A quelques semaines du début des Playoffs, la conférence Est semblait plus solide que jamais. Nos brackets mettaient en avant le succès à venir de certaines équipes et plusieurs d’entre-elles péroraient en tête au termes d’une saison régulière très aboutie;
5 des meilleurs net ratings de la saison régulière figuraient dans cette conférence, où seuls les Memphis Grizzlies, 3eme, venaient troubler l’ordre.
Les 2 meilleurs bilans de la saison (Boston et Milwaukee), paraissaient particulièrement solide, puisqu’on connaissait leur faculté d’être élite des deux côtés du terrain et qu’ils possédaient un historique assez rassurant quant à leur faculté à transposer leurs bonnes dispositions dans les affrontements de Playoffs.
Vous l’aurez compris, les Milwaukee Bucks et les Boston Celtics nous apparaissaient comme deux solides concurrents pour soulever le trophée Larry O’Brien à l’issue de ces Playoffs. Pourtant, assez rapidement, les certitudes se sont effondrées.
En parallèle, d’autres équipes nous semblaient bien armées pour faire de bons Playoffs, notamment les Denver Nuggets, Philadelphia Sixers ou les Cleveland Cavaliers.
Et puis, sans prévenir, comme ça, la conférence Est s’est brisée.
A tel point qu’Azad et moi-même, qui possédions des avis et perspectives différentes sur ces séries, vous proposons un bilan sur 4 des échecs les plus cinglants de cette conférence : Milwaukee, Boston, Philadelphie et Cleveland, sous forme de retours sur la série et avis personnels.
Et sans plus tarder, je vous propose de découvrir la partie 1, sur les challengers.
Les Cleveland Cavaliers, victimes de leur succès ?
Jérémy :
Lorsque nous avons discuté cet article, je ne tenais pas tant à parler longuement des Cavaliers.
Lorsque nous faisions la preview live de la série, j’avais discuté de plusieurs éléments inquiétants selon moi. Les Cavaliers n’étaient pas juste une jeune équipe, c’était surtout une équipe incomplète. Leur excellente saison régulière et leur net rating (+5,6, 2eme derrière Boston) très séduisant avaient de quoi faire d’eux une équipe sur laquelle compter. Mais cela n’enlevait en rien la multitude de limites que possédait ce groupe.
Parmi les principales : seulement 4 joueurs dans l’effectif représentaient une option certaine, le trou sur le poste d’ailier, le banc très peu fonctionnel, Caris LeVert comme principale source de scoring en sortie de banc et un coach qu’on ne peut estimer comme dans les top tiers de la ligue.
En somme, Cleveland m’apparaissait comme le parfait candidat à un échec au premier tour, face à un adversaire qui avait été les Cavaliers en 2021, après une saison régulière de haut vol.
Bien sûr, l’échec de Cleveland à se mettre au niveau en termes d’intensité, de bataille au rebond, les difficultés de Darius Garland à maintenir son niveau de saison régulière ou la performance en demi-teinte de leur fameuse raquette pourront être perçus comme des déceptions. La vérité, je pense, c’est que cette équipe a beaucoup abandonné pour faire venir Donovan Mitchell. Et, ce faisant, elle a acquis une première option offensive, mais a creusé dans la profondeur de son effectif.
Cette campagne nous a définitivement prouvé qu’il faut un groupe dense et riche en options pour maximiser ses chances d’aller au bout. Reste que 1-4 en faveur des Knicks, c’est trop avec l’avantage du terrain;
Azad :
Arrivé au début des Playoffs, je voyais les Cavaliers être l’équipe qui allait embêter les Bucks sur leur chemin vers les Finales de Conférence. J’avais tort, et j’ai compris pourquoi. J’ai compris pourquoi je les voyais aussi forts et pourquoi je m’étais trompé. Pour rappel, car ça parait dater d’une éternité, les Cleveland Cavaliers n’ont gagné qu’un seul match sur leur campagne de Playoffs. Mais alors, pourquoi les voyais-je si fort ?
