Que c’est difficile de porter un regard sur la saison passée des Brooklyn Nets ! Alors qu’on attendait la seconde franchise de New York dans les hautes sphères de sa conférence, son début de saison a finalement laissé craindre le pire, alors même qu’elle possédait dans ses rangs Kevin Durant et Kyrie Irving. La machine s’est enclenchée au début du mois de janvier, avec une série de victoires aux allures de rouleau-compresseur. Puis vint… l’explosion. Totale, franche, massive. Irving s’est envolé à Dallas, bientôt suivi par Durant, qui a posé ses valises à Phoenix.
Cette trade deadline très agitée n’a pas pour autant tué dans l’œuf toutes les velléités de l’équipe coachée par Jacque Vaughn. Les nouvelles recrues, au premier rang desquelles on se doit de citer Mikal Bridges, n’ont pas déjoué. Toutefois, il manquait soudainement une première option, une vraie. Brooklyn s’est tout de même qualifiée en playoffs, pour une élimination sèche et logique face aux 76ers (4 – 0).
Sans porter aucun jugement, il semblerait que les Nets soient repartis pour une nouvelle reconstruction. La page du Monster trio (Durant, Irving, Harden), doit être tournée définitivement pour mieux se projeter vers un avenir… pas si noir ?
In & out : le point sur le roster
Arrivées : Darius Bazley, Armoni Brooks, Noah Clowney, Harry Giles, Dennis Smith Jr, Lonnie Walker IV, Trendon Watford, Dariq Whitehead, Jalen Wilson.
Départs : Moses Brown, Seth Curry, David Duke Jr, RaiQuan Gray, Joe Harris, Patty Mills, Nerlens Noel, Dru Smith, Edmond Sumner, Yuta Watanabe, Alondes Williams.
Le roster 2023/2024
Meneurs : Armoni Brooks, Spencer Dinwiddie, Dennis Smith Jr, Ben Simmons,
Arrières : Cam Thomas, Lonnie Walker IV,
Ailiers : Mikal Bridges, Royce O’Neale, Dariq Whitehead,
Ailiers-forts : Noah Clowney, Dorian Finney-Smith, Cameron Johnson, Trendon Watford, Jalen Wilson,
Pivots : Darius Bazley, Nic Claxton, Harry Giles, Day’Ron Sharpe.
Joueurs en two-way contract.
Phase de l’équipe : Play-in
Bien malin sera celui qui parviendra à estimer avec acuité à quoi ressemblera la saison à venir de Brooklyn. Au-delà même des grands chambardements de l’an passé, il apparaît que l’été n’a pas non plus été de tout repos (voir ci-dessous). Avec du talent sur toutes les lignes – mais certainement pas suffisamment pour prétendre à être légitimement très ambitieux – les Nets gagneraient peut-être à réaliser une saison de transition, disputée à fond… puis à aviser. Rares sont les équipes qui parviennent à bâtir quelque chose en bouleversant leur effectif tous les ans. En somme, si l’exercice à venir pouvait ressembler à “l’année 1” du nouveau projet de la franchise, il y aurait là quelque chose de rassurant.
Les tendances de l’été
L’on pouvait penser qu’après avoir réalisé deux trades de grande envergure, l’été allait être calme du côté de Brooklyn. Nous étions naïfs. L’intersaison a débuté avec la draft, qui s’est d’ailleurs déroulée à domicile, et la sélection de 3 jeunes prospects.
Le premier, Noah Clowney, est un ailier-fort (19 ans, 2m08, 95 kilos) passé par Alabama, capable de switcher sur plusieurs postes. Pas encore très à l’aise avec son tir lointain, il ne rechigne toutefois pas à prendre sa chance, signe – peut-être – qu’il y a quelque chose à développer de ce côté-ci. Sa palette défensive semble suffisante pour gratter quelques minutes de temps de jeu dès le jour 1 de sa carrière professionnelle.
