Depuis 2013, les Portland Trail Blazers n’avaient pas raté les playoffs. Damian Lillard et sa bande sont devenus des habitués des joutes de post-saison et il devenait délicat de parier contre eux à l’orée de la saison 2019-2020. Pourtant, plusieurs indicateurs avaient de quoi inquiéter. L’effectif avait connu un renouvellement via la perte de plusieurs role players clés. A cela, venait s’ajouter la lourde blessure de Jusuf Nurkic, déjà déclaré inapte pour la saison à venir. Avec des ailes franchement dégarnies et un remplacement du bosniaque par Hassan Whiteside, on savait que l’année n’aurait rien d’une partie de plaisir pour la franchise de l’Oregon.
Le début de saison tourna d’ailleurs rapidement au désastre avec des journées portes-ouvertes soir après soir. L’équipe souffrait à la fois d’une faculté bien particulière à enchaîner les valises (passant régulièrement les +120pts encaissés par rencontre), mais également d’un déséquilibre offensif qui n’arrangeait rien à leurs affaires. Dans une saison bien partie pour être compliquée, la franchise va tout de même se payer la feel good story de l’année en redonnant sa chance à Carmelo Anthony. En quête de rédemption, le joueur va réaliser quelques belles performances, de quoi ramener un peu de baume au cœur malgré des résultats qui peinent à convaincre.
Toutefois, alors que la poursuite semble mal engagée, la saison est mise en stand-by. Dans la bