A l’heure de donner le top de la saison des Charlotte Hornets, bien difficile de savoir par où commencer. L’année dernière, nous démarrions la preview par des mots, qui ont encore leur actualité aujourd’hui : “On prend les mêmes, et on recommence.” Différence notable, ils sortaient d’un bel exercice 2021-2022 assorti de 43 victoires. Cette fois-ci, seulement 27 “W” sont venues alimenter le compteur. Comment expliquer ce recul ? Les 46 matchs manqués par LaMelo Ball sont sans doute une explication, mais, en sa présence, ils ne cumulaient que 13 victoires pour 23 défaites. Les fans questionneront l’absence de Miles Bridges, parfait acolyte de LaMelo avec son jeu tout en transition et en agressivité. Ça tombe bien, cette année il fait son retour, armé de ses jambes et sans doute de ses poings.
Mais… quelque chose parait plus profond dans le déroulement de l’histoire de cette franchise. Dans le management, dans les bureaux, dans les choix, voilà des décennies qu’elle se bat pour exister et qu’il serait presque adéquat d’envoyer la même preview saison après saison. Celle d’une équipe oubliée, malgré des profils de joueurs excitants. D’une franchise qui ne sait pas gagner, bien qu’est à sa tête l’incarnation de l’aversion de la défaite. Une équipe en décalage entre ce qu’elle voudrait être, et ce qu’elle est : sexy, comme ses maillots, anonyme, comme ses résultats.
Depuis que les Bobcats sont redevenus les Hornets en 2014, soit neufs saisons, seulement une fois la franchise est allée en playoffs (2015-2016). Depuis que les Bobcats sont redevenus les Hornets, seulement deux fois ils ont dépassé la barre symbolique des 50% de victoires (15′-16′ et 2021-2022). Paradoxe : ils ont écarté James Borrego a l’issue de sa meilleure saison, et après 3 saisons consécutives où le nombre de victoires grimpait de 10 en 10. Pourquoi ? On se le demande encore. Comme l’impression que seule une envie de changement mécanique l’imposait, alors qu’arrivait à maturité le groupe de jeunes qu’il devait former.
Peut-être était ce l’opportunité “sexy”, encore une fois, de récupérer Kenny Atkinson qui avait développé un jeu attrayant, ponctué de bons résultats à Brooklyn, dans l’ère pré-Durant/Irving ? Dur à dire. Son volte-face (départ aux Warriors en assistant coach) ne leur a pas permis d’aller jusqu’au bout de leur idée, et c’est Steve Clifford qui a repris le flambeau qu’il avait du laisser à Borrego en 2018.
Cette description prolixe a pour but, d’abord de vous remettre dans le contexte, mais surtout de vous montrer à quel point il est difficile de percevoir le chemin que prend cette franchise et les moyens pour arriver à destination.
Et si, finalement, le “rêve”, pour cette saison et celles à venir, n’était pas d’y croire enfin ?
In & out : le point sur le roster
Arrivées : Leaky Black (draft), Brandon Miller (draft), Nick Smith. Jr. (draft), Frank Ntilikina, Miles Bridges,
Départs : Theo Maledon, Svi Mykhailiuk, Kelly Oubre. Jr., Kobi Simmons, Dennis Smith, Xavier Sneed
Roster 2023/2024
Meneurs : Lamelo Ball, James Bouknight
Arrières : Terry Rozier, Jaylen Sims, Frank Ntilikina, Nick Smith. Jr.
Ailiers : Gordon Hayward, Brandon Miller, Cody Martin,
Ailiers-forts : Miles Bridges, P.J. Washington, J.T. Thor,
Pivots : Mark Williams, Nick Richards, Kai Jones
Phase de l’équipe : Reconstruction ou Play’in ?
