Nous voilà enfin arrivés au meilleur moment de la saison : les Finales NBA ! Au départ elles étaient 16, aujourd’hui il ne reste plus que deux franchises. Alors que les Warriors s’étaient très facilement débarrassés des Mavs pour rallier les finales, les Celtics eux, ont attendu le match 7 pour éliminer le Heat extrêmement tenace, avec un Jimmy Butler en feu.
C’est seulement la deuxième fois dans l’histoire que ces deux équipes s’affrontent en Finales NBA : en 1964, le duel entre les Warriors de San Francisco de Wilt Chamberlain, et les Boston Celtics de Bill Russell & co avait tourné à l’avantage des Verts pour leur 6ème titre consécutif.
En 2022, on retrouve d’un côté des Warriors qui ont su redevenir très compétitifs avec le retour de leurs cadres blessés, socle de leur dynastie de la décennie précédente ; de l’autre, des Celtics qui passent enfin le cap des Finales de conférence pour la première fois depuis 2010. Là où les Warriors ont réalisé une saison régulière très constante dans les résultats, les C’s eux, ont inversé la tendance du début de saison où personne ne les voyait réaliser un tel parcours.
De Denver à Dallas, en passant par Memphis, personne n’a réussi à faire douter les Warriors, ou très peu. Les joueurs de la Baie n’ont joué que 16 matchs pour retrouver leur place en Finales NBA. En face, le chemin de Boston est bien moins tranquille. S’ils ont réussi à sweeper les Nets de Kevin Durant, les hommes d’Ime Udoka ont été forcés d’aller au bout des 7 matchs pour éliminer les Bucks de Giannis et le Heat de Butler. Certes il n’y a que deux matchs d’écart, mais le défi physique proposé par les deux dernières séries de l’Est est notable. De quoi donner un léger avantage de fraîcheur aux hommes de Steve Kerr ?
Alors, les Jay’s Brothers vont-ils remporter leur premier titre NBA ? Ou Stephen Curry va-t-il rentrer encore un peu plus dans la légende de ce sport ? Qui remportera la bataille du coaching entre le novice Udoka et l’expérimenté Kerr ? Qui tiendra le mieux sa raquette entre Green et Horford ? Tant de questions auxquelles nous allons essayer de répondre, pour décrypter l’affiche des Finales NBA 2022 !
Un facteur central : la fraîcheur physique
Assez logiquement, c’est Jayson Tatum qui a passé le plus de temps sur les parquets depuis le début des playoffs, avec un total de 739 minutes. Du côté de San Francisco, le joueur avec le plus gros temps de jeu n’est autre que Klay Thompson, avec 562 minutes jouées. Au-delà du temps de jeu, c’est surtout la physionomie des matchs qui diffère très largement entre les deux parcours de nos finalistes.
Poussés en 7 matchs face aux Bucks puis face au Heat, les C’s ont joué 14 matchs en 29 jours. Quand les Warriors eux, se sont donnés les moyens de jouer “seulement” 11 matchs en 26 jours. Leur excellent parcours leur offre une semaine de repos avant que débutent les Finales, tandis qu’en face, Boston ne dispose que de trois jours pleins de récupération.
Cette différence dans les parcours a pour conséquence directe de fragiliser les organismes côté Boston. Un Robert Williams III qui ne semble toujours pas revenu à 100%, un Marcus Smart parfois boitillant, comme son coéquipier Tatum qui a causé de nombreuses frayeurs aux supporters des Celtics. Déjà bousculés par la dimension physique exceptionnelle des Bucks, ce n’est certainement pas face à ce Heat que Boston a pu se reposer. Ces incertitudes physiques qui pourraient pousser Udoka à adapter ses rotations, ou ses schémas défensifs.
En face, les Warriors ont eu à s’employer contre des Grizzlies qui ont proposé un jeu assez physique…
…mais encore loin du niveau imposé à l’Est. Là où les Celtics ont affronté des défenses rugueuses face auxquelles il relevait de l’exploit d’inscrire plus de 110 points, il n’était pas rare de voir des cartons de points dans les matchs des Warriors, résolument plus offensifs. En moyenne, il y avait 208 points inscrits dans les matchs des Celtics, contre 224 pour les affiches de Golden State. Surtout, ce repos aura permis aux blessés de Golden State de progresser dans leur processus de retour. Ainsi, les noms de Gary Payton II, voire même d’Andre Iguodala, sont à surveiller en cours de série. Deux renforts bienvenus pour les Warriors, même si rien ne permet de deviner l’état de forme d’Iggy après une aussi longue absence.
En d’autres termes, les Warriors ont un avantage de taille face à des Celtics très entamés physiquement, qui devront puiser jusqu’au fin fond de leurs réserves.
