Racontons quelque peu les coulisses de QiBasket, sans pour autant entrer dans le secret des Dieux. Le patron insiste depuis fort longtemps pour que nous écrivions plus d’articles sur l’actualité de la Ligue. Autant vous dire qu’au-delà de mes compétences (très) réduites en la matière, ce n’est clairement pas ce qui m’intéresse le plus. Moyennant une augmentation salariale que je n’ai évidemment pas obtenue, j’ai cédé aux sirènes de ses supplications en juillet dernier, en écrivant un article sur la situation… des Dallas Mavericks.
Était-ce vraiment une bonne idée ? Je n’ai pas la réponse à cette question. Toujours est-il que cet article du 6 juillet 2022 constitue une sorte de preview de la preview. Laissez-moi tout de même vous proposer un nouvel article sur la meilleure franchise texane.
Dallas a été, en 2021-22, l’une des darlings de la Ligue. Si le management de l’équipe fait absolument tout son possible pour donner une image détestable de l’institution, ce que les membres de l’équipe ne manquent pas de me rappeler tous les quatre jours dans ce qui pourrait se rapprocher d’une certaine forme de harcèlement moral, la réalité du parquet a été bien enthousiasmante. Avec un effectif pas spécialement impressionnant, les bleus ont, comme à leur habitude désormais, commencé la saison sur un rythme sinusoïdal. Ainsi, au 29 décembre 2021, après 34 rencontres disputées, les Mavs pointaient avec un bilan négatif : 16 – 18.
Le diesel a toutefois eu le temps de chauffer. Après avoir fait ses adieux – pas déchirants pour un sou – à Kristaps Porzingis à la trade deadline, les Mavericks, évidemment tractés par le talent illimité de Luka Doncic, ont terminé l’exercice régulier comme des fusées : 36 victoires, 12 défaites et la 4ème place de la conférence ouest. C’est tout bonnement la première fois depuis la sainte campagne de 2011 que l’équipe possédait l’avantage du terrain au premier tour.
C’est également la première fois qu’elle a passé un tour de playoffs ! Malgré l’absence de Doncic pour les premières rencontres, Dallas est assez aisément venu à bout du Jazz d’Utah, qui était sur le point d’imploser (4 – 2). Alors que Jalen Brunson s’est transformé, le temps de ce premier tour, en Dwyane Wade avec un shoot, ce sont les Suns que les texans devaient se coltiner en demi-finale de conférence. Dans cette confrontation face à Chris Paul, Devin Booker et autre Deandre Ayton, les Mavericks se sont admirablement comportés pour s’imposer en 7 rencontres.
En finale de conférence, les Warriors n’ont laissé aucune véritable chance à ces Mavericks déjà bien contents d’avoir fracassé leur plafond de verre. C’est ainsi que la saison s’est achevée sur une très bonne note et même avec un petit goût amer dans la bouche. L’été passé devait permettre à la franchise de se renforcer dans l’optique de rééditer la performance de l’exercice passé. Y est-elle parvenue ?
In & out : le point sur le roster
Le point sur le roster actuel :
Meneurs : Spencer Dinwiddie, Luka Doncic, Jaden Hardy, Frank Ntilikina, McKinley Wright IV*
Arrières : Tyler Dorsey (two way contract), Josh Green, Tyler Hall*, Tim Hardaway Jr, Theo Pinson, D.J. Stewart Jr*,
Ailiers : Reggie Bullock, Dorian Finney-Smith, Mouhamadou Gueye*,
Ailiers-forts : Davis Bertans, Maxi Kleber, Christian Wood,
Pivots : Marcus Bingham Jr*, JaVale McGee, Dwight Powell.
* contrat non garanti. Ces joueurs ne sont donc pas assurés de faire réellement partie de l’effectif pour la saison à venir.
Phase de l’équipe : Ambitieuse
Cela aurait pu être le titre du dernier single de Mylène Farmer, mais non, “ambitieuse” est clairement le terme qui convient le mieux à la franchise de Dallas, à l’aube du l’exercice 2022-23. L’équipe, qui s’est qualifiée en playoffs lors des 3 dernières saisons – deux défaites au premier tour face aux Clippers (4 – 2 en 2020, 4 – 3 en 2021) et une finale de conférence (2022) – doit absolument viser au moins aussi haut.
La tâche ne sera pas simple, car l’Ouest s’est semble-t-il renforcé au cours de l’été. Néanmoins, si posséder l’avantage du terrain ne sera pas un prérequis obligatoire, il importe que les Mavericks parviennent d’une part à se qualifier en playoffs sans passer par la case play-in tournament, et d’autre part qu’ils puissent le faire avec un bilan comptable suffisant pour prétendre à passer un, voire deux tours de post-saison.