Le second, Dariq Whitehead, possède un profil très différent. Attendu extrêmement haut à sa sortie du lycée, Whitehead a enchaîné deux opérations du pied. Son exercice chez les Blue Devils de Duke a été particulièrement contrasté. Si les flash offensifs sont parfois extrêmement prometteurs – ce qui lui permettait d’être projeté top 5 de la draft – et qu’il n’est pas non plus le dernier à faire jouer ses camarades, ses soucis physiques et ses difficultés athlétiques (19 ans, 1m96, 85 kilos) devraient poser des difficultés à l’ailier. Notons toutefois que, surfant sur sa fin de saison universitaire, il affiche un très joli 42,9 % de réussite à trois-points, sur 3,5 tentatives par match. Dommage que ce soit… plus que sa réussite globale au tir (42,1 % !).
Le dernier, Jalen Wilson, est également un ailier-fort (23 ans, 2m03, 97 kilos) au profil néanmoins résolument plus offensif que celui de Clowney. Wilson revient d’une grave blessure contractée lors de son premier match à l’université, ce qui ne lui a pas fait perdre un chouille de son explosivité. Capable de jouer avec la balle, que ce soit pour lui-même ou dans la création pour autrui, il pourrait venir dynamiser un peu le banc des Nets, par ses pénétrations, son passing et son tir.
En sus de ces trois rookies, le management a réalisé un grand ménage d’été dans son effectif. On dénombre ainsi plus de 10 départs. Si certains semblent anecdotiques, d’autres méritent que nous tapions quelques mots. C’est évidemment le cas de Joe Harris, qui était présent à Brooklyn depuis 2016 et qui a été tradé contre plusieurs seconds tours de draft. Il évoluera l’an prochain chez les Pistons de Detroit. Il reste néanmoins sur deux saisons compliquées, avec un physique qui l’a lâché en 2021-22 et des difficultés pour revenir la saison passée.
Évoquons également le départ de Seth Curry, qui a fait son retour à Dallas. Toujours aussi précieux à longue distance, le frangin de la fratrie s’était imposé chez les Nets comme un membre important de la rotation, quand bien même ses difficultés défensives constituent un frein important lorsque les matchs commencent véritablement à compter.
Les arrivées sont aussi nombreuses que les départs. Brooklyn a semble-t-il misé sur la jeunesse, puisque le roster accueille Harry Giles, Lonny Walker IV, Dennis Smith Jr ou encore Trendon Watford, dont le départ de Portland a quelque peu fait jaser. En somme, c’est avec un effectif complètement remodelé par rapport à l’année passée que les Nets attaquent cette saison 2023-24. Avec quelques incertitudes, également.
Focus sur la saison 2023-24 des Brooklyn Nets
Haut plancher, bas plafond ?
Nous l’avons évoqué ci-dessus, les départs successifs des superstars de l’effectif n’ont pas totalement purgé celui-ci de tout talent. Brooklyn dispose d’un réservoir de joueurs intéressants, qui présente une double particularité : il semble bien trop fort pour que l’équipe puisse prétendre au tanking (d’autant plus qu’il existe des interrogations autour de la cuvée 2024), mais pas suffisamment pour espérer quelque chose de grand au printemps.
En somme, derrière l’option n° 1 qui devrait s’appeler Mikal Bridges, les Nets vont indubitablement remporter des matchs. Aux côtés de l’ailier – qui pourrait être décalé au poste 2 – l’on retrouve Spencer Dinwiddie, Cameron Johnson, Dorian Finney-Smith et Nic Claxton dans un 5 majeur éventuel. Si cela manque cruellement de création pour autrui – nous parlerons du cas de Ben Simmons ci-dessous – le fit semble être a minima correct, notamment en défense. Hormis le premier cité, tous les joueurs sont réputés pour être solides de leur côté du terrain. Claxton s’est imposé comme un protecteur de cercle et un rim-runner intéressant, Bridges a déjà terminé sur le podium du DPOY, tandis que Finney-Smith et dans une moindre mesure O’Neale sont capables de switcher sur plus petits et plus gros qu’eux.