Instinctivement, on ne va pas vous raconter de mauvaises histoires, toute la rédaction avait mis les Hornets dans le chapeau “reconstruction”. Comme une évidence. Et pourtant, lorsque l’on prête un oeil attentif à ce qu’ont dessinés Mitch Kupchak et Michael Jordan, c’est peut-être moins assuré qu’il n’y parait. Et si, finalement, Buzz CIty était plus ambitieux ?
Les tendances de l’été
“On prend les mêmes et on recommence“, donc. On pourrait effectivement résumer les mouvements des Hornets avec cette formule. Mais c’est un mix de 2021-2022 et de 2022-2023 qui devrait se présenter devant vous. Car le grand événement de l’été c’est effectivement le retour de Miles Bridges. Vu l’objectif de la preview, on ne perdra pas d’énergie sur ses problèmes extra-sportifs, vous vous doutez bien de notre avis, et nous allons nous concentrer sur le jeu.
C’est un retour que l’on va guetter avec appétit car il leur permet de reprendre la base entrevue en 21′-22′ en y ajoutant l’apport de jeunes intérieurs aguerris d’une saison NBA pour en compenser les défauts. 22e au défensive rating il y a 2 ans, ils étaient 20e cette année. Mark Williams et Nick Richards, qui a vu son temps de jeu exploser, apportant une partie de ce qui manquait à cette équipe : de la présence intérieure et du rebond.
Pour finir le shaker 2023-2024, il faut ajouter un top 2 de draft en la présence de l’ailier américain Brandon Miller, ce qui n’est jamais rien. Nous reviendrons sur lui dans le détail, mais le frontoffice a profité de son annus horribilis pour ajouter un poste 3 complet et shooteur qui devrait feater avec LaMelo et Bridges, tout en apportant une alternative plus agressive à Gordon Hayward. Coté banc, rien n’a bougé.
Tout porte à croire que les Hornets veulent tester la viabilité de leur génération dès cette année en s’appuyant sur une forme de stabilité. L’objectif : cumuler à leur 43-39 d’il y a deux ans les atouts qu’ils ont obtenus depuis.
Focus sur la saison 2023-24 des Hornets
Retrouver la connexion Ball – Bridges
Pour repartir sur les meilleures espoirs, Charlotte doit retrouver cette connexion Ball – Bridges efficace qui donnait à la fois une base et une perspective à cette équipe. On sait l’affinité des deux garçons, LaMelo ayant confié au NewYorkPost sa présence auprès de son ami pendant cette période difficile en septembre dernier “Il va clairement nous manquer… Je lui parle tous les jours”. Cette complicité se retrouve sur le terrain. Lors de leur dernière saison commune, si l’on regarde les trios* de lineup les plus efficaces dans le roster des Hornets, on retrouve évidemment les deux stars. Ils formaient avec PJ Washington (trio à minimum 500 minutes), l’association la plus efficace avec un jolie 115.3 d’offensive rating, et un +5,1 de net rating.
Le duo se basait sur des atouts dont la complémentarité paraissait évidente : Bridges, fort de ses qualités athlétiques apportait sa vitesse et son agressivité en contre-attaque. Son jeu de cut sur demi terrain. Cela venait mettre en lumière la créativité de LaMelo en transition et dans ses attaques de cercle. En 2021-2022, Charlotte était la 2e équipe qui utilisait le plus la transition, avec le 11e meilleur ratio de points marqués par tentative (1.15). Cette année, ils étaient la 11e équipe qui en tentait le plus, avec la 3e pire efficacité de la ligue dans ce registre (28e). Les retours de Ball et Bridges, et surtout de leur association, doit permettre aux Hornets de retrouver ces schémas préférentiels.
L’ailier doit également soulager son meneur et diminuer l’utilisation d’un Terry Rozier dont la dernière saison a montré qu’il ne pouvait pas être une deuxième option tant son efficacité peut chuter avec des responsabilités accrues.
