Depuis 2014 et la fameuse « death lineup » des Warriors, on entend souvent cette expression revenir. Pour cause, lorsque Golden State alignait son 5 Curry – Thompson – Barnes – Iguodala – Green, l’adversaire nageait souvent en eau trouble. Les choses ne se sont pas améliorées lorsque Durant a remplacé Harrison Barnes, l’actuel ailier des Kings. Cette expression est devenue, depuis, courante en NBA. Et, dans la recherche d’efficacité collective, il est désormais important pour un coach qui veut remplir ses objectifs de victoires, de trouver un groupe de 5 joueurs, qui, par son équilibre et son alchimie collective, permet à son équipe de réaliser des runs dans les moments importants d’un match.
En 2017-2018, je m’étais amusé à réaliser un bilan des 10 death lineups de la saison. L’essai prouvait que si certaines équipes possédaient ce genre de troupes, elles n’utilisaient pas toujours ces lineups à leur juste valeur. Mais dans une ère où les statistiques avancées sont de plus en plus présentes, les coaching staffs exploitent de mieux en mieux ces synergies et repèrent ces anomalies statistiques.
Pour vous donner des ordres d’idées sur les statistiques que nous allons aborder :
- La meilleure attaque NBA (Brooklyn Nets) a un offensive rating de 117,1
- La meilleure défense NBA (Los Angeles Lakers) a un defensive rating de 106,5
- L’équipe NBA qui a le meilleur net rating (Utah Jazz) affiche un écart de +9,2
- La meilleure équipe au rebond défensif (Chicago Bulls) sécurise 76,8% des tirs adverses
- La meilleure équipe au rebond offensif (New-Orleans Pelicans) arrache 30,2% de ses tirs manqués
- Le meilleur true shooting percentage de la ligue (Brooklyn Nets) est de 60,8%
- L’équipe qui joue le plus vite en NBA (Washington Wizards) a un PACE de 104,66 possessions jouées par rencontre
Afin de considérer un spectre large, à fortiori dans une saison raccourcie de 10 matchs et marquées par les absences (blessures et protocoles sanitaires), nous ne prenons que des line-ups ayant jouées au moins 15 matchs ensembles et un minima de 200 minutes au total. Ainsi, ne vous étonnez pas de ne pas trouver le trio des Nets (seulement 7 matchs disputés ensemble) ou certaines équipes remaniées à la trade deadline.
#1 – Utah Jazz : Donovan Mitchell – Royce O’Neal – Joe Ingles – Bojan Bogdanovic – Rudy Gobert / Alignée 23 fois, pour 219 minutes, net rating : +19,6
La meilleure line-up NBA se trouve chez le meilleur bilan de la ligue. Pas de surprise de ce côté-là. Le Jazz a basé sa réussite cette saison sur deux éléments forts : sa réussite au tir et sa défense. En proposant un 5 autour de son pivot avec 4 joueurs capables d’écarter le jeu de de créer à tour de rôle, Utah affiche avec ce groupe de joueurs un offensive rating de 123,9 et un defensive rating de 104,3. Sur 100 possessions, l’équipe est loin au-dessus des standards de la saison de chaque côté du terrain.
Offensivement, l’adresse générale parle d’elle-même (65,4% de True Shooting), vous ne verrez pas mieux ici. Elle ne domine pas spécialement le rebond, elle ne peut se targuer d’une circulation de balle complètement intenable, d’une fiabilité balle en main exceptionnelle, mais elle fait tout suffisamment bien pour que ses joueurs puissent prendre feu et profiter de l’équilibre de l’équipe.
Défensivement, l’équilibre est au rendez-vous malgré un rythme de jeu soutenu : PACE à 103,55.
#2 – Los Angeles Clippers : Patrick Beverley – Paul George – Kawhi Leonard – Nicolas Batum – Serge Ibaka / Alignée 16 fois, pour 264 minutes, net rating : +16,7
Nous parlions en préambule des blessures et des risques de ne pas voir certaines line-ups. Celle-ci en est le parfait exemple. Là où certaines équipes ont été épargnées (Knicks, Jazz, Suns), d’autres font avec les aléas. Ainsi, ce 5 qui aurait pu rapidement devenir le groupe le plus joué des Clippers n’a évolué qu’à 16 reprises cette saison.
Toutefois, quand ils ont joué ensemble, c’est sans surprise que le résultat fut très satisfaisant pour les hommes de Tyronn Lue. Au trio très défensif que représente Beverley-George-Leonard, l’autre équipe de LA est venue ajouter deux éléments non négligeables : Nicolas Batum et Serge Ibaka. Tous deux excellents dans leurs rôles, leurs présences ajoutent un défenseur polyvalent à l’équipe et un intérieur capable d’apporter de la dissuasion mais aussi de défendre sur des pivots.
Résultat, dans une NBA qui gagne sans cesse en efficacité offensive, ce groupe affiche un impressionnant 101,7 de defensive rating. Un des deux meilleurs que vous verrez dans cette liste.
Offensivement, entre 3 joueurs capables de contribuer et deux stars, l’équipe se porte forcément bien. D’autant que Beverley et Batum peuvent apporter du playmaking de complément et que tous les joueurs de la formation peuvent shooter. Vous l’aurez compris, cela laisse tout le loisir à l’équipe de jouer en mouvement, de partager la balle et d’optimiser l’espace pour que Paul George et Kawhi Leonard puissent naviguer. Résultat, 118,9 d’offensive rating.
De fait, même si cette line-up est en délicatesse avec le rebond, elle fait le reste trop bien pour ne pas sur-performer… Quand elle arrive à jouer ensemble.
#3 – Portland Trail Blazers : Damian Lillard – Gary Trent Jr. – Derrick Jones Jr – Robert Covington – Enes Kanter / Alignée 25 fois, pour 289 minutes, net rating : +15,5
Voici un line-up que vous ne verrez plus mais qui a rendu de fiers services aux Trail Blazers cette saison. Vous ne la verrez plus parce que Gary Trent Jr est parti à Toronto, mais aussi que CJ McCollum et Jusuf Nurkic sont revenus aux affaires.
Pour autant, ce 5 a fait des merveilles cette saison, permettant notamment à Portland de briller dans le clutch. Très satisfaisante en défense compte tenu des performances globales de l’équipe de ce côté du terrain toute l’année (avant dernière de la ligue au defensive rating), elle a surtout fait la différence par son efficacité en attaque.
Avec un 122,3 d’offensive rating, ce 5 est dans le plus pure lignée de ce qui fait Portland depuis plusieurs saisons : une équipe qui s’appuie énormément sur ses arrières pour créer et scorer. Si la balle circule peu, elle circule juste et arrive aux shooteurs de l’équipe. Gary Trent Jr a fait d’ailleurs mieux que combler le vide laissé par McCollum mais a franchi un véritable cap et su apporter sa propre production.
Par ailleurs, contrairement à ce qu’un groupe avec un seul intérieur de métier laissait supposer, Enes Kanter apportait une science du rebond non négligeable, puisque ce groupe dominait le rebond offensif : 30,9% des tirs manqués récupérés. Un engagement pas anodin dans la réussite de ce roster.
#4 – Utah Jazz : Mike Conley – Jordan Clarkson – Joe Ingles – George Niang – Rudy Gobert / Alignée 34 fois, pour 302 minutes, net rating : +15,0
Encore une line-up du Jazz (et pas la dernière !). Peu sujets aux blessures sur l’ensemble de la saison et dominant globalement toute l’année, il était certains que plusieurs rotations d’Utah se glisseraient dans le classement.
Cette fois, on est du côté des remplaçants puisqu’avec deux des meilleurs remplaçants de la ligue, le Jazz a tué ses adversaires en étant capable de maintenir un haut rythme toute l’année. Ce groupe fait très mal au relais des titulaires et permet au Jazz de dominer ses rencontres.
En effet, Jordan Clarkson s’est imposé comme un des meilleurs scoreurs en sortie de banc dans la lignée des meilleurs sixièmes hommes de l’année (Lou Williams, Eric Gordon, Jamal Crawford, etc). A ses côtés, Joe Ingles est à la fois l’un des principaux créateurs de l’équipe et affiche une efficacité offensive historique (69,2 de true shooting percentage, top 10 de l’histoire… au milieu de pivots).
En prime, si Mike Conley a connu une année d’adaptation délicate, il montre un tout autre visage cette saison. Par conséquent, l’équipe arrive comme avec la précédente rotation à aligner des joueurs complémentaires en attaque, capables de porter la balle et de shooter ou scorer par d’autres moyens… autour de Rudy Gobert.
Là encore, l’activité du pivot est capitale pour créer de l’attaque, tout en apportant sa présence défensive qui fait de cette line-up la meilleure défense de cette liste : 101,5 de defensive rating !
