L’an passé, les Atlanta Hawks enchaînaient les journées portes ouvertes. En manque de personnel pour leur défense extérieure, et avec une équipe de rim-protecteurs à faire pâlir les Kings, ils autorisaient pas loin de 40% des tirs adverses dans la raquette. Étant donné que c’est le tir le plus rentable en NBA, il va sans dire qu’ils avaient assemblé tous les ingrédients qui pouvaient mener au désastre. Et en furent récompensés.
Et pour cause ; les Hawks n’avaient pas spécialement pour objectif de gagner des matchs. A la trade deadline 2020, ils trouvèrent néanmoins le meilleur compromis possible compte tenu de leur situation. En faisant l’acquisition de Clint Capela contre un 1er TDD et Evan Turner, ils remplissaient deux objectifs. : continuer leur tanking, puisque Capela était blessé, et obtenir une présence dissuasive sous l’arceau en vue de la saison suivante.
Ils finirent donc tranquillement avec l’un des pires bilans de la Ligue, le 28eme defensive rating et se préparèrent tranquillement à gonfler leurs ambitions pour 2021.
Cet été, la franchise a pu compter sur une année d’expérience supplémentaire pour sa jeunesse, mais aussi une flopée d’arrivées comprenant : Rajon Rondo, Kris Dunn, Danilo Gallinari, Bogdan Bogdanovic, Solomon Hill, Tony Snell en plus de la draft d’Onyeka Okongwu. Parmi eux, de bons défenseurs, dont Kris Dunn, parmi l’élite de son poste.
Sauf que voilà. Dunn n’a pas joué de la saison et des défenseurs importants comme De’Andre Hunter et Cameron Reddish ont manqué plus de la moitié des rencontres à l’heure actuelle. Pourtant, les Hawks sont désormais la 18eme défense NBA et pourraient bien sur cette fin de régulière entrer dans le top 15. Si vous cherchez une raison à cela, sachez que Clint Capela est loin d’y être étranger.
Clint Capela, l’ogre d’Atlanta
Les qualités défensives de Clint Capela ont toujours été vantées. Et pour cause, le pivot offre une verticalité et une présence au rebond défensif lui permettant de devenir le socle d’une équipe en défense. Pourtant, démystifions une première chose : dans le système défensif des Rockets, où le switch était permanent, tout ne fut pas rose pour le pivot, bien incapable de défendre sur des joueurs plus petits et plus mobiles. A l’inverse d’un Bam Adebayo, véritable OVNI, le suisse est un pivot plus classique. Résultat, à Houston sa défense n’était pas indispensable et ne l’a pas empêché d’être finalement poussé au départ.
A Atlanta, dans un moule défensif plus traditionnel, ses qualités sont beaucoup plus visibles. Malgré l’absence des principaux défenseurs extérieurs des Hawks, il réussit à construire par sa seule présence un plancher défensif pour les Géorgiens. C’est-à-dire, qu’avec Clint Capela sur le terrain :
- les Atlanta Hawks encaissent 10 points de moins pour 100 possessions (96eme percentile à son poste),
- ils autorisent 3,7% d’eFG en moins (94eme percentile à son poste),
- ils autorisent 3,3% de rebonds offensifs en moins (89eme percentile à son poste),
- ils autorisent 6,9 lancers francs en moins pour 100 possessions (99eme percentile à son poste).
Contrairement à son temps à Houston, la franchise construit sa défense autour du pivot. La vérité, c’est que le nombre de séquences à défendre au poste bas ou en post-up est relativement limité dans la NBA moderne. De fait, il faut suivre un nombre croissant de joueurs au large. Ainsi, même s’il est impossible de complètement protéger un pivot des séquences de défense au large (à moins de posséder un autre OVNI, comme Giannis Antetokoumpo, pour combler les brèches), les hommes de Nate McMillan tentent d’appliquer deux consignes :
- être très agressifs sur les porteurs de ballon pour les pousser à faire la différence et s’engouffrer dans la raquette,
- limiter le nombre de séquences où Capela subit un mismatch afin qu’il puisse récupérer les défenseurs, rester proche et sécuriser le rebond.
