Josh Green, Tim Hardaway Jr, Jaden Hardy, Jordan Walker,
Ailiers : , Derrick Jones Jr, Joe Wieskamp
Ailiers-forts : Greg Brown III, Maxi Kleber, Markieff Morris, Olivier-Maxence Prosper, Grant Williams,
Pivots : Richaun Holmes, Dereck Lively II, Dwight Powell.
Joueurs en two-way contract.
Phase de l’équipe : Playoffs
Depuis que Luka Doncic a pris les rênes de cette équipe, Dallas est toujours parvenue à être compétitive… sauf l’an passé. Cela s’est tout d’abord soldé par deux défaites au premier tour de conférence face aux Clippers, puis, nous l’avons mentionné, par une finale de conférence 2022. L’ambition pour l’exercice 2023-24 qui s’apprête à s’ouvrir doit être de viser le plus haut possible. Certes, les interrogations demeurent nombreuses. Comment pourrait-il en aller autrement, alors que Dallas a eu le luxe le sélectionner un rookie dans la lottery en raison de ses mauvais résultats récents ? Plaidons pour la catastrophe accidentelle ; en toute logique, les Mavericks devraient se battre pour une accession directe en playoffs, dans une conférence Ouest relevée.
Les tendances de l’été
Kyrie Irving, le choix de la continuité
C’était le gros dossier estival pour le front-office des Mavs : que va faire Kyrie Irving, free agent, lors de son été ? Dallas avait fait le choix de le faire venir en début d’année, décision qui s’est avérée décevante sur ses premières semaines de cohabitation avec Luka Doncic.
Si les rumeurs allaient bon train, l’ex-Nets a choisi de prolonger sur un long contrat ses aventures texanes. 126 millions, 3 ans, et une player option.
D’un côté comme de l’autre, on a opté pour la continuité. Après une fin de cycle difficile à Boston et un passage mouvementé, sur et hors du terrain à Brooklyn, le meneur voulait une vraie nouvelle maison. “Ce n’était pas trop difficile, Dallas a toujours été ma priorité, a-t-il expliqué en conférence de presse. J’avais non seulement la sensation de pouvoir m’installer ici, mais aussi d’être heureux d’y revenir et d’être accueilli chaleureusement“.
Du côté de Dallas, la décision de lui proposer un important contrat était logique, malgré l’échec de la fin de saison dernière. Les Mavs avaient investi trois tours de draft dont un first round, mais aussi leur soldat en chef, Dorian Finney-Smith, ainsi que Spencer Dinwiddie dans le trade. Voir Kyrie repartir après deux mois dans le Texas aurait pu être perçu comme un véritable échec.
Ce dossier a été réglé très rapidement lors de la free-agency, ce qui a permis à Dallas de se positionner sur d’autres joueurs, dont un qui sera très complémentaire des deux ball-handler.
Grant Williams, la bonne pioche ?
Comme vous avez pu le lire un peu plus haut dans les annonces de départs et arrivées, une ribambelle de joueurs a quitté ou rejoint le navire Mavs. On peut citer Seth Curry qui revient au sein de la franchise qui l’a fait éclore, Richaun Holmes, récupéré lors d’un trade ou le bondissant Derrick Jones Jr qui apportera de la viande sur les ailes.
Mais le recrutement qui semble le plus intéressant est l’obtention de Grant Williams. L’ex-Celtics a été récupéré lors d’un sign and trade et a paraphé un contrat de 4 ans pour un peu plus de 50 millions à Dallas. Il semble être le complément parfait du duo de ball-handler : défensivement très polyvalent, lourd pour absorber les contacts au poste et très intelligent dans les rotations, il pourra apporter de l’autre côté, en attendant derrière la ligne de 3pts (37%, 41% et 39% lors des trois derrières saisons). Si son spacing n’était pas suffisant pour Joe Mazulla du côté du Massachusetts, nul doute qu’il remplira parfaitement son rôle à Dallas.