En gros, l’idée est de voir Luka Doncic et consorts jouer au basketball lors de la seconde partie du mois de mai 2023. Formulé ainsi, l’objectif paraît enfantin. Cependant, avec la concurrence des Warriors, Nuggets, Wolves, Pelicans, Grizzlies, Suns et autres Clippers, la tâche des hommes de Jason Kidd sera particulièrement complexe, et aucun faux pas ne sera permis.
Les tendances de l’été
L’été n’a pas été totalement de tout repos à Dallas. De là à dire que la franchise s’est renforcée depuis le mois de juin ? Encore une fois, la réponse à la question n’est pas aussi évidente que cela. D’un côté, il est possible de considérer que l’ensemble des mouvements estivaux a conduit à au rehaussement du plancher de cette équipe. D’un autre, avec le départ de l’un de ses tous meilleurs éléments, il se pourrait que, théoriquement au moins, son plafond se soit abaissé dans le même temps.
Welcome to the Wood
Le premier mouvement réalisé par la franchise est intervenu à la mi-juin. Les Mavericks ont en effet envoyé Sterling Brown, Trey Burke, Boban Marjanovic, Marquise Chriss et le pick 26 de la draft 2022 à Houston, en contrepartie de la venue de Christian Wood. Le profil de l’intérieur, capable de jouer aussi bien au poste d’ailier-fort qu’à celui de pivot, manquait effectivement à la raquette texane. Là où Maxi Kleber, Dwight Powell ou JaVale McGee (nous y reviendrons) ont un rôle offensif limité (rim-run pour les deux derniers, shoot à trois-points pour le premier pour caricaturer), Wood est un attaquant solide, adroit de loin qui viendra offrir une nouvelle alternative à Jason Kidd et à son staff.
Sa venue est d’autant plus intéressante qu’elle est dénuée de tout risque. Comme nous le faisions remarquer en juillet dernier, le contrat de Wood (14 M$) expire en fin de saison prochaine. Dès lors, si son intégration dans l’effectif est une réussite, il pourra être question de lui offrir un nouveau contrat. Dans le cas inverse, il sera envisageable de le transférer à la trade deadline ou de le laisser partir libre en juin prochain.
Brunson, direction Big Apple
Alors que la franchise était globalement absente des drafts précédentes, elle s’est cette fois-ci démarquée en sélectionnant, au début du second tour, le meneur Jaden Hardy, jusqu’alors pensionnaire de l’équipe G League Ignite. Auteur d’une saison moyenne, Hardy est néanmoins un combo-guard de grand talent, au point que les sites spécialisées le plaçaient régulièrement dans la loterie.
Le salut de Dallas passera également par la démonstration de son talent au niveau supérieur, puisqu’une place sur la backcourt s’est libérée à la free agency et le départ pour New York de Jalen Brunson. Dans un petit chef d’oeuvre de tampering, les Knicks ont proposé à l’ancien meneur de Villanova un contrat de 4 années et 104 M$.
La perte est importante, tant Brunson s’était imposé, petit à petit, comme une option offensive n°2 plus que crédible derrière Doncic. Néanmoins, le montant proposé par New York semble – à l’heure de la rédaction de ces lignes – supérieur au talent réel du meneur, du moins dans l’esprit des Mavericks, qui ont laissé le meneur filer dans la Grosse Pomme. Espérons néanmoins pour lui qu’il en sera autrement dans quelques années !
Le retour du roi JaVale McGee
Enfin, la free agency a également été le témoin du retour de JaVale McGee à Dallas, pour un montant de 20 M$ sur 3 ans. À l’instar de ce que nous écrivions sur Christian Wood, l’arrivée de l’ancien de Golden State et L.A semble dénuée de tout véritable risque. Triple champion NBA, vétéran accompli et défenseur solide, McGee est en mesure d’apporter son expérience à une équipe qui en manque, et cela pour un tarif qui ne grève clairement pas le cap de la franchise.
Nous ne nous attarderons pas sur les autres signatures de l’été, puisqu’il convient d’attendre la fin du training camp pour connaître avec certitude le joueur qui occupera la dernière place du roster.
Le constat malgré l’ensemble de ces mouvement, demeure identique à celui de l’an passé : Luka Doncic demeure le seul joueur de niveau All-star de l’effectif et ne possède donc pas de véritable lieutenant. Si sa gravité et son talent ont jusqu’alors suffit pour emmener Dallas à certains sommets, il serait bon de voir le front-office lui offrir un coéquipier capable, également, de porter l’équipe.