Premièrement, statistiquement. La saison régulière est souvent un bon indicateur des futures performances en Playoffs. Attention, toutes les statistiques de saison régulière ne sont pas à prendre en compte pour anticiper le succès d’une équipe en Playoffs. Mais, l’histoire a montré que certaines de ces statistiques sont des indices quant au futur succès en Playoffs. Premier indice de réussite, le fait d’être Top 10 en attaque et en défense. Les champions NBA se trouvent normalement dans cette zone. Cette saison, seuls Philadelphie, Boston et Cleveland étaient top 10 en attaque et en défense. Que des équipes citées dans cet article…
Pour anticiper la réussite ou non d’une équipe en Playoffs, on va aussi regarder le SRS. Le Simple Rating System est un score proposé par basketball-reference.com. A titre informatif, le leader du SRS a été 33 fois champion de la ligue (54%). Ce score est souvent utilisé pour être mis en comparaison avec le bilan de l’équipe et voir si elle est en sous régime, ou en sur régime. Maintenant, devinez les quatre équipes qui avaient le meilleur score de SRS cette saison ? Vous allez rire. Ou pas. Il s’agit donc de Boston, Cleveland, Philadelphie et Milwaukee.
Le dernier élément qui m’a amené à penser que Cleveland pouvait aller loin en Playoffs est la présence de Darius Garland, Donovan Mitchell et Evan Mobley. Les deux premiers sont deux moteurs offensifs qui assuraient, selon moi, un plancher suffisant pour l’attaque des Cavs. Le dernier permettait, selon moi, de construire une défense solide et polyvalente, soit avec deux intérieurs, soit en jouant petit. Tout ça m’a amené à imaginer une Finale de Conférence à l’Est entre Boston et Cleveland, comme en 2010. Mais, dans mon analyse, j’avais omis des aspects de cette équipe, qui n’ont pas pardonné.
“The chain is only as strong as its weakest link”
― Thomas Reid, Essays on the Intellectual Powers of Man
Cette citation résume en une phrase le problème majeur qui a conduit à l’échec des Cleveland Cavaliers lors de ces Playoffs. À côté du quatuor Garland, Mitchell, Mobley et Jarrett Allen, le poste d’ailier a été une de causes de la déroute des Cavs. La question autour du dernier joueur du cinq de départ soulevait deux problématiques. Une problématique défensive tout d’abord. En effet, ni Garland, ni Mitchell n’étaient en capacité d’assurer la match-up sur Jalen Brunson. De ce fait, mettre Isaac Okoro comme poste 3 répondait à cette problématique défensive.
Vient alors la problématique offensive. La défense des Knicks a choisi de totalement ignorer Okoro défensivement, et les Cavs se retrouvaient à attaquer à quatre contre cinq. Ce n’est pas optimal, surtout face à une équipe coachée par Thibodeau. Alors, pour répondre à cette problématique, J.B. Bickerstaff a essayé Cedi Osman et Caris LeVert. Le premier apportait une solution offensive mais est devenu une cible pour Brunson, le dernier est trop irrégulier pour avoir un impact positif sur le collectif.
L’incapacité à répondre à ces problématiques soulève donc une autre question, celle du coaching. Prenons l’exemple du rebond offensif, qui a été une des armes offensives majeures de New-York. Le coaching staff des Knicks a utilisé des schémas pour impliquer les arrières dans la bataille au rebond, et les Cavs avaient l’effectif pour répondre au défi physique imposé par les Knicks. Mais c’est le côté tactique qui a pêché. Est-ce-qu’il a manqué au Cavaliers une certaine profondeur d’effectif ? Est-ce-que le coaching staff est à la hauteur des attentes ? Des questions auxquelles le Front Office des Cavs va devoir trouver des réponses.
Les 76ers, une impression de déjà-vu
Jérémy :
Les Sixers sont arrivés dans ces Playoffs avec le statut de principal challenger derrière la paire Milwaukee – Boston. En tout cas, dans mon esprit.
Nouveau rappel que le contenu d’une série, surtout au premier tour, compte plus que son résultat : Philly a certes vaincu par 4-0, mais ils m’ont paru bien peu convaincants. Certes, les Nets n’avaient que leur défense et ont donc crânement joué leur chance en donnant tout de ce côté du terrain. Toutefois, la performance de Joël Embiid m’inquiétait fortement.
Face à Brooklyn dont le principal créateur s’appelait Spencer Dinwiddie, sa réaction aux prises à 2, voire à 3 de Brooklyn était suffisante pour vaincre. Mais la même prestation face à une meilleure attaque ? Elle pourrait être franchement trop insuffisante pour prévaloir.