Enfin, et c’est sans doute le plus important, Bridges doit traduite une volonté de concrétiser les écarts réalisés par LaMelo. A la différence de Rozier et Hayward, qui sont plus des créateurs et qui ont plus de difficultés à profiter de ces écarts, des joueurs comme Bridges, PJ Washington, Mark Williams, voire même Brandon Miller, doivent permettre de maximiser le meneur de jeu.
Les blessures : valider/invalider sur qui investir
L’un des grands sujets des Hornets, c’est évidemment les blessures. Dans cette logique de maturation d’un groupe jeune, qui rentre dans la 4e année du cycle LaMelo Ball, il est nécessaire de pouvoir valider sur qui compter et sur qui investir. La première qualité d’un joueur, ce ne sera jamais assez répété, c’est la présence sur le terrain. Et sur ce registre, le bât blesse.
Si l’on prend les trois dernières saisons, au moins quatre joueurs du noyau dur ont manqué plus d’un tiers des matchs, et sans doute les plus importants : Ball, Bridges, Williams et Hayward. Si le but est de poser les premières bases d’une équipe ambitieuse cette année, les Hornets ont besoin de savoir sur quels joueurs compter :
- LeMelo, tout aussi fondamental soit-il, est-il un joueur fiable ? Avec deux saisons à moins de 55 matchs, s’il en enchaine une troisième en quatre ans, la question pourrait commencer à se poser. Lui qui a été prolongé via un contrat max pourrait-il alors voir sa cote testée ?
- Gordon Hayward, en fin de contrat cette année. S’il reste un vétéran malin, essentiel pour cette équipe et parfait pour encadrer la post-formation de Brandon Miller, les Hornets voudront-ils le garder après une nouvelle année au-delà des 30 matchs d’absence ?
- Miles Bridges, qui pour le coup a le corps robuste, est-il capable d’arranger ses problèmes hors terrain pour ne pas perturber l’évolution de cette équipe ?
Source : HoopsHype.com
Quel rôle pour Brandon Miller ?
Venons en au nouveau talent. Brandon Miller arrive à Charlotte avec une belle étiquette de numéro 2 de draft qui devrait lui donner un certain confort. Loin de la pression des deux derniers first pick (Wemby et Holmgren), il devrait pouvoir progresser en sous-marin, encadrer par un des vétérans les plus smart de la ligue.
Pour ceux qui ne le connaissent pas, petite présentation de l’ancienne star d’Alabama. Profilé à la Paul George par les scouts les plus ambitieux, à la Rudy Gay pour les plus raisonnables, Miller arrive en NBA avec une arme qui devrait lui permettre de stabiliser sa place dans un roster sans trop tarder : son tir à trois points. Il tournait à 43% en tentant sa chance plus de 7 fois par match avec une gestuelle que les collègues d’Envergure estiment rapide, éprouvée en catch and shoot, d’abord, et en sortie de dribble, ensuite.
Miller est avant tout un finisseur d’action, qui devrait rentrer dans le moule des Bridges et Washington, capables de profiter des décalages initiés par LaMelo et Rozier. La Summer League nous a plutôt donné l’impression qu’il était malhabile dans un rôle de première option à la création. Et sans doute qu’il avait un peu de mal à gérer la pression des premières rencontres scoutées : 16 points à 5/15 contre les Spurs (match 1),10 points à 4/18 contre les Lakers (match 2), mais du mieux contre les Blazers avec 26 points (8/15) lors de la troisième rencontre.
Bon, ce dernier argument peut aisément être contre balancé par sa performance du 23 février 2023. Ce qui nous permet d’aborder l’ombre au tableau. Depuis le début d’année, il est empêtré dans une macabre histoire d’homicide : il aurait fourni l’arme ayant donnée lieu au décès d’une jeune mère de famille de 23 ans dans une fusillade à un des suspects (reconnu non coupable depuis).