#5 – Philadelphia Sixers : Seth Curry – Danny Green – Ben Simmons – Tobias Harris – Joël Embiid / Alignée 29 fois, pour 593 minutes, net rating : +14,7
Bonne nouvelle pour les Sixers, leur 5 type de début de saison fonctionne… Très bien ! L’arrivée de Seth Curry comme second porteur de ballon combiné à sa contribution au shoot on et off ball fait des merveilles en attaque. D’autant que dans le même temps, l’équipe a ramené Danny Green, très en verve dans son jeu loin du ballon.
Cette line-up propose un excellent équilibre offensif qui permet à Ben Simmons de jouer avec moins de pression de ce côté du terrain, mais surtout pour Tobias Harris et Joël Embiid, il est plus facile de jouer naturellement. Mieux mis en valeur, Harris semble plus à l’aise cette saison tandis que le camerounais domine de la tête et des épaules au poste sans souffrir autant du manque de solution lors des prises à deux, une problématique récurrente la saison passée.
De fait, avec plusieurs spécialistes défensifs dans l’équipe et malgré la présence de la passoire Seth Curry, l’équipe affiche un très solide 103,7 de defensive rating (à fortiori pour un groupe qui commence et fini les rencontres, faisant donc face aux meilleures rotations adverses).
Reste pour ce groupe, fer de lance, à voir les choix qui seront faits en Playoffs (importance de George Hill ?) et rester en bonne santé pour tenter un gros run vers les finales NBA.
#6 – Los Angeles Lakers : Dennis Schroëder – Kentavious Cadwell Pope – LeBron James – Anthony Davis – Marc Gasol / Alignée 21 fois, pour 281 minutes, net rating : +13,2
On s’attendait à voir cette rotation jouer beaucoup cette saison. Mais les blessures en ont voulu autrement. LeBron James et Anthony Davis longtemps absents, Marc Gasol actuellement déclassé par l’arrivée d’André Drummond – ce qui aurait dû être le principal groupe du champion en titre remanié, n’a joué que 21 matchs ensemble.
Néanmoins, comme on pouvait s’y attendre, le groupe est très solide des deux côtés du terrain alors qu’Anthony Davis a joué diminué et que beaucoup de choses étaient à construire.
Pourtant, sans surprise, l’équipe est intraitable en défense 103,7 de defensive rating. Difficile d’expliquer l’évidence tant ce groupe possède des qualités indubitables de ce côté du terrain (et pourrait encore monter d’un ton). D’autant qu’ils offrent peu de secondes chances avec un front-court très grand et physique.
En attaque, la balle circule très bien (64,1 AST%) avec énormément de joueurs capables de créer, mais surtout d’excellents passeurs. L’ajout de Marc Gasol en point center offre une autre opportunité de créer à partir de coupes pour des joueurs dynamiques comme Schroeder et KCP.
Si l’arrivée de Drummond contrarie l’utilisation de ce groupe, il est fort probable de le voir reprendre de l’importance une fois la post-saison lancée. Et tout comme les Sixers, il est rassurant pour le champion de voir son 5 de départ probable très bien fonctionner.
#7 – Dallas Mavericks : Luka Doncic – Josh Richardson – Dorian Finney-Smith – Maxi Kleber – Kristaps Porzingis / Alignée 22 fois, pour 281 minutes, net rating : +12,6
Autre line-up qu’on aurait dû voir beaucoup plus. Là encore, les blessures, notamment côté Porzingis sont venues contrarier ce groupe. Pour autant, lors des 22 rencontres où elle a pu être alignée, elle a rappelé le Dallas de la saison passée avec 123,7 d’offensive rating.
Basée sur un système héliocentrique bâti autour de la puissance de feu de Luka Doncic, le groupe ne possède qu’un vrai ball-handler. Toutefois, l’attaque est nourrie par le joueur de troisième année, mais également une bonne circulation de balle et la faculté globale du groupe à évoluer sans ballon.
Malgré la présence du slovène, l’équipe essaie également de se nourrir un maximum de transition pour accroître le plafond de ce groupe.
L’attaque est ici cruciale puisque ce groupe possède une défense très banale. Avec 111,1 de defensive rating, elle fait à peine mieux que la moyenne globale de l’équipe, qui a certes réalisé des progrès cette saison mais figure toujours du mauvais côté du classement.
