Les playoffs battent leur plein et tous les sites sont plongés dans les preview de chaque nouveau tour. La preview, c’est l’art de se projeter, d’imaginer ce qu’une série entre deux franchises peut nous réserver, avec plus ou moins de pertinence. Au sein de deux articles, nous vous proposons de prendre l’exercice par le prisme inverse ; au lieu d’entrer dans l’uchronie chère à notre Valentin national, faisons le bilan de la saison des 14 franchises qui sont en vacances depuis le 9 avril au soir. Pour utiliser un autre anglicisme, il s’agit plutôt d’une postview : on a vu, nous pouvons donc tirer des conclusions.
Dans le premier article, nous avons pris le parti d’évoquer les équipes qui ont surpris au cours des 82 rencontres régulières. Pour mettre le rédacteur de meilleure humeur en ce dimanche après-midi grisâtre, il est préférable d’écrire sur certaines darlings de la saison, au lieu de rédiger – au hasard – sur les Mavericks, les Wizards ou les Trailblazers (spoilers !).
Après une méditation et un coup de fil qui a bien duré 7 minutes, nous avons considéré que 5 équipes peuvent tirer un bilan positif de leur saison régulière, malgré le fait d’avoir raté le wagon pour les playoffs. Pour 4 d’entre elles, le constat était unanime. Pour la dernière, il s’agit surtout d’un parti-pris, qui pourrait parfaitement être critiqué. Mais trêve d’introduction, entrons désormais dans le vif du sujet !
New Orleans Pelicans
Pourquoi parler des Pelicans dans cet article consacré aux belles histoires de la saison ? Il est vrai que nombreux sont ceux qui voyaient les Louisianais se hisser en playoffs, parfois même sans passer par la case play-in tournament. Il est tout aussi juste de faire remarquer qu’entre le 16 janvier et le 2 février, sur une période de 10 rencontres, New Orleans n’en a pas gagné un seul. Pour disputer les rencontres décisives du printemps, on concèdera que ce n’est pas le plus pratique.
Mais il y a un mais. Le biais de récence – qui fait que l’on se souvient plus naturellement des 30 derniers matchs que des 30 premiers – ne doit pas faire oublier que NOLA avait entamé sa saison de la plus belle des manières. Avec un 5 majeur composé de CJ McCollum, Herbert Jones, Brandon Ingram, Zion Williamson et Jonas Valanciunas, l’équipe dirigée par Willie Green a passé Thanksgiving bien au chaud sur le podium de la conférence Ouest. Au 11 décembre dernier, alors que le roster était globalement au complet, l’équipe présentait un solide bilan collectif de 18 victoires pour 8 défaites. S’en est suivi un span de 4 défaites consécutives (Utah 2x, Phoenix, Milwaukee)… puis le drame.
Le drame en question, c’est évidemment la énième blessure du franchise player, Zion Williamson. Le numéro 1 de la draft 2019 est un habitué de l’infirmerie, lui qui n’a disputé que 114 rencontres en 4 saisons (24, 61, 0, 29). Lorsqu’il est physiquement apte, il est un rouleau compresseur que personne ne parvient vraiment à contenir dans la raquette. Il est également un playmaker très capable, auquel on peut confier la gonfle sans cauchemarder. Sur ses 29 rencontres, Zion a, encore une fois, affiché les statistiques d’un prétendant au MVP : 26 points (61 % au tir, dont 37 % de loin), 7 rebonds, 4,6 passes décisives, 1 interception, 0,6 contre. Dans son sillage, Brandon Ingram et McCollum se comportaient comme les lieutenants de luxe qu’ils sont.
Sauf que Williamson s’est blessé. Comble du malheur, Ingram a également manqué une petite trentaine de rencontres, au même moment. Green a donc dû composer avec l’absence conjuguée de ses deux meilleurs joueurs, qui ont été remplacées dans la rotation par Trey Murphy III et Naji Marshall. Ce n’est d’ailleurs pas une pique déguisée envers les deux jeunes joueurs. Murphy troisième du nom a endossé le rôle de titulaire avec beaucoup de brio et de qualités et a démontré qu’il avait les épaules pour être un acteur majeur d’une franchise ambitieuse. Son développement constitue d’ailleurs une réelle source de satisfaction pour la franchise, qui n’aura donc pas tout perdu dans cette saison presque noire.