L’info fut révélée le 22 février dernier, et le 23 février il délivrait la meilleure performance NCAA de l’année contre South Carolina avec 41 points et un game winner. L’ombre au tableau n’est pas rien, puisqu’après les déboires de Miles Bridges, les Hornets ajoutent un caractère qui va être épié et dont l’entourage sera constamment questionné.
LaMelo doit passer un cap
Le soir de la draft 2020, Charlotte accueillait la nouvelle figure de ses années à venir avec LaMelo Ball. Si des doutes importants subsistaient, notamment liés à la valeur du championnat australien où il a terminé sa formation, à son père et sans doute à son frère, moins impactant qu’espéré, il a vite rassuré son monde. Oui LaMelo est bel et bien un joueur différent, bardé de talent. Capable de remonter la balle avec vitesse et vista, à la manière d’un Jason Kidd. Capable de shooter derrière les écrans (37% à trois points en carrière), de driver… en bref : de mener une attaque.
Toutefois, les années passent et, petit à petit, colle à son style l’idée d’un jeu qui manque d’efficacité. Statistiquement, cela a plutôt tendance à se confirmer. Quand on regarde les données de CleaningTheGlass, il n’est dans les dix premiers percentiles d’aucune statistique offensive à son poste. Pire, il semble avoir perdu en efficacité avec le temps.
Sur le PSA, qui représente les points marqués par tirs tentés, il est passé des 44% les plus efficaces (relativement bas), au 41% les moins efficaces. Même constat sur l'”AST:Usg”, à savoir le ratio de passes décisives en comparaison de son usage de la balle, son ratio est en baisse. Sur le “TOV%”, qui indique le pourcentage de possessions qui se terminent par une balle perdue, la encore il est du mauvais coté de la balance.
Sur des statistiques qui traduisent la capacité de son équipe à mieux jouer quand il est sur le terrain comme le Net Rating, le constat n’est pas celui que l’on voudrait avoir. Comment se fait-il que sur les deux dernières années, il n’est jamais dans le top 3 du Net rating de son équipe ? (5e en 2021-2022 et 2022-2023).
A l’entame de sa quatrième saison, et avant de rentrer dans les années de son contrat max, le Californien doit passer un cap et s’affirmer comme un joueur qui fait progresser son équipe, notamment grâce à son efficacité.
Qu’est-ce qu’on veut voir cette saison ?
Vous l’aurez compris, beaucoup d’éléments portent à croire que les Hornets vont tout faire pour réaliser la meilleure saison possible, et ce statut d’équipe en reconstruction n’est peut-être pas adapté. OUI, les Hornets seront une équipe à regarder. Parce qu’encore plus que sous Borego, ils devraient courir et proposer du spectacle (Clifford a sensiblement accéléré la PACE – nombre de possessions jouées par rencontre – de son équipe à son arrivée, malgré les absences). OUI, les Hornets sont capables d’aller chercher un spot au Play-In si l’on se base sur leur bilan d’il y a deux ans.
Le ton de cette conclusion est clair : l’enthousiasme ! Car c’est avant tout ce que nous voulons voir cette saison à Charlotte.
En juillet 2024, il sera temps de faire le bilan de cette première phase du binôme coach/star autour duquel la front office construit. Il faudra donc que Clifford ait montré des capacités à engranger des victoires. Que LaMelo ait prouvé que son corps est plus endurant et son style plus efficace. Que la franchise sache quels sont les deux, trois, quatre joueurs sur lesquels elle peut s’appuyer pour les combats à venir.
Si les Hornets embarquent dans le wagon du play-in et répondent à ces questions, presque quelques soient les réponses, alors Mitch Kupchak pourra considérer que sa saison est réussie.
*Pourquoi regarder les trios plutôt que les duos ? Il est compliqué d’assurer la complémentarité d’un duo par les stats, tant les combinaisons peuvent être différentes. Nous privilégions les trio pour plus de représentativité. Cette lecture traduisant plus la facilité à entourer ces joueurs que leur efficacité individuelle (pour laquelle ne Net Rating parait plus pertinent).