Offensivement, si ce n’est pas la panacée, ce n’est pas non plus la catastrophe. Certes, confier la gonfle à Dinwiddie semble très léger lorsqu’il s’agissait de gagner sur le long terme. Bridges, capable d’initier, n’a pas non plus les qualités d’un porteur de balle primaire. Pour autant, à nouveau, cela suffira pour remporter quelques rencontres. D’autant plus que le banc des remplaçants peut compter sur quelques dynamiteurs, tel Cam Thomas (rappelez vous de sa semaine du 4 février 2023, où il s’est pris pour Kobe Bryant, en enchaînant 3 matchs à 44, 47 et 43 points !), voire Dariq Whitehead.
Au-delà, l’effectif est globalement profond, notamment sur les postes du frontcourt. En sus de Johnson, Finney-Smith et de Claxton, Vaughn peut compter sur Royce O’Neal à l’aide, Trendon Watford et sur le poste 4, mais aussi sur Day’Ron Sharpe et Darius Bazley sous les cercles. Encore une fois, c’est loin d’être ridicule dans l’optique d’être un minimum compétitif.
En somme, la saison de Brooklyn pourrait ressembler à celle que viennent d’achever les Raptors. Cela ne fera certainement pas frétiller les foules, mais l’on ne pourra pas se pointer chez eux en chausson, le bégonia au bord du fusil. Dans une NBA de plus en plus binaire – entre les têtes de série et le tanking – la situation n’est pas enviable. Mais tant qu’elle ne perdure pas trop longtemps, elle ne devrait pas se révéler si problématique.
Des paris… forcément perdants ?
Pour quiconque n’a pas véritablement suivi l’intersaison des Nets, certains noms du roster peuvent étonner. Et pour cause, la colonne (la ligne, en réalité) des arrivées est bien remplie. Pour autant, l’auteur de ces lignes a du mal à la trouver particulièrement emballante. Vous aurez peut-être remarqué que les joueurs évoqués dans la sous-partie précédente étaient déjà presque tous présents dans l ‘effectif l’an passé. C’est que plusieurs recrues possèdent une expérience troublée avec la Grande Ligue et qu’on peine à déceler le monde dans lequel les attirer ressemble à un coup de maître.
Commençons par le poste 1 et le cas de Dennis Smith Jr. Celui-ci a réalisé une saison rookie très prometteuse à Dallas. Malheureusement pour lui, les Mavericks sont parvenus à mettre la main sur le prodige qu’est Luka Doncic dès la draft suivante. Le natif de Fayetteville a ainsi été transféré au cours de son exercice sophomore, du côté de New York, dans le cadre du trade qui a attiré Kristaps Porzingis dans le Texas. S’il a bien terminé sa seconde saison dans la Grosse Pomme, il s’est écroulé physiquement et techniquement l’année suivante. Depuis lors, il a bourlingué, de Detroit à Portland et de l’Oregon à Charlotte, où un regain de forme a pu être observé, notamment défensivement. Il n’a toutefois pas su conquérir une place de titulaire. Son passage à Brooklyn ressemble presque à une dernière chance dans la Ligue, ce qui ne prête pas spécialement à l’optimisme.
Au poste d’arrière, derrière Mikal Bridges, on retrouve désormais l’ex plus belle coiffure de la NBA en la personne de Lonnie Walker IV. Vis-à-vis de lui, il y a lieu d’être moins sévère, car le bonhomme sort d’une saison très correcte du côté de Los Angeles. Chez les Lakers, il a même très ponctuellement endossé le rôle de sauveur de la patrie, comme cela a été le cas face à Golden State en playoffs. Ses performances restent néanmoins très sinusoïdales. Disons que si vous êtes à la recherche de garanties, il ne faut peut-être pas vous tourner vers l’ancien de San Antonio (4 saisons). Pour autant, parmi les 4 bonhommes dont on va parler dans cette rubrique, c’est celui sur lequel l’on doute le moins. En espérant voir sa meilleure version à New York.