En réalité, sous réserve de la santé de ses cadres, New Orleans pourra attaquer la saison à venir avec beaucoup d’espoirs. C’est en cela que, dans un certain sens, l’exercice passé demeure positif. Nous avons vu qu’au complet, les Pelicans pouvaient jouer dans la cours des grands, en venant à bout des Nets, Mavericks, Clippers, Grizzlies, Nuggets, Suns (x2) ou 76ers. Et même lorsque tout partait à vau-l’eau, le temps de jeu donné aux jeunes (Murphy III, Marshall, Daniels, Alvarado, Jones) était globalement satisfaisant.
De la même manière, New Orleans a achevé ses 82 rencontres régulières avec le 6ème defensive rating de la Ligue (112,5). C’est de l’autre côté du terrain que de véritables difficultés ont été rencontrées. Cependant, la racine du mal est aisément identifiable, puisqu’elle réside surtout dans les absences de Williamson et d’Ingram. Pour soigner les maux de l’équipe, il faut donc soigner les corps. Si tel est le cas, le Pélican sera dangereux l’an prochain. Pour le suspens d’une conférence Ouest toujours aussi intrigante, ce sera génial.
Indiana Pacers
Lorsqu’il était question de pointer du doigt le souffre-douleur tout désigné de la conférence Est, les regards se sont unanimement (ou presque) tournés vers les Pacers d’Indiana. Le front-office avait décidé à la trade-deadline 2022 d’exploser un roster qui semblait avoir atteint son plafond de verre. Domantas Sabonis a été envoyé dans la capitale Californienne, en échange de Tyrese Haliburton et Buddy Hield. Sur le papier, il s’agissait de la première année d’une reconstruction qui possédait peut-être déjà son joueur principal. Ca aurait été bien mieux que cela.
Nous pouvons d’ailleurs opérer un parallèle entre l’exercice des Pacers et celui des Pelicans. La trajectoire collective a été globalement identique, avec un début de saison étonnant et une degringolada. Les promesses se sont ainsi concentrées sur la première moitié de la saison, au cours de laquelle la franchise à qui l’enfer était promis se bagarrait avec vaillance pour gratter sa place en playoffs.
À nouveau, ce sont les blessures qui sont venues mettre du plomb dans les ailes des hommes de Rick Carlisle. Au complet, Indiana a su montrer les muscles. Haliburton, responsabilisé à la hauteur de son talent malgré un usage % relativement faible (23,8 %) a étrenné sa première étoile d’All-star et a terminé sa saison en double-double (20,7 points, 10,4 passes décisives, à 49 % au tir et 40 % de loin). À ses côtés, Bennedict Mathurin a entamé sa saison rookie avec les deux pieds dans le phare, avec une insolence totale au tir jusqu’à la fin du mois de novembre (20 matchs, environ, pour 19 points, 4 rebonds, 1,5 passe décisives, 44 % au tir et 42 % de loin sur 5,8 tentatives de moyenne). S’il a ensuite pris une sorte de rookie wall, l’ailier passé par l’université d’Arizona a dépassé les attentes qui étaient placées en lui lors de sa draft. Il a d’ailleurs terminé 4ème de la course au rookie de l’année.
La jeunesse Indanienne (le gentilé n’est pas terrible, nous sommes d’accord) n’est pour autant pas composée que de ces deux joueurs. Andrew Nembhard, passé par Gonzaga et sélectionné en 31ème position de la draft 2022 a également réalisé un premier exercice de belle facture, dans un rôle de combo guard. Aaron Nesmith et Jalen Smith et Isaiah Jackson ont obtenu des responsabilités inédites, tandis que Chris Duarte, souvent blessé, a globalement déçu.
Le young core existe déjà et, à l’inverse de certaines autres franchises, a su démontrer qu’il était capable de tenir la dragée haute à certaines équipes bien plus armées sur le papier. Avant qu’Haliburton ne se blesse pour la première fois (11 janvier 2023), les Pacers possédaient encore un bilan positif de 23 victoires pour 18 défaites et occupaient la 8ème position de l’Est. Sans son chef d’orchestre, la franchise a plongé dans les abysses de la Ligue, en s’inclinant à 17 reprises sur les 20 rencontres suivantes.
Au-delà de ces jeunes gens prometteurs, Buddy Hield a fait ce qu’il savait faire de mieux, à savoir planter des paniers primés, tandis que Myles Turner, dont le rôle s’est accru avec le départ de Sabonis, a probablement réalisé la meilleure saison de sa carrière (62 matchs disputés, 18 points à 55 % au tir et 37 % de loin, 7,5 rebonds, 1,5 passe décisives, 2,3 contres). Ils constituent tous les deux une possible monnaie d’échange pour les front-office à la recherche d’un renfort à un prix correct (les contrats sont dégressifs, autour de 20M la saison, mais le salary cap va augmenter).