Opposés ensuite à une équipe de Boston qui paraissait favorite, mais dont la fragilité inquiétait également, les Sixers ont failli tirer leur épingle du jeu. 2 performances insolentes d’Harden permettent de faire la différence 2 fois. Leur performance dans le Game 5 est probablement la plus aboutie de leur saison.
Puis ils chutent, 2 fois, dont un terrible naufrage dans le Game 7. La défense de Boston sur Embiid avec un personnel plus grand et costaud, soutenu par une meilleure attaque a fait imploser la machine, sans même particulièrement forcer. Embiid est trop lent à lire ce qu’il se passe, trop lent à lâcher la balle et James Harden, qui a eu des bas aussi profonds que ses hauts ont été radieux, périclite complètement.
Nouvelle défaite qui est peut être encore plus décevante que les précédentes, car ces Celtics ont cruellement manqué de liant et de régularité toute cette campagne. Philly avait la place de vaincre, sans même être particulièrement bon.
Azad :
Les indicateurs statistiques mentionnés pour les Bucks, les Cavs et les Celtics étaient aussi au vert pour les Sixers. De plus, l’effectif semblait aussi parfait pour optimiser Joël Embiid. P.J. Tucker, Tobias Harris et DeAnthony Melton proposaient de super profils pour donner du spacing à Embiid en attaque, et s’occuper des ailiers en défense.
En plus de ça, Jojo pouvait profiter de la présence de deux ball handlers de qualité avec James Harden et Tyrese Maxey. Le pick and roll Harden Embiid avait fait des ravages en saison régulière. Pour couronner le tout, la défense de Phily semblait avoir trouvé son équilibre. Des flashs d’une défense élite et polyvalente avaient été aperçus lors du match de Denver à Philadelphie.
Les Philadelphia Sixers arrivaient donc en Playoffs avec le plein de confiance, et des certitudes. Des certitudes qui s’étaient vues confirmées suite au sweep de Brooklyn. Mais alors, qu’est-ce-qui a bien pu arriver aux Sixers ? Et bien, la même chose qu’en 2018, et qu’en 2020. Les Boston Celtics.
Pour la 22e fois de leur histoire, les Sixers ont fait face aux Celtics en Playoffs. Et pour la troisième fois en six saisons, ils ont perdu contre les hommes de Boston. Les raisons de cet échec sont en majorité à chercher dans la défense des Celtics, en particulier sur les deux derniers matchs de la série. On avait mis le collectif en avant dans l’article publié au lendemain du Game 7, mais la domination d’Al Horford face à Embiid a encore été remarquable. Sur 212 possessions où Embiid était défendu par Horford, il a perdu 10 ballons, s’est fait contrer huit fois, et a tiré à 39% sur 80 tentatives.
Bien qu’on puisse montrer du doigt Embiid et son leadership, il n’est pas le seul coupable. Il faut aussi consigner sur le rapport d’autopsie la disparition de l’agressivité d’Harden au fur et à mesure que la série avançait, l’absence d’ajustement tactique face à ceux des Celtics et l’incapacité d’un joueur au contrat max (hello Tobias!) à avoir un impact sur un match de Playoffs. Au final, rien de bien nouveau sous le soleil de Pennsylvanie.
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Pendant que le Miami Heat surprend son monde en retrouvant son basket au meilleur moment, plusieurs équipes de l’Est ont terminé leur saison avec beaucoup d’interrogations quant à leur avenir. La valse des coachs qui a plus que bien commencé depuis la fin de saison a vu beaucoup de visages marquants être éjectés de leurs sièges.
Ce fut évidemment le cas des Sixers qui ont mis fin à l’ère Doc Rivers en le remplaçant très rapidement par un des meilleurs stratèges de ces dernières saisons : Nick Nurse. L’été reste pour autant chargé pour Philly qui doit gérer le cas de James Harden qui semble avoir remis un pied à Houston. La période s’annonce donc critique pour les futurs hommes de Nurse.
Les Cleveland Cavaliers ont eux annoncé jouer la carte de la stabilité dès la fin de saison. Si la nouvelle côté coaching n’enchante pas les fans, elle peut faire sens à ce stade, tant les axes d’améliorations côté effectif semblent clairs. L’équipe a besoin de gagner en profondeur et de statuer sur le poste d’ailier.
L’intersaison s’annonce riche.