Bonne nouvelle néanmoins pour les Celtics : la série ne démarre pas tout de suite après le Game 7 disputé face à Miami. En prime, mise à part entre les matchs 3 et 4, il y aura deux jours de repos entre chaque rencontre des Finales. Si à l’origine, cela aurait dû être un avantage pour les Warriors, plus âgés, la situation de Robert Williams, Marcus Smart et Jayson Tatum, tous gênés par des blessures, peut rendre cet espacement des rencontres plutôt favorable aux Celtics au long cours. Et puisqu’il ne faut pas non plus voir le verre à moitié vide : espérons pour les fans des Celtics que ce laps de récupération plus court sera compensé par un gain de rythme d’entrée de jeu, face à des Warriors en stand-by depuis leur victoire face à Dallas !
La défense des Warriors au révélateur celte
Avant la blessure de Draymond Green en saison régulière, il ne faisait nul doute que la force des Warriors était la défense. En son absence, les choses sont devenues floues. Ces playoffs ne nous ont pas aidé à nous faire un avis définitif. Enfin au complet après une saison à tenter d’obtenir un groupe en bonne santé, les Warriors ont donné l’impression de gérer défensivement. Certes opposés à de très bonnes attaques (Denver, Memphis, Dallas, avec les menaces Jokic, Morant et Doncic à gérer), ils n’ont pas paru impériaux en playoffs. Oui, les adversaires étaient capables de frapper un grand coup, mais au final, beaucoup de matchs se sont joués sur de belles pointes au scoring de la part de Golden State.
Hormis la série contre les Grizzlies, aucune ne s’est jouée dans une véritable bataille défensive mêlant les deux équipes. Une bataille que les Celtics, même diminués physiquement, semblent en mesure de leur fournir.
Dès lors, une des clés de la série semble être la faculté de Golden State à proposer une série d’élite défensivement, face à un adversaire qui compte plus d’options que ceux rencontrés jusqu’alors, et surtout, qui dispose d’une capacité plus importante à venir sanctionner tel ou tel schéma défensif. Pas sûr donc, que les Warriors s’arc boutent sur un schéma défensif précis toute la série durant, voire même au sein d’un même match. Qu’il s’agisse des couvertures choisies sur pick and roll, qui différeront selon le joueur présent, (Jayson Tatum, Marcus Smart, Derrick White ou autres), ou des schémas plus globaux comme la zone, les Warriors devront faire preuve d’un grand sens de l’adaptation.
Draymond Green devrait ainsi être particulièrement scruté dans ce match-up. Véritable pilote défensif de l’équipe, tant dans son organisation, que techniquement, ou même par l’énergie qu’il propage, il sera intéressant de voir, dès le match 1, où Steve Kerr décidera de le positionner. S’il conserve le même raisonnement que face à Dallas, Kerr aura à cœur de mettre ses deux meilleurs défenseurs sur l’homme – Wiggins et Green – sur les deux attaquants principaux des Celtics. Ainsi, on avait pu voir Wiggins hériter du marquage de Doncic, et Green assigné à Jalen Brunson, notamment pour venir limiter les drives de ce dernier. Face aux Celtics, Green pourrait ainsi hériter de Jaylen Brown, ce qui aurait pour conséquence de décaler inévitablement Klay Thompson au marquage d’un intérieur – Williams III ou Horford.
Nul doute également, qu’à l’instar des précédents adversaires de Golden State, les Celtics tenteront d’exploiter les mismatchs les plus avantageux. Curry sera ciblé même s’il a montré sur les playoffs une défense très solide aussi bien individuellement que collectivement. Kevon Looney le sera également, principalement par les slashers comme Jaylen Brown par exemple. Enfin, et surtout, Jordan Poole sera recherché par les Tatum, Smart, Brown, entres autres, tous conscients du danger qu’il représente. Au fait de la faiblesse de son sixième homme de luxe mais également de la nécessité de l’avoir sur le terrain, Kerr lui avait donné pour consigne face à Dallas de multiplier les défenses en hedge and recover sur les écrans où il était impliqué – une sortie sur le porteur de balle très agressive, avant de rapidement reprendre son joueur -, évitant ainsi de concéder le duel face à Doncic. Une solution à exporter face à Boston ?
This has been a pretty good defensive scheme the warriors have been playing having when Luka calls for a screen have Poole or Curry Hard Hedge tag him and rotate back to you man instead of just giving Luka the switch. It’s worked wonders in Games 1 and 2 pic.twitter.com/BdJG81qAtz
— DreamHoopz (@DreamHoopz) May 22, 2022
Comme dit plus haut : Boston n’est pas arrivé là par hasard. Udoka et les siens peuvent punir une multitude de schémas défensifs, et surtout, s’adapter. Là où Jokic, Morant et Doncic étaient des joueurs héliocentriques par essence – toute l’attaque de leur équipe passant prioritairement/exclusivement par leur création -, Golden State avait choisi son poison. Face à Denver, Steve Kerr a pris une décision claire : laisser ses intérieurs (Kevon Looney et Draymond Green) faire au mieux face au serbe, et se permettre quelques aides de temps en temps. Contre les Grizzlies, les Warriors ont laissé Ja Morant les attaquer inlassablement, se focalisant, comme au tour précédent, sur les coéquipiers de l’option numéro 1. Contre Dallas ? Rebelote. Bref, accepter qu’un joueur dominant domine.
Boston est néanmoins différent : Jayson Tatum est certes le leader offensif de l’équipe, mais il n’est pas le maître d’un système héliocentrique, et les joueurs à ses côtés capables d’exploser ou de créer sont plus nombreux. Jaylen Brown a, à plusieurs reprises, été le joueur le plus en verve de l’équipe durant les playoffs, et apporte un surplus de danger par ses drives – comme Marcus Smart -, qui permettent plus de verticalité à l’attaque de Boston, mais également des opportunités de tirs plus dégagées après pénétration et fixation de la défense.
C’est en ça que Golden State devra, pour l’emporter, produire une défense d’élite comme ils en ont les ressources et les moyens.
Ainsi, si les Dubs ont encore ça en eux, comme le début de saison laissait présager, alors les choses pourraient vite se compliquer pour Boston. En effet, l’attaque des Warriors peut être entravée : Memphis l’a bien montré. Mais en définitive, la pluralité d’options offensives, la profondeur de banc et la quantité de joueurs capables de produire offensivement, en font une équipe compliquée à faire dérailler au meilleur des 4 matchs.
La défense de Boston face à la motion-offense californienne
Multiples écrans, joueurs en permanence actifs lorsqu’ils n’ont pas le ballon, présence de plusieurs joueurs historiquement adroits à 3 pts, on va encore le répéter, défendre sur les Warriors peut vite devenir un cauchemar, mais représente également un vrai défi en termes d’adaptation. Personne n’attaque comme les Dubs, et les équipes adverses font souvent face à un problème qui les handicape sur la ligne de départ : ils mettent trop longtemps à s’adapter
Denver a commencé à trouver des solutions autour des matchs 3 et 4, et les Mavs, à partir du 3e. Dans les deux cas, le réveil fut trop tardif. Pas de quoi les blâmer pour autant, tant furent nombreuses les équipes touchées par ce phénomène au fil des années. Toutefois, les Celtics ne sont pas les Nuggets, décimés et privés de défenseur d’élite ; ni les Mavs et leur secteur intérieur exsangue. Ils n’ont pas de défenseur à cibler en priorité dans leur cinq majeur, et n’ont pas réellement de poste faible de ce côté du terrain. Ils ont montré de la discipline et leur coach, Ime Udoka, a prouvé sa faculté d’adaptation. Bref, ils ne sont pas en Finales NBA pour rien.
Alors quelles sont les meilleures solutions possibles pour Boston ?
Pour contrecarrer le jeu des Warriors, l’une des principales clés semble être de pouvoir contrôler le pick and roll Curry/Poole-Green : plus simple à dire qu’à faire… Qu’il s’agisse du tir extérieur de Curry et Poole, de leur capacité à finir au cercle, à créer du jeu et attirer les défenses derrière l’écran, ou de la lecture de jeu de Green sur les short rolls, cette simple situation de jeu est déjà un vrai casse-tête pour un bon nombre d’équipes NBA. Une des premières solutions pour Udoka serait ainsi d’adapter sa défense individuelle en conséquence : si Smart, White ou Brown devraient hériter logiquement du duo Curry-Poole, qui pour défendre Draymond Green ? Si les Celtics s’engouffrent dans l’idée d’un switch permanent pour éviter de concéder toute fenêtre de tir directe, la solution pourrait venir de Jayson Tatum ou Grant Williams, les deux joueurs semblent êtres les plus à même de rester face à des joueurs comme Curry et Poole après switch qu’un Al Horford ou Robert Williams III.
A l’instar de Kevon Looney, ce dernier devrait également être ciblé par les Warriors, notamment pour l’attirer loin du cercle – et dégager du rebond et de la protection de cercle. Dans un match-up classique où Robert Williams III devrait prendre en charge son homologue Kevon Looney, les Celtics ne pourraient raisonnablement pas rester dans une défense en switch, à moins de vouloir voir la série tourner très court. Gérer le jeu d’écran de Curry, Poole, ou même Thompson serait un bien trop grand calvaire pour le pivot celte. Dès lors, nul doute qu’Udoka aura anticipé la chose en amont, soit en décidant de se passer de son pivot au bénéfice d’une small line-up Horford-Grant Williams (plus petite, mais plus à même de défendre le trio sur écran), soit en attribuant le marquage de Looney à Horford ou à un ailier, et en “cachant” Williams III pour le conserver proche du cercle.
D’ailleurs, c’est peu dire qu’Udoka aura grand besoin de son pivot face à Golden State.
Denver ne possédait pas la défense extérieure pour empêcher les pénétrations des Warriors, tandis que Dallas n’a pas nécessairement produit une mauvaise série défensivement. Néanmoins, les deux équipes ont fait quelque chose d’à la fois très contre-intuitif et très rare face à ces Warriors : ils ont perdu la bataille du rebond. Faire jeu égal, passons. Mais la perdre ? Très mauvaise idée.
La dynastie des Warriors s’est construite sur une défense parmi les meilleures de la ligue, malgré son manque de taille. Le prix à payer : se faire malmener à la conclusion de la défense… Le rebond.
Résultat, la seule série où Golden State a vraiment connu des moments compliqués et dû arracher des rencontres disputées à couteaux tirés aura été contre les Memphis Grizzlies. Une équipe qui possédait à la fois des joueurs capables de suivre les déplacements on et off-ball des insatiables Warriors, mais aussi des intérieurs à opposer dans la peinture, qui impliquent de la protection d’arceau et suffisamment de mobilité pour gêner de nombreux tirs, prendre des rebonds, notamment offensifs.
Vous voyez où l’on souhaite en venir ? Robert Williams, Grant Williams, Al Horford : Boston a du matériel. Le genou du premier sera un élément majeur de la série : plus Robert sera proche de son niveau optimal à 100%, plus sa présence sur le terrain sera précieuse pour les Celtics. Si Grant Williams et Al Horford sont des soldats, des joueurs ô combien précieux tant défensivement qu’offensivement, le pivot reste celui qui peut représenter la force la plus pure du roster celte : 4è de la saison aux tirs bloqués, il est capable de dissuader et de gêner de nombreux tirs, et d’incarner une présence intimidante sur les drives adverses.
Par ailleurs, leurs qualités représentent un atout certain : celui d’avoir le personnel pour nullifier le rôle de Draymond Green en attaque. Quand ce dernier est agressif et que sa mobilité est un mismatch, l’attaque des Warriors devient un casse-tête sans réelle solution. Avec Grant Williams et Al Horford (voire Theis, selon les absences), il y a largement de quoi faire pour éviter le problème insoluble que les Nuggets ont connu face à Green.
Note : Dans les deux affrontements de saison régulière, les Celtics ont remporté la bataille du rebond. 49 pour Boston contre 41,5 par match pour les Dubs.
Qu’attendre de la série ?
Beaucoup d’indécisions demeurent sur cette série. Les deux équipes vont faire face à un adversaire très différent de ceux qu’elles ont croisé pour en arriver là. L’attaque de Golden State est infiniment plus complexe à jauger que ce que Boston a vu jusqu’à présent, tandis que la défense de Boston est elle plus étouffante que ce que les Warriors ont connu face à Memphis, Denver ou Dallas. La santé de plusieurs joueurs clés est également à surveiller, entre les blessures des uns et les probables retours des autres. Et tout un lot de questions n’ont pas pu être abordées ici ! Qui remportera la bataille des balles perdues ? Quelle sera l’équipe la plus létale en transition ? Quelle série pour le banc de Boston ? De Golden State ? Bref, une série avec son lot d’incertitudes comme on l’aime, qui plus est en Finales NBA !
Néanmoins, puisqu’il faut prendre des risques, misons sur une série à bas scoring. Les deux équipes sont dotées d’une défense d’élite sur le papier, et disposent de multiples armes pour faire déjouer leurs adversaires. Steve Kerr et Ime Udoka devraient s’en donner à cœur joie. Defense wins championships après tout. Quelle équipe sera la plus à même d’exister face à un adversaire capable de lui répondre sur plusieurs pans de jeu, les yeux dans les yeux ?
En somme, il faut s’attendre à une série de coach, une fois n’est pas coutume, tout en gardant à l’esprit que nous ne verrons que 10% du travail abattu en réalité par le coaching staff. Les questions sont légions, et celui qui fera les adaptations les plus intelligentes, au meilleur moment, pourrait prendre l’ascendant. Si les deux défenses peuvent se regarder dans les yeux, l’attaque de Golden State et l’expérience des Finales NBA font toutefois pencher la balance pour les Dubs.
Match-up
Golden State Warriors : 58%
Boston Celtics : 42%