Focus sur la saison 2023-24 des Dallas Mavericks
Le développement des rookies
Pour la première fois depuis 2018, les regards des supporters de Dallas étaient tournés vers la draft annuelle, qui s’est déroulée le 22 juin dernier. L’équipe possédait le pick #10, arraché au Thunder après un simulacre de fin de saison, où aucune des deux équipes n’avait manifestement envie de gagner. Il faut dire que le choix des Mavericks aurait dû être envoyé à New York si la lottery s’était révélée malchanceuse ; Dallas a donc ainsi tout fait, sur le terrain, pour le conserver. Ce fut chose faite.
Pourtant, le pick #10 n’a pas été conservé. Avec celui-ci, les texans ont sélectionné Cason Wallace, qui a été transféré dans la foulée à Oklahoma en l’échange du choix #12, qui s’est transformé Derek Lively. Le pivot, passé une saison par l’université de Duke, a ainsi posé ses 215 centimètres (2m31 d’envergure !) et ses 105 kilos dans la raquette bleue. Alors que le poste de pivot constitue une faiblesse dans le roster, c’est peu dire que les attentes sont lourdes autour du jeune homme. Jason Kidd, son coach, vient d’ailleurs d’annoncer à demi-mot que Lively risquait fort de débuter la saison dans la peau d’un titulaire.
Sa Summer League ne nous a pas donné de grandes informations. En 5 matchs et 23 minutes de temps de jeu moyen, Lively a inscrit 8,4 points (68 % au tir) et gobé 8 rebonds par match. Au-delà de ces statistiques brutes, il a imposé sa présence défensive, tout en terminant très proprement au cercle. Il a également démontré – comme de nombreux pivots américains, d’ailleurs – qu’il ne savait pas poser un écran. Gageons, à cet égard, que ses entraînements spécifiques avec Tyson Chandler devraient faire évoluer les choses.
Ce n’est pas tant offensivement qu’il sera attendu en NBA. Certes, Luka Doncic a récemment indiqué que son entente avec le rookie était excellente sur le terrain. Le bonhomme devrait donc recevoir une brouette de lobs qu’il n’aura qu’à écraser dans le cercle. C’est surtout de l’autre côté du terrain qu’il pourrait apporter à l’équipe ; pas mauvais dans la dissuasion, il devra savoir gérer les situations de pick & roll pour ne pas être considéré comme un poids mort dans l’équipe – comme a pu l’être James Wiseman à Golden State, par exemple. Lorsqu’on sait que le développement des grands prend souvent la forme d’un long processus, on se dit qu’il ne faut certainement pas trop en attendre de Derek Lively II pour cette première saison.
Le front-office n’a pas terminé ses emplettes à la draft avec la sélection du pivot. La franchise a en effet pointé le museau en fin de premier tour, en faisant l’acquisition du 24ème choix, jusqu’alors détenu par Sacramento, pour choisir Olivier-Maxence Prosper. Le canadien, âgé de 21 ans et passé par Marquette, peut être décrit comme un ailier polyvalent, pas maladroit lorsqu’il s’agit de shooter et pas réticent lorsqu’il est question de défendre. Il a su convaincre Nico Harrison – General Manager de la franchise – par sa polyvalence défensive sur les lignes extérieur.
S’il ne devrait pas contribuer à l’augmentation du plafond de l’équipe, O-Max a une place à se faire dans la rotation, dans le rôle tant recherché de 3&D moderne. Sa Summer League, très réussie des deux côtés du terrain, constitue une source de réjouissances. Très agressif et disponible off-ball, il devrait avoir son mot à dire sur les ailes, derrière Grant Williams, Josh Green et Maxi Kleber.
En somme, les rookies de Dallas devraient être lancés dans le grand bain sans attendre. Si leur apport contribue à accroître le niveau plancher de l’équipe, les Mavericks pourront s’estimer satisfaits, car les postes du frontcourt ne sont clairement pas ceux qui présentent la plus grande profondeur.