Indiana termine sa saison à la 11ème place de l’Est et 35 victoires, en confiant les clés du kamtar à la jeunesse pour les 15 dernières rencontres, lorsque les espoirs de playoffs étaient définitivement enterrés. Avec un peu de bol, la lottery sourira à Kevin Pritchard, afin d’ajouter un dernier jeune à potentiel dans une équipe qui en est d’ores et déjà bien fournie. L’an I du projet était prometteur. Il est probable que l’explosion se fasse attendre encore un peu. Les Pacers ne sont pas pressés et le moyen terme est plein de promesses. Et ça, c’est déjà une belle surprise.
Utah Jazz
Niveau victime expiatoire toute désignée, le Jazz d’Utah se positionnait également là en amont de la saison 2022-23. Il faut dire qu’au cours de l’intersaison, Danny Ainge a fait voler l’effectif mormon en éclats, en envoyant Rudy Gobert à Minnesota et Donovan Mitchell à Cleveland. En échange, le Jazz a obtenu un nombre difficilement calculable d’assets. Certaines d’entre elles n’allaient pas tarder à se montrer déterminantes dans la saison étonnante de l’équipe dirigée par Will Hardy.
À l’instar de ce que nous avons pu évoquer pour les cas de New Orleans et Indiana, la saison d’Utah peut se diviser en deux parties presque diamétralement opposées. L’unique différence, c’est que la facette sombre de l’exercice a cette fois-ci été provoquée et non subie. En début de saison, le starting five était composé de Mike Conley, Jordan Clarkson, Lauri Markkanen, Jarred Vanderbilt et Kelly Olynyk. En fin de saison, par la force des choses, l’identité et le prestige théorique des titulaires avaient bien changé : Talen Horton-Tucker, Ochai Agbaji, Lauri Markkanen, Kelly Olynyk, Walker Kessler.
Que s’est-il passé ? La peste noire a-t-elle repris du service de manière géolocalisée ? Absolument pas. Le coupable de ce grand chambardement dans l’effectif est le même : Danny Ainge. L’ancien boss des Celtics a profité de la trade deadline pour mettre un coup définitif aux ambitions de l’équipe tout en tâchant de lui confectionner un avenir radieux.
Des ambitions, l’équipe n’en nourrissait pas au mois d’octobre. Force a pourtant été de constater qu’après 13 rencontres, le Jazz caracolait tout bonnement en tête de sa conférence. Pour une franchise qui visait normalement Victor Wembanyama, cela a eut le don de surprendre. À la trade deadline, au début du mois de février, Utah pouvait encore rêver de playoffs, avec un bilan de 27 victoires pour 28 défaites.
Le principal responsable de ce début de saison convaincant se nomme Lauri Markkanen. Passé par Chicago et Cleveland, le finlandais a souvent peiné à répondre aux attentes qui étaient placées en lui. Pourtant, son potentiel était indéniable et avait éclaboussé les compétitions internationales. Responsabilisé comme jamais auparavant par Hardy (26,6 % d’usage), l’ailier a réalisé une saison d’une régularité remarquable (66 matchs joués, un record pour lui). S’il a connu quelques trou d’air, comme ce 3 / 22 au tir dans une victoire face à Charlotte (13 points tout de même, son plus faible total de la saison), Markkanen a également affolé les compteurs, en claquant 49 points sur la tête des Rockets au début de l’année civile. All-star incontesté et nommé meilleure progression de l’exercice, il est l’un des deux joueurs déclarés totalement intransférables par son management. Il ne faut en effet pas omettre de préciser que le finlandais n’a pas encore soufflé sa 26ème bougie et que son prime est encore devant lui.
Le second bonhomme intouchable de l’effectif est le tout jeune Walker Kessler. Drafté en 2022 en sortie d’Auburn (22ème pick), le pivot aux belles dimensions (2m16, 111 kilos) a été une immense satisfaction. Présenté comme un défenseur solide malgré des capacités physiques limitées, il s’est imposé comme un protecteur de cercle dissuasif, un rebondeur féroce et un attaquant capable. Sur 36 minutes, le rookie (3ème au ROY) affiche 14,5 points (72 % de réussite, mais seulement 51,6 % aux lancers), 13 rebonds et 3,7 contres de moyenne ! Son total de 2,3 contres de moyenne (il avait 23 minutes de temps de jeu) est presque inédit au 21ème siècle, car seuls Joël Embiid et Mitchell Robinson ont au moins atteint la marque. Nouvelle coqueluche des fans, il a presque su faire oublier que son poste était jusqu’alors occupé par un triple DPOY de la Ligue.