Sous les cercles, on remarque qu’un joueur dénué de tout contrat professionnel l’an passé a fait son apparition : Harry Giles. Ancienne darling de Sacramento, l’intérieur a un temps excité les observateurs par son panel technique et ses flashs. La réalité du terrain s’est toutefois chargée de tous nous ramener à la raison. Au cours de ses 3 saisons professionnelles, Giles s’est énormément blessé (58, 46 et 38 matchs disputés), au point de sortir totalement de la rotation d’un Portland pourtant patraque en 2020-21. Pire encore, aucune équipe ne lui a fait confiance l’an passé. Le relancer ressemble ainsi à un drôle de pari, mais il n’y a finalement pas grand chose à perdre.
Nous ne parlons pas énormément de Dariq Whitehead, car nous avons déjà présenté le profil du rookie longiligne ci-dessus. Toutefois, encore une fois, il s’agit d’un joueur qui n’offre que peu de certitudes.
Loin de nous l’idée et l’envie d’enterrer définitivement ce quatuor. Force est toutefois de constater que l’hypothèse de les voir performer de concert entre septembre et avril (et plus si affinité, évidemment), est minime. Aussi, si le 5 titulaires des Nets semble être solide et que la première rotation devrait être convenable, le reste du roster est sujet à risques.
Ajoutez à cela la présence onéreuse de Ben Simmons et vous obtenez un roster qui ressemble à un immense pari. Le souci, c’est que si 100% des parieurs ont tenté leur chance, c’est également le cas de 100% des perdants. Et dans le cas des joueurs précités – hormis Whitehead à qui on laisse le bénéfice du doute et Walker IV, qui a prouvé certaines belles choses à L.A – la côte du crash est malheureusement faible.
L’énigme Ben Simmons
L’année à venir, Ben Simmons va gagner près de 38M$. La suivante ? Un peu plus de 40M$. Il y a encore quelques saisons, l’Australien – premier de la draft 2016 – semblait pouvoir assumer ce salaire conséquent, tant ses performances sous le maillot des 76ers étaient étincelantes. Cela nous semble désormais bien loin. Après une saison totalement blanche en 2021-22, le meneur / ailier-fort a fait son retour la saison passée : 42 matchs (26,3 minutes de moyenne), pour 6,9 points, 6,3 rebonds et 6,1 passes décisives, à 56,6 % de réussite au tir.
C’est… étrange, comme ligne statistique. On voit que Simmons est toujours capable de tout faire. Toutefois, sa confiance dans les phases de jeu offensives était proche du néant. Si saignant balle en main il y a encore quelques années, il semblait presque perdu sur le parquet. Plus encore, sa blessure au dos l’a rattrapé et l’Australien a passé la fin de la saison régulière aux côtés de l’infirmière.
Nous qui étions encore positifs à son sujet à l’été 2021 sommes bien forcés d’admettre aujourd’hui que la probabilité de son retour au plus haut niveau est… trouble ? Pourtant, elle ferait un bien fou à cette équipe de Brooklyn. Nous avons pointé du doigt le manque de création du roster. Cette équipe de Brooklyn est dénuée de tout porteur de balle principal et “élite”. Or, à Philadelphia, c’était là l’un des deux gros points forts de Simmons, aux côtés de sa défense.
Sa résurrection permettrait de pousser Dinwiddie sur le banc, en tant que 6ème homme de luxe. Il formerait avec Bridges un duo absolument insupportable pour les extérieurs adverses. Elle permettrait également de soustraire ce dernier d’une partie de ses responsabilités offensives. En une formule comme en mille mots, un Ben Simmons en forme ferait beaucoup de bien aux hommes de Jacque Vaughn. De rien pour la porte ouverte.
Qu’est-ce qu’on veut voir cette saison ?
De la combativité ! Brooklyn doit jouer les poils à gratter de la NBA. Bien que la franchise soit désormais bourrée de picks de draft dans les prochaines années, il nous semble que les joueurs présents rendent impossible l’idée de jeter une saison complète par la fenêtre. Les Nets doivent, selon nous, tout donner pour réaliser la meilleure saison possible. De là à les imaginer grapiller une place en play-in ? Et pourquoi pas, après tout ?