Une alchimie entre les deux superstars
Ce n’est un secret pour personne, l’arrivée de Kyrie Irving à Dallas en février dernier n’a pas donné lieu à de grands résultats collectifs. Non pas que le meneur né à Melbourne y soit pour quelque chose, lui dont les statistiques au Texas ont été… excellentes ? 27 points, 5 rebonds, 6 passes décisives à 51 % au tir, 39,2 % de loin et 94,7 % aux lancers. Force est néanmoins de constater que lorsqu’il a été associé à Luka Doncic – car c’est quand même pour cela que les Mavericks l’ont attiré – les résultats n’ont pas été fameux : 14 rencontres et 5 victoires.
D’autant que, le calendrier n’a pas non plus été complètement dantesque ! Parmi les 14 matchs susmentionnés, Dallas a affronté les Spurs, les Pacers (x2), les Hornets (x2), les Pelicans ou encore le Jazz. En somme, il n’y avait pas que des têtes d’affiche.
Pourtant, cela n’a pas fonctionné. On sait que le Slovène était un peu diminué en fin de saison. Mais plus encore que l’aspect physique des choses, un élément nous a sauté aux yeux : les deux superstars peinaient à évoluer ensemble. Certes, ils étaient tous les deux sur le parquet. Toutefois, ils donnaient l’impression de jouer chacun leur tour, dans un “à toi, à moi” peu satisfaisant.
Nous pouvons trouver des explications à cela. Doncic a toujours eu l’habitude d’être l’unique leader technique de l’équipe et n’a jamais eu à évoluer avec un second All-star susceptible d’avoir la balle en main. Son jeu off-ball est ainsi… inexistant ? Tandis que Kyrie Irving a joué avec LeBron James, James Harden ou Kevin Durant et est particulièrement à l’aise loin du ballon, le slovène peine à peser sur le jeu lorsque la gonfle est dans les mains d’un coéquipier. Sans devenir Stephen Curry, il gagnerait certainement à s’améliorer dans ce domaine. Sa gravité – comprenez : le danger qu’il représente – libérerait en effet énormément d’espaces pour un Irving qui n’en demanderait pas tant.
Le calcul serait d’autant plus gagnant que si l’alchimie n’était pas évidente – tout du moins pas pour les 2 joueurs – l’association de ce duo était pourtant, elle, déjà létale. Avec 119,2 d’offensive rating lorsqu’ils partageaient sur le terrain, les Mavs étaient alors au-dessus de la meilleure attaque de la saison passée (les Sacramento Kings). C’est à dire que sans training camp, et avec un Luka Doncic qui traînait un peu de la patte, la paire possédait déjà une faculté à faire sauter le verrou des défenses adverses.
Il nous paraît certain que si Dallas souhaite être une franchise compétitive – nul ne doute qu’il s’agit de l’objectif – cela passera par les performances de ses stars. S’il ne fait pas de doute qu’ils scoreront, il serait de bon ton qu’ils parviennent à jouer ensemble, dans une alchimie vectrice de tous les dangers pour la défense adverse. Si le fit entre Doncic et Irving prend à son plein potentiel, l’attaque des hommes de Jason Kidd deviendra difficile à stopper, surtout si les role player ont réglé la mire dans les corner.
Restera alors le principal chantier de Dallas… La défense. Et c’est au fond cela qui a réellement pêché pour la franchise à l’issue du trade pour Irving.
Des efforts défensifs
Il s’agit selon nous du point le plus fondamental.
Certes, cela fait des années que Dallas a la réputation d’être une franchise très offensive et qui, en contrepartie, délaisse totalement – ou presque – l’aspect défensif du basketball. L’exercice passé est là pour le démontrer, puisque les Mavs l’ont terminé avec le 6ème offensive rating et le 24ème defensive rating de la Ligue. Lors de ses récentes qualifications en playoffs, l’idée était identique : 1ère attaque et 18ème défense en 2020, 9ème attaque et 20ème défense l’année suivante.
L’on constate toutefois que lorsque Dallas évolue selon ce schéma du “tout pour l’attaque”, les résultats peinent à emballer. Voyez plutôt : 43 victoires en 2020 (année covid, 75 matchs joués), 42 en 2021 (72 matchs joués) et 38 en 2023 (82 matchs joués). Le tout pour deux éliminations au premier tour des playoffs et une terrible 11ème place de la conférence en 2023. En somme, on s’aperçoit que le modèle présente des insuffisances évidentes, qui se traduisent par des résultats collectifs moyens, au mieux.