Ajoutez à ce tableau les belles saisons de Jordan Clarkson (devenu titulaire), Kelly Olynyk, Collin Sexton (souvent blessé) et les promesses affichées par l’autre rookie, Ochai Agbaji, et vous obtenez une équipe qui a peut-être été un peu en surrégime, mais qui est surtout très en avance sur son projet de reconstruction.
Pour autant, Utah a complètement lâché sa saison à compter de la trade deadline, avec les transferts de Conley et Alexander-Walker à Minnesota et Vanderbilt et Beasley à Los Angeles. L’objectif était clairement d’obtenir le meilleur choix possible à la lottery du 16 mai prochain. Le Jazz a ainsi hypothéqué sa compétitivité à court terme, ce que sa fin de saison traduit nettement. Les résultats ne sont pourtant pas honteux (10 victoires, 16 défaites après la deadline) et il y a fort à parier que le Jazz aurait crânement joué sa chance pour une qualification au play-in tournament si son effectif n’avait pas subi un tel chambardement.
Promis au 1st pick de la draft 2023, Utah a finalement remporté 37 victoires et a terminé sa saison en 12ème position de la conférence Ouest, à 3 victoires de la 10ème place. La franchise a surtout démontré que son processus de reconstruction était déjà très bien engagé, avec un All-star et des jeunes à promesses. Il ne lui manque finalement qu’un véritable meneur gestionnaire et un renfort sur le poste 4. Les 150 picks accumulés récemment par Danny Ainge, qui pourront être utilisés à la draft ou dans le cadre d’un trade, pourront certainement aider dans cette quête.
Orlando Magic
34 victoires, 48 défaites et des jeunes dans tous les azimuts. Voilà pour la saison du Magic d’Orlando, 13ème de la conférence Est. La présenter comme cela, c’est cependant occulter toutes les belles choses que les Orlandois (gentilé par top non plus, d’ailleurs) ont montré une fois le mois de novembre achevé. Parce qu’effectivement, pour jouer quelque chose que la prochaine draft, débuter sa saison avec 5 victoires pour 20 défaites, ce n’est peut-être pas l’idéal. La terminer avec 29 victoires pour 28 défaites, c’est a contrario prometteur.
Difficile de faire plus jeune que le roster de Jamahl Mosley. Parmi les 9 joueurs qui ont disputé a minima 50 rencontres, le plus âgé est Mo Wagner, du haut de ses 25 ans (57 rencontres). Les autres ? Franz Wagner (21 ans, 80 matchs), Paolo Banchero (20 ans, 72 matchs), Bol Bol (23 ans, 70 matchs), Markelle Fultz (24 ans, 60 matchs), Cole Anthony (22 ans, 60 matchs), Wendell Carter Jr (23 ans, 57 matchs), Jalen Suggs (51 ans, 53 matchs) et Caleb Houstan (20 ans, 51 matchs). Ces 9 joueurs pèsent en cumulé 1 382 matchs de saison régulière en carrière… soit 39 de moins que le seul LeBron James.
Et encore, la franchise a entamé sa saison avec Mo Bamba (depuis transféré aux Lakers, 24 ans) et possède également dans ses rangs Chuma Okeke (24 ans), R.J. Hampton (21 ans), Goga Bitadze (23 ans) ou Jonathan Isaac (25 ans).
Quels sont les points positifs de cette exercice du côté de Disneyland ? Individuellement parlant, la franchise s’est peut-être trouvée un véritable franchise player. Nommé rookie de l’année à la quasi-unanimité, Paolo Banchero a achevé sa première saison avec des statistiques rarement perçues depuis 1946 : 20 points (42,7 % au tir, dont 29,8 % de loin et 74 % aux lancers), 6,9 rebonds et 3,7 passes décisives. Parmi tous les rookies de l’Histoire, on en retrouve 7 autres avec de telles stats : Elgin Baylor, Oscar Robertson, Kareem Abdul-Jabbar, Sidney Wicks, Larry Bird, Blake Griffin et Luka Doncic. Que des stars à leur époque, en somme.