Par conséquent, si le système offensif est fait pour mettre en avant les qualités de Trae Young, la défense malgré les absences de certains maillons essentiels a pour objectif de faire briller celles de Clint Capela. En conséquence, il s’impose parmi l’élite de la protection d’arceau, avec les mêmes tendances repérables :
“Je vois que ma présence dans la peinture pousse les gars à tirer de longs deux au lieu d’attaquer le cercle. Je sens du respect de la part des équipes adverses et c’est une bonne chose.” – Clint Capela.
Et dans les chiffres, cela se confirme :
- les adversaires tirent 5,6% en dessous des standards de la Ligue près du cercle quand Capela est sous le cercle,
- ils tirent 1,4 long deux points de plus que le standard de la Ligue face à Atlanta.
Cette saison, le joueur est leader de la NBA aux rebonds (14,3 par match) et dans le top 3 aux contres (2,2 par rencontre). Des indicateurs qui sont loin de suffire à positionner un joueur comme un bon défenseur. Toutefois, le travail de Capela est exemplaire. Ses efforts pour suivre ses vis-à-vis, contester un maximum de tir, faire un minimum de fautes évitables et dominer le rebond sont essentiels dans le succès de l’équipe. Le joueur se place proche voire dans la catégorie des Rudy Gobert, Joël Embiid et Myles Turner :
De quoi s’offrir un shot vers le DPOY ?
Le trophée du DPOY (defensive player of the year), a toujours été dominé par les pivots. Cela confine à la logique, puisque c’est le poste clé pour construire une défense. Posséder une force de dissuasion de haut vol dans la raquette a toujours permis de structurer une défense et à ce titre, Clint Capela est suffisamment bon pour faire progresser les Hawks par sa seule présence. Et depuis que Nate McMillan a pris les rennes de l’équipe, qu’Atlanta gagne, le travail du Suisse devient plus visible.
Pour autant, est-il dans l’élite de cette saison ? Alors que certains extérieurs font leur chemin, à l’image d’un Ben Simmons qui défend plusieurs positions et se chargeant soir après soir des meilleurs attaquants adverses, Capela doit s’imposer comme le meilleur des pivots défensifs pour espérer s’adjuger la statuette.
Et c’est là qu’il convient de nuancer. Malgré sa saison exceptionnelle, Capela reste un ton en dessous de ce qui se fait de mieux en la matière. Certes, la comparaison avec deux autres mastodontes est inégale. Rudy Gobert joue sous le maillot du Jazz (4eme defensive rating), équipe qui possède une défense collective exemplaire, tandis que Joël Embiid est la star des Sixers (2eme defensive rating) est entouré de certains des meilleurs défenseurs extérieurs de la ligue (Matisse Thybulle, Danny Green, Ben Simmons…). De fait, Utah s’appuie allègrement sur la force du français tandis que le camerounais est bien moins souvent exposé que Capela.
Néanmoins, il faut le préciser, ce que fait Rudy Gobert (on pourrait également citer Myles Turner) cette saison encore démontre tout l’impact de ce dernier. Un impact en faisant probablement de lui l’intérieur le plus en vue de la saison dans la course au DPOY.
Entre le nombre de tirs contestés par rencontre (DFGA), et le pourcentage autorisé (DFG%), si Capela se situe en haut, il n’est pas encore parmi ceux qui diminuent le plus les pourcentages adverses, ni dans le top 3 des joueurs se positionnant le plus souvent sur la trajectoire de la balle. Toutefois, il existe plusieurs bonnes nouvelles pour le joueur et Atlanta : compte tenu de la taille, de l’envergure et des qualités athlétiques du joueur, il a tout les atouts pour franchir un cap supplémentaire dans les années à venir.
Dans un schéma créé pour utiliser ses aptitudes et en espérant finir par jouer sur une longue durée ses meilleurs défenseurs extérieurs, les Hawks peuvent permettre à Capela d’améliorer son abattage tout en facilitant son travail de dernier rempart. S’il est donc encore trop tôt pour espérer vraiment s’inviter comme un sérieux au candidat au DPOY cette saison, il pourrait continuer de gravir les échelons, et qui sait, réussir à faire des Hawks une bonne défense NBA dans les années à venir.
En profitant de la progression interne et de la sienne, Clint Capela peut devenir l’élite de la rim-protection de la Grande Ligue. Et ça, cela change tout pour une franchise qui souhaite retourner dans les hautes sphères de la NBA.