La seule exception, ces dernières années ? La saison 2021-22. Dallas a alors remporté 52 matchs (sur 82) en saison régulière, pour s’offrir la 4ème place de la conférence Ouest. Ce résultat collectif n’est pas uniquement dû à la saison majuscule de son franchise player, loin s’en faut. On remarque en effet que l’attaque des Mavs a été moyenne (15ème offensive rating), tandis que sa défense pourrait presque être considérée comme étant élite (6ème defensive rating). Un changement de paradigme qui a porté ses fruits en post-season, puisque les Mavericks ont fait une incursion en finale de conférence, pour une élimination face aux Warriors, futurs champions.
En l’état, ne croyons pas aux coïncidences ; pour que Dallas puisse prétendre à peser au printemps 2024, l’équipe va devoir posséder une défense a minima correcte. On ne s’attend certes pas à voir les texans se transformer en mur infranchissable, car plusieurs joueurs de l’effectif – pour diverses raisons – présentent certaines carences défensives. Ce peut être le cas de Kyrie Irving, Tim Hardaway Jr, Seth Curry ou Richaun Holmes. Luka Doncic, lui, ne prétend clairement pas à une nomination dans une All-NBA defensive team, mais il est erroné de continuer de le considérer comme un défenseur négatif. N’oublions pas, d’ailleurs, que son volume offensif – absolument monumental – l’empêche de facto de se dépecer de l’autre côté du terrain.
Mais alors, qui défend chez les Dallas Mavericks ? Sur le backcourt, Josh Green – qui peut aussi évoluer au poste 3 – a présenté de belles compétences. Les espoirs reposent en réalité sur certaines nouvelles têtes, au premier rang desquelles l’on se doit de citer Grant Williams. Role player par excellence lors de son passage à Boston, Batman ressemble à l’intérieur idéal : petit général défensif capable de grosses missions individuelles, tout en apportant son écot offensif entre tir longue distance et bon QI Bakset. S’il est remis de son opération à la main gauche, il devra endosser à Dallas le plus grand rôle de son début de carrière. Au point d’être responsabilisé comme le maillon numéro 1 de la défense de l’équipe ? Très probablement.
Au-delà, Maxi Kleber et Dwight Powell ont, au fil des saisons, acquis des aptitudes défensives valorisables, tout comme Derrick Jones Jr. Reste alors le cas des deux rookies susmentionnés, dont la carte d’entrée dans la Grande Ligue semble être la défense. Reste que le management est encore mêlé dans certaines rumeurs, qui concernent notamment Clint Capela ou Jrue Holiday (tout juste envoyé à Portland). Comme s’il était conscient que le talent offensif de ses stars devrait être insuffisant pour tutoyer les sommets. En cela, nous sommes clairement en adéquation avec lui.
Qu’est-ce qu’on veut voir cette saison ?
Dallas doit réapprendre à évoluer à la hauteur de son potentiel. Avec Doncic, Irving et Williams dans le cinq majeur, accompagnés de Green, Hardaway Jr, Curry ou Kleber, l’équipe semble avoir l’effectif pour battre n’importe qui dans un bon soir. Viser les 50 victoires régulières constitue selon-nous un objectif légitime. Cela devrait permettre aux texans de retrouver les matchs à élimination sans avoir à passer par le play-in tournament. Pour cela, il faudra batailler avec de nombreuses équipes – pêle-mêle et sans exhaustivité : les équipes de L.A, Golden State, Sacramento, Memphis, Minnesota, New-Orleans, étant précisé que nous considérons Denver et Phoenix comme étant supérieurs sur le papier.
Pour ce faire, au-delà du festival offensif que le duo Doncic-Irving laisse envisager, il est impératif que Dallas se (re)mette à défendre correctement. Si tel est le cas, l’équipe risque de (re)devenir un poil à gratter dans sa conférence. L’optimisme, encore et toujours.