Si les pourcentages au tir peuvent questionner, rappelons que Banchero a été ciblé dès le jour 1 par les défenses adverses comme étant la menace première du Magic. Il a donc subi un traitement rare pour un rookie. Pourtant, la gonfle lui a été confiée toute la saison, en alternance avec Franz Wagner et Markell Fultz. L’intérieur, très costaud, a ainsi démontré qu’il était un ball-handler capable : 27,6 % d’usage % pour un taux de perte de balle de 12,8 %. Dans ce domaine, c’est sensiblement similaire, par exemple, à l’exercice rookie de Michael Jordan.
Faire de Banchero le franchise player de l’effectif est somme toute logique. Le joueur a affiché le talent digne de sa place de n° 1 de la dernière draft. Certains de ses lieutenants ont également réalisé une saison de haute volée, à commencer par le plus jeune des frères Wagner, Franz. L’ailier allemand a globalement tout fait mieux lors de cette seconde saison que l’année passée. Toujours présent – ou presque – il termine sa saison avec 18,6 points (+3,4), à 48,5 % au tir (+2) et 36 % de loin (+0,7), alors même que sa part de tirs assistés a diminué. Le bonhomme sait se créer l’espace nécessaire pour tirer et le poignet est sûr. Second ball-handler de l’équipe, son taux d’usage de la gonfle a légèrement augmenté, comme celui de passes décisives. En une phrase comme en mille, l’exercice sophomore de Franz Wagner a été excellent.
S’il en est un qui a changé la face collective de son équipe, c’est bel et bien Markelle Fultz. Le meneur, éternel blessé depuis sa sélection en première position de la draft 2017 (14, 19, 72, 8, 18 et 60 matchs joués par saison), a manqué les 21 premières rencontres de la saison, alors que le navire était quasiment à l’abandon. Il a ensuite disputé 60 des 61 dernières, ce qui est absolument inédit pour lui. Surtout, si l’on veut bien évincer de l’équation les 3 dernières rencontres, au cours desquelles l’objectif n’était clairement pas de gagner, Fultz a remporté 50,8 % des matchs auxquels il a pris part. Dans une équipe qui n’a remporté que 41,4 % de ses rencontres, c’est substantiel. Malgré un tir lointain toujours faiblard (31 %, meilleur pourcentage en carrière), Fultz affiche 51,4 % de réussite au tir. C’est que le meneur agresse le cercle avec une réussite certaine, sans pour autant créer un embouteillage dans la raquette. Si sa santé le laisse enfin tranquille, il sera le meneur titulaire de la franchise pour de nombreuses années.
La santé, ce sera le nerf de la guerre que le Magic s’apprête à mener pour retrouver le sommet de la conférence Est. Jonathan Isaac a très rapidement et gravement rechuté, alors qu’il n’avait plus disputé une rencontre depuis le paléolithique. Jalen Suggs a une cheville qui grince et s’est fait opéré tandis que Wendell Carter Jr a connu des soucis aux pieds et du côté gauche de la hanche. Avec un roster en pleine possession de ses moyens, Orlando se serait certainement invité dans la course au play-in, chose inespérée en octobre 2022. Hormis ces problèmes d’infirmerie, tout a été très positif et l’avenir peut être envisagé sereinement en Floride, d’autant plus qu’Orlando est, pour l’heure et théoriquement, titulaire du 6ème pick de la draft 2023, dont la cuvée est semble-t-il prometteuse.
Oklahoma City Thunder
La plus grosse surprise de la saison ? Cela peut se défendre. À l’inverse des franchises dont nous avons parlé jusqu’alors (hormis NOLA, qui est une sorte d’OVNI dans cet article), le Thunder d’Oklahoma s’est montré compétitif tout au long de la saison, au point d’accrocher une place (inattendue ?) au play-in, au cours duquel il s’est incliné face aux Lakers.
Dire qu’au mois de septembre, la fanbase NBA française se divisait sur Twitter pour déterminer qui du Thunder ou des Rockets avait le meilleur core de jeunes ! Dire que certains ont été choqués lorsque d’autres estimaient Shai Gilgeous-Alexander comme étant plus fort que Jalen Green ! Gageons que nous nous abstiendrons de ces débats lors de la prochaine intersaison, car Oklahoma et son franchise player ont (re)mis les points sur les “i”, les barres sur les “t” et l’église au milieu du village.