Le roster se trouve donc composé de Doncic et d’une véritable armada de role players de très grande qualité.
Focus sur la saison 2022-23 des Mavericks
Trouver une régularité défensive
Depuis longtemps, Dallas est catégorisée comme une équipe toute tournée vers l’attaque, pour laquelle l’aspect défensif est secondaire. Cette étiquette collait à la peau de l’équipe de Doncic depuis sa draft et est symbolisée par l’année 2019-20, terminée avec ce qui était alors le plus haut offensive rating de tous les temps (116,7). Depuis lors, Rick Carlisle s’est fait la malle en direction des Pacers et Jason Kidd est arrivé sur le banc, avec des préceptes défensifs clairs.
Ainsi, l’an passé, Dallas n’affichait que la 15ème attaque de la Ligue (112,8 d’offensive rating, contre 116,7 pour le Jazz, meilleure équipe en la matière). Par contre, de l’autre côté du terrain, les joueurs ont enfilé le bleu de chauffe pour présenter le 6ème defensive rating de la Ligue (109,4). Pour atteindre un telle excellence, les schémas défensifs étaient précis et axés autour de 2 points primordiaux : le shoot à trois-points et la peinture.
On constate ainsi que seuls les Bulls et les Wizards autorisaient moins de tentatives à trois-points que Dallas au cours d’un match, l’an passé. Les adversaires des Mavs dégainaient ainsi à 32,1 reprises de loin en moyenne par rencontre. Parmi les équipes du haut de tableau, il s’agit d’une performance inédite, car Denver, Phoenix, Memphis ou Boston se retrouvent toutes entre la 10ème et la 16ème position. L’objectif était ainsi de limiter l’un des tirs les plus rentables de notre NBA contemporaine. Surtout qu’en plus de limiter drastiquement le nombre de tentatives adverses, les hommes de Kidd faisaient également partie de l’élite pour ce qui était de défendre le tir primé, en n’encaissant que 34% des tirs adverses (4ème ex aequo, derrière le Heat, les Warriors et les Celtics, qui sont à 33,9 %).
Un simple calcul, qui mêle nombre de tentatives / match et taux de réussite permet ainsi d’affirmer que la saison dernière, Dallas était l’équipe qui encaissait le moins de points provenant d’un tir lointain adverse de toute la Ligue. Dans la mesure où le personnel défensif sur le backcourt et les ailes n’a quasiment pas évolué, tout laisse à croire que ce plan de jeu – très efficace – pourra à nouveau être mis en oeuvre à compter du 18 octobre prochain.
De surcroît, les Mavericks étaient relativement performants pour interdire les dunks et autre lay-ups. En effet, seules 8 équipes limitaient mieux le nombre de tirs adverses dans cette zone très proche du cercle, qui est bien souvent synonyme de points. À cet égard, Dallas possédait un intimidateur naturel en la personne de Kristaps Porzingis et ses 2m20. Cependant, le Letton est désormais remplacé dans la raquette par JaVale McGee, qui est loin d’être manchot dans l’art de protéger le cercle.
L’objectif affiché sera clairement de rééditer la performance de l’an passé. S’il arrive que l’attaque balbutie lors de certaines rencontres, ce qui est tout à fait naturel dans un sport d’adresse, posséder une défense solide constitue un atout majeur pour s’imposer et, par-là, s’installer en haut de la conférence Ouest. Pour ce faire, chaque joueur devra se retrousser les manches, notamment sur le backcourt (Doncic, Dinwiddie, Hardaway Jr…). Le Slovène a d’ailleurs montré l’exemple lors de la seconde partie d’exercice dernier, non pas en devenant un défenseur génial, mais en faisant les efforts demandés. Or, quand ton franchise player, joueur à la charge offensive très lourde, se démène également de son propre côté du terrain, il serait malvenu pour les role players de se ménager sur les phases défensives.
Sans Luka, quelles solutions ?
Il s’agit finalement de la même question que chaque année. L’an passé, nous avons été témoin de l’émergence au haut niveau de Jalen Brunson, également sélectionné par la franchise à la draft 2018. Cependant, le voici sur la côte Est. Dès lors, on peut se demander comment les Mavericks vont réussir à s’en sortir lorsque leur meneur Slovène sera sur le banc, voire blessé, lui qui a toujours manqué entre 10 et 20 rencontres par saison.
Jason Kidd a donné des éléments de réponse lors du media day, en énonçant aux journalistes la composition de son 5 majeur et de sa second unit. Ainsi, à tout le moins au mois d’octobre, ce sont Spencer Dinwiddie, Reggie Bullock, Dorian Finney-Smith et Javale McGee qui débuteront les rencontres. Dinwiddie prend ainsi le rôle de créateur secondaire. Son temps de jeu devrait ainsi augmenter par rapport à la saison passée (28 minutes / match à Dallas). Son jeu en catch & shoot pose toujours question, alors même que ce sera dans ce registre qu’il sera principalement attendu. On sait en effet que le jeu off-ball de Doncic est loin d’être développé. Dès lors, les joueurs qui l’entourent devront tous être capables de profiter des offrandes reçues.
L’idéal serait certainement que Doncic et Dinwiddie ne soient pas mis au repos au même moment de la rencontre. L’ancien de Washington est en effet le second (et seul ?) créateur de l’équipe, en attendant de voir ce que vaut réellement Jaden Hardy en NBA. En effet, si elle possède un talent indéniable et une profondeur appréciable, la second unit n’est pas véritablement dotée d’un joueur à l’aise balle en main : Frank Ntilikina, Tim Hardaway Jr, Josh Green, Maxi Kleber et Christian Wood. Hardaway Jr est un créateur, mais uniquement pour lui même, Kleber est un défenseur chevronné et un finisseur en bout de chaine, tandis que Christian Wood, s’il est un excellent scoreur, ne possède pas le jeu et la vision suffisant(e)s pour évoluer avec la balle. Ntilikina, quant à lui, n’a pour l’heure pas su démontrer qu’il pouvait se voir confier les clefs du camion.
Reste alors Josh Green, qui a passé son été à l’entraînement avec Kyle Lowry. Lors de ses deux premières saisons professionnelles, l’ancien d’Arizona n’a jamais occupé un rôle de créateur pour autrui. Si son rôle, en tant que backup de Bullock, lui promet d’avoir un temps de jeu revu à la hausse (15 minutes au mieux, l’an passé), rien n’assure qu’il ait développé les capacités suffisantes pour tenir le ballon ne serait-ce que sur quelques possessions.
Ainsi, afin d’alimenter les scoreurs que sont Hardaway Jr et Wood, mais aussi pour trouver Kleber derrière la ligne à trois-points, il semble impératif que Spencer Dinwiddie évolue également avec la second unit. Son rôle dans le roster sera prépondérant, notamment si les Mavericks se qualifient en playoffs. Nous avons remarqué, lors des deux éliminations face aux Clippers, que Luka Doncic, bien que titanesque, ne pouvait maintenir son niveau de jeu durant 48 minutes. Il est donc nécessaire, pour l’attaque de Dallas, que l’équipe soit dotée d’un second créateur, capable de suppléer son franchise player par séquence.
Qu’est-ce qu’on veut voir cette saison ?
Dans une Conférence Ouest qui retrouve de sa superbe, Dallas aura fort à faire pour rééditer, à minima, ses performances de l’an passé. La perte de Brunson sera difficile à compenser, tant l’extérieur avait pris de l’importance dans l’effectif. Si l’on s’attend à voir un Luka Doncic en mode MVP – et peut-être dès le début de saison cette fois – c’est surtout les joueurs autour de lui qui seront scrutés de près. Avec les renforts de Javale McGee et Christian Wood, les Mavericks ont ajouté des intérieurs aux profils variés pour combler certaines lacunes.
On peut d’ores et déjà assurer que cet effectif fera encore tourner une attaque flamboyante, surtout en présence du prodige slovène. Reste à voir si Dallas saura sortir de la Doncic dépendance le plus souvent possible, et créer un collectif fort des deux côtés du terrain. Certes, les forces de la franchise sont connues, mais il est plus que difficile de jauger les Mavs maintenant que leurs concurrents semblent s’être plus renforcés qu’eux, que ce soit par des recrues ou les retours de blessure. A ce sujet, la santé physique des joueurs sera cruciale, notamment en ce qui concerne les rares porteurs de balle.
Pour Dallas, il s’agira donc de confirmer. Afficher de la régularité en saison régulière, accéder aux Playoffs sans sourciller, et on reparlera à ce moment là des opportunités des hommes de Jason Kidd. Ils auront déjà la tâche lourde pendant de longs mois, et un nouveau statut à défendre. Avec, pour leader, celui qui doit prétendre au titre de meilleur joueur de la ligue très bientôt.