Après des demi-finales de haute intensité, Heat et Celtics se retrouvent en finale après leur confrontation dans la bulle en 2020. Premiers et deuxièmes en saison régulière, dominants au premier tour, les deux équipes ont connu des parcours bien distincts : Boston l’a finalement emporté face aux Bucks après sept rencontres âprement disputées, Miami a capitalisé sur les pépins physiques de Joel Embiid et d’un James Harden irrégulier pour logiquement se défaire des Sixers. C’est maintenant une équipe d’un bien autre niveau qui se présentera en Floride, sur le nuage de leur victoire face aux Bucks.
L’affiche s’annonce passionnante entre deux équipes protéiformes, des joueurs habitués aux joutes de mai et deux coachs qui ont prouvé leur capacité d’ajustement. Surtout, cette confrontation est celle de deux défenses étouffantes et impitoyables qui sauront cibler et limiter les points forts de leur adversaire. De quoi nous promettre une bataille tactique comme nous avons l’habitude de voir depuis le début de ces playoffs.
Quel poste 5 pour Boston ?
Al Horford a été LA belle histoire des demi-finales de conférence. Excellent aligné dans une raquette small-ball aux côtés de Grant Williams, il a parfaitement complété les défenseurs extérieurs de Boston.
Le doute Rob Williams
Ce rayonnement s’est fait au mépris de Rob Williams, mis sur la touche par des pépins physiques puis éloigné dans la rotation. S’il a brillé sur ses quelques possessions passées hors-ballon (cf article Giannis rules), les Bucks et Giannis ont exploité ses largesses sur des joueurs plus rapides.
Williams apparait en difficulté pour deux raisons principales :
- Sa valeur défensive est maximisée lorsqu’il défend sur un ailier utilisé loin du ballon, situation dans laquelle il peut contester les tirs en arrivant de loin. Problème, Miami est avec les Warriors l’équipe qui utilise le mieux les écrans hors-ballon pour créer des tirs ouverts pour ses ailiers mis en mouvement au périmètre. Difficile d’imaginer Rob Williams naviguer des écrans. Changer sur ces écrans serait la solution évidente, mais donnerait des mismatchs « gratuits » au Heat.
- Le Heat a usé et abusé du pick-and-roll face aux Sixers et à la défense en drop face aux joueurs qui ne s’appelaient pas Tyler Herro (qui a lui eu droit à une défense bien plus agressive). Rob Williams est un défenseur plus polyvalent que Joel Embiid, Paul Reed et DeAndre Jordan, mais c’est le maillon, sinon faible, le moins fort que le Heat pourra attaquer.
La solution Al Horford
On se dirige donc vers une préférence logique à Al Horford pour commencer au poste 5. Capable de relever le défi physique de Bam Adebayo, de gêner les extérieurs plus lents du Heat et de communiquer face à l’attaque tout en mouvement de Miami, Horford sera le patron de la défense des Celtics. Attention à ne pas se limiter en prenant des fautes rapides : le Heat regorge de joueurs fourbes qui excellent à provoquer des fautes. La vraie question sera celle de la rotation derrière Horford : le soldat Theis ? du small-ball avec Grant Williams en 5 ? Rob Williams, qui pourrait être aligné sur les minutes jouées par Dwayne Dedmond ?
Enfin de l’alternance ? Boston peut faire la différence au cercle
Les Celtics ont vécu dans leur série face aux Bucks grâce à tir à trois-points. 42 tentatives à trois-points par match, seul Dallas tire davantage, pour un résultat prévisible : les Celtics n’ont gagné que dans les matchs où ils ont tiré à plus de 37%.
Vivre et mourir avec le tir à trois-points est un choix risqué, mais qui s’est aussi expliqué par la défense de fer des Bucks (Brook Lopez et Giannis Antetokounmpo ne sont pas les plus accueillants). Les Celtics ont finalement réussi, grâce à Al Horford, à ouvrir la raquette et retrouver de la réussite intérieure.
Face à une défense du Heat qui se démarque par d’autres qualités que sa protection de cercle, les C’s auront la possibilité de tirer près du cercle à haut-pourcentage. Jayson Tatum (74%), Jaylen Brown (77%) et Marcus Smart (70%) sont des bons, voire très bons finisseurs au cercle, et pourront ajouter davantage d’alternance dans leur jeu.
Face à la menace de drive des Celtics, il incombera à Bam Adebayo, et à moindre mesure à PJ Tucker, de choisir entre venir aider dans la raquette ou défendre leur vis-à-vis à 3 points. Dans les cas où ils quitteraient Al Horford ou Grant Williams, ils seraient bien avisés de revenir très fort sur le tireur, afin de limiter le catch-and-shoot et les forcer à poser un dribble au sol. Sur ces playoffs, Grant Williams tire à 45% à trois-points quand il ne pose pas un dribble, à 14% sur les 17 tentatives après un dribble.
Wham Bam here i am (par Cam)
Le géant du Heat conclue son second tour de playoffs sur une réussite défensive rare à son poste. Au four et au moulin pour tenir la dragée haute à Joël Embiid. 16.5 pts, 7.5 rebonds et 2 passes. Du Bam dans le texte tant sa ligne statistique est autant révélatrice que trompeuse. Elle met autant en avant ses progrès en attaque (notamment lorsqu’il a su profiter de l’absence de Embiid pour martyriser Paul Reed et les restes de Deandre Jordan) qu’elle cache sa présence en défense où il peut couvrir l’ensemble des points du terrain et s’affirme toujours plus comme le meilleur défenseur du Heat.
Si sanctionner la faible densité des Sixers est chose aisée, Bam reste cependant encore parfois trop timide, préférant jouer collectif quand le sens du jeu lui impose justement de faire preuve d’égoïsme. Contre Boston et notamment face à un Horford en pleine cure de jouvence, Bam doit hausser le ton pour permettre à son équipe de se sortir d’une opposition aussi excitante qu’haletante. Si Horford est de retour dans ses standards de mobilité, de bon choix et de bon placement, il n’empêche qu’Adebayo a un clair avantage en termes de densité et de puissance sur lui. La défense extérieure des Celtics portée par un Marcus Smart toujours plus survolté devrait mener la vie dure aux soldats de Floride. Une occasion pour Bam d’être plus responsabilisé et de se transformer en véritable première option offensive ?
Un retour au premier plan ?
Bam aura relativement peu d’espace, entre le retour annoncé de Robert Williams, Horford assigné en mission sur lui et un cinq majeur de Boston composé uniquement de forts défenseurs ; il ne peut pas disposer de longues séquences d’isolations. Miami devrait chercher le switch, cibler Robert Williams qui, même si très mobile, peine encore à tenir des arrières rapides en un contre un. Alors Bam sera en position de match up favorable et pourra être servi pour conclure l’action, s’il le veut.
L’absence de Lowry (au moins sur le premier match) va également encore une fois, forcer Miami à diversifier ses schémas offensifs. Sur les tours précédents, il « suffisait » de mettre Butler dans de bonnes dispositions et de l’observer briller. Sur cette série et face à une défense collective arrivant avec le couteau entre les dents, Miami et Spoelstra doivent varier leurs schémas de jeu et peut-être revenir à l’utilisation de Bam en tête de raquette par séquences. Bam sort d’une saison où il s’est mué en rôle de finisseur mais sa capacité à la création reste une menace pour Boston.
En défense ? Il est évidemment le garant de la défense en zone du Heat qui est une référence dans le domaine et devrait avoir recours à ce systéme de jeu pour forcer les non shooters de Boston à artiller de loin. Pour cela, il faut bien évidemment blinder la raquette, limiter les drives et empêcher les excellents joueurs que sont Tatum et Brown. Comment utiliser Bam au mieux ? Miami devrait tenter le tout switch en début de match pour jauger l’opposition.
Réponse dans la nuit de mercredi.
Lowry, il y aura toujours un rendez vous (par Cam)
Boston arrive relativement au complet face à Miami. L’arma floridienne devra, elle, commencer sa série sans son meneur. Forcé de revenir en milieu de série face à Philadelphie et après un match compliqué, il est de nouveau annoncé out jusqu’au Game 2. Si son apport statistique est vital (13.4 pts, 7.5 passes et 4.5) c’est surtout sa capacité à varier les tempos de jeu et les types de schémas qui manque cruellement au Heat.
Il est d’une polyvalence qui le rend complémentaire de l’ensemble du cinq majeur et du banc, pouvant autant jouer off ball qu’en porteur de balle pour nourrir Adebayo. Son absence a forcé Spoelstra à réorienter son attaque autour d’un jeu en isolation pour Butler.
Miami a semblé peiner à exécuter offensivement lorsque la défense s’est adaptée. Jusque là, les floridiens n’ont affronté de défenses sérieuses que lors des matchs de Philly à domicile ; cela devrait être le cas sur l’ensemble de la série.
Il faut logiquement s’attendre à voir Miami souffrir en attaque sur le premier match avant de trouver une solution. Lowry devrait proposer un apport statistique inférieur à sa saison régulière mais reste le troisième membre d’une attaque du Heat qui peine à différencier son jeu lors de ses play offs.
La zone de Miami comme arme ultime ?
Dernier point à surveiller, relevé par Couper Moorhead : l’usage de la zone par Miami.
Erik Spoelstra est un de ceux qui ont (re-)mis au goût du jour la défense en zone outre-Atlantique. L’effectif de cette année est parfaitement équipé pour continuer la tradition. Jimmy Butler, Kyle Lowry et PJ Tucker sont des défenseurs extrêmement précis dans leurs placements, Bam Adebayo est la force disruptive au milieu de la raquette, Gabe Vincent et Max Strus les électrons libres en mouvement perpétuel.
Les Celtics sont l’équipe qui a le plus rencontré de défense de zone face à eux, et ils ont historiquement souffert. Forcément, leur jeu, qui repose avant tout sur les créations individuelles de décalage et les kick-out pour des tirs à trois-points, est fortement limité face à une défense de zone.
Comme le pointe Moorhead, Al Horford sera souvent (encore lui) la clé de voute face à la défense de zone. C’est lui qui devra servir de relais à l’intérieur et forcer les défenseurs à des choix difficiles. On peut aussi espérer que les progrès à la création, notamment sur short roll, de Rob Williams lui permettent de faire de bonnes lectures sur la zone. Dans tous les cas, la défense de zone de Miami va mettre une pression supplémentaire sur les joueurs de complément des Celtics, qui n’auront alors pas d’autre choix que de rentrer leurs tirs à trois-points. Derrick White, Payton Pritchard, Jaylen Brown : à vous de jouer.
Qu’attendre de cette série ?
En trois mots : champ de bataille.
Les Celtics ont su troquer leur image de jeunes stars offensives à la marge de l’égoïsme pour devenir une véritable force collective défensive. La deuxième partie de saison régulière en était un indicateur, le succès contre l’héliocentrique Giannis Antetokounmpo fut la célébration.
Le Heat confirme que les finales atteintes dans la bulle ne devaient pas être adossées d’un astérisque. Dotés d’un arsenal défensif redoutable, d’une superstar auteure de ses meilleures performances en carrière, le Heat arrive ici face à son plus grand obstacle cette année.
Difficile de dégager un clair favori. Boston semble toutefois plus armé, et surtout avec des armes plus diversifiées. Boston a le luxe d’avoir les armes pour limiter Jimmy Butler sans même utiliser son DPOY, a moins besoin de sacrifier en défense pour créer de l’attaque et devrait gagner la bataille du tir extérieur.
Le retour en grâce de Duncan Robinson suffira-t-il à prendre la relève d’un Jimmy Butler qu’on imagine muselé ? Quel état de forme pour Kyle Lowry à son retour ? Un Bam Adebayo a l’agressivité retrouvée pourra-t-il punir le small ball bostonien et forcer Ime Udoka vers des lineups non optimales ?
Ce sont sûrement ces questions qui dicteront le résultat de la série. Boston offre davantage de certitudes, d’où un pronostic légèrement en leur faveur.
Match-up
Boston Celtics 60%
Miami Heat : 40%