40 victoires, 42 défaites, une 10ème à l’Ouest devant quelques franchises plus ambitieuses sur le papier (Dallas, Portland) et une pépinière de garçons nés entre 1998 et 2003. Et dire que le second choix de la draft 2022, Chet Holmgren, qui aurait dû apporter son talent défensif dans une raquette qui en avait bien besoin, n’a pas disputé la moindre seconde ! Le jeune homme, qui a fêté ses 21 ans le 1er mai, sera donc rookie l’an prochain, en espérant qu’il soit bien remis de sa blessure au pied contractée lors de la pré-saison dernière.
Sans Holmgren, OKC a entamé sa saison timidement, avec 11 victoires pour 18 défaites à la mi-décembre. Shai Gilgeous-Alexander évoluait pourtant déjà au niveau individuel attendu d’un MVP, lui qui peut clairement prétendre à une place dans la All-NBA 1st team qui sera prochainement annoncée. On savait que SGA était fort. Pourtant, même les fans les plus obstinés ignoraient certainement qu’il était en mesure de passer le cap qui le séparait des superstars de cette Ligue dès cette année. L’enfant de Toronto n’a pas fait dans la dentelle : 68 matchs, 31,4 points (51 % au tir, 34,5 % de loin, 90,5 % aux lancers), 4,8 rebonds, 5,5 passes décisives, 1,6 interception, 1 contre, un statut de All-star incontestable et certainement une belle place dans la course au MVP. Le voici très probablement parmi les 15 meilleurs joueurs d’une NBA qui ne manque pourtant pas de talent.
Derrière lui, le Thunder ne manque pas de soldats. Bien qu’encore âgé de 20 ans, Josh Giddey a montré des progrès certains dans la création pour soi et pour les autres. L’australien, joueur all-around par excellence, a fait son trou dans la Ligue après une première saison prometteuse. Jalen Williams, second derrière Banchero au ROY, a quant à lui épaté par sa maturité des deux côtés du terrain, alors même qu’il évoluait parfois à des postes “plus grands” que lui. L’enfant de Santa Clara, vanté pour ses capacités offensives à la sortie de l’université, sait en effet déjà utiliser ses bras anacondesques (1m98 mais 2m18 d’envergure !) pour défendre sans trop broncher les ailiers adverses.
Il serait trop long pour faire une liste exhaustive et détaillée de toutes ces jeunes pousses qui ont montré de belles choses au cours des 83 derniers matchs. Pêle-mêle, Tre Mann, Isaiah Joe ou Jaylin Williams ont tous démontré qu’ils ont leur place dans un roster NBA. Mention spéciale à ce dernier, intérieur au temps de jeu réduit (18 minutes / match) mais dont les capacités et le courage défensif ont su enthousiasmer la fanbase du Thunder (notamment sur les passages en force provoqués !).
Nous ne l’avons pas fait pour les franchises précédentes, mais il nous paraît impératif ici de mettre en avant le travail effectué par Mark Daigneault et son coaching staff. Malgré un roster juvénile et dont le développement prendra encore quelques années, l’entraîneur a su mener son équipe dans le top 15 des ratings offensif et défensif (13 et 14ème), en jouant sur un tempo élevé et en tordant le cou à ceux qui estiment que le tir à trois-points doit être utilisé à outrance, malgré une réussite douteuse proche du cercle (30ème au cercle, 29ème lorsque le tir est pris entre 1 et 3 mètres du panier).
Comparé aux autres franchises en développement, le Thunder possède un avance collective difficilement contestable. C’est également la seule franchise pour laquelle on peut affirmer sans sourciller qu’elle possède un homme capable de l’emmener aux sommets. À l’instar du Jazz de Danny Ainge, le Thunder de Sam Presti dispose d’une brouettes remplis de picks sur les 18 années à venir. Il ne semble pourtant pas totalement pertinent de continuer à empiler les rookies. Ces choix de drafts pourront servir à attirer dans l’Oklahoma une seconde star qui permettra à l’équipe de franchir un nouveau pallier.
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Chaque saison connaît son lot de surprises positives. Le plus dur – comme les chanteurs dont le premier album a cartonné, finalement – est bien évidemment de confirmer par la suite. New Orleans et Oklahoma peuvent prétendre à (bien) mieux dès l’an prochain. Pour Indiana, Utah et Orlando, le processus promet d’être plus long. Néanmoins, le péril est loin de la demeure et ces trois franchises doivent avant tout viser un retour à la compétitivité à moyen terme. Ce sera leur album de la maturité, en somme.