#8 – Denver Nuggets : Jamal Murray – Gary Harris – Will Barton – Paul Millsap – Nikola Jokic / Alignée 16 fois, pour 250 minutes, net rating : +11,2
Une autre line-up que nous ne verrons plus ! Le 5 de départ de Denver depuis 2017-2018 était encore en place en début de saison. Malgré le déclin de Paul Millsap et l’incapacité de Gary Harris à retrouver son efficacité offensive, l’équipe possédait une efficacité en attaque absolument effrayante malgré un rythme de jeu très bas : PACE de 95,5.
Autour de Nikola Jokic et de sa faculté de création, le groupe affiche un impressionnant 124 d’offensive rating, acquis grâce à un spacing sans pareil. En effet, non seulement l’ensemble de ce groupe faisait les efforts sans ballon, mais possédait également la capacité à prendre feu derrière l’arc.
En prime, contrairement à beaucoup d’équipes qui désertent la raquette une fois le tir pris, ces Nuggets s’appuyaient sur une grosse agressivité au rebond avec sa raquette, mais également les efforts de l’ensemble du roster. Résultat, elle récupérait 33,9% des tirs manqués.
Si la défense était moins efficace que les deux saisons précédentes avec ce groupe, le chapitre est de toute façon clos puisque Gary Harris a été transféré à Orlando et que Jamal Murray ne reviendra pas avant de longs mois suite à sa rupture des ligaments croisés.
#9 – Utah Jazz : Mike Conley – Donovan Mitchell – Roy O’Neal – Bojan Bogdanovic – Rudy Gobert / Alignée 41 fois, pour 593 minutes, net rating : +10,8
Encore le Jazz. Avec un des groupes qu’elle a le plus usité cette saison, le Jazz arrive encore à afficher un net rating de +10,8. Son 5 de départ le plus fréquent représente le même poison que son équipe placée numéro 1.
Globalement, ce groupe est moins fort des deux côtés du terrain que ce dernier, mais propose des qualités équivalentes. S’il possède moins de taille, il offre la garantie d’un duo d’arrière capables de créer pour eux-mêmes et pour autrui.
En revanche, la dégradation en défense est très notable, puisqu’il n’affiche « que » 109,4 de défensive rating.
#10 – Utah Jazz : Jordan Clarkson – Donovan Mitchell – Roy O’Neal – Bojan Bogdanovic – Derrick Favors / Alignée 45 fois, pour 262 minutes, net rating : +10,8
Et c’est une 4eme line-up du Jazz qui clôt ce classement ! Équipe la plus alignée du classement (45 reprises), elle joue peu ensemble (moins de 6 minutes par match en moyenne). Il s’agit là d’une rotation entre le 5 de départ et les premiers remplaçants qui fonctionne extrêmement bien.
Elle est notable en cela qu’elle propose une traction arrière très athlétique, mais surtout que c’est la seule line-up très dominante du Jazz qui ne s’appuie pas sur Rudy Gobert dans la raquette.
Elle met en avant également la perte qu’avait été Derrick Favors l’an passé et en quoi son retour et très important pour les hommes de Quinn Snyder.
Si là aussi on est sur une défense très correcte (109,3 de defensive rating), on est de nouveau obligés de souligner l’exceptionnelle synergie offensive d’Utah qui permet de nouveau d’avoir un offensive rating à +120.
Par ailleurs, elle permet de mettre en avant la faculté du Jazz à maintenir la pression au relais de ses titulaires grâce à un banc fantastique et un équilibre global de haut vol.
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Cette saison qui touche à sa fin (5 matchs à jouer par équipe en moyenne) met en avant plusieurs choses. Évidemment, une bonne santé permet d’être très représenté, même si vous noterez pourtant l’absence des Knicks et des Suns. Bien sûr, le choix des chiffres faisant barrière oriente le classement (en réduisant le nombre de matchs nécessaires pour être éligible, c’est une rotation des Nuggets qui serait numéro 1, tandis qu’en réduisant le nombre de minutes nécessaires, c’est une rotation des Mavericks qui ferait également une entrée fracassante : 2eme).
Ces line-ups permettent également de souligner l’importance de l’attaque dans la NBA actuelle, avec une faculté accrue à trouver des bons tirs pour les joueurs. Pour autant, une seule des 10 rotations n’est pas au-dessus des standards de la ligue en défense. Plusieurs sont même au niveau des meilleures défenses d’il y a quelques saisons (ce qui n’est pas un mince exploit).
A surveiller désormais, l’utilisation de ces groupes durant les joutes de post-saison. Mais également celles qui pourraient apparaître et ne figurent pas dans ce classement (Brooklyn Nets, Phoenix Suns, Milwaukee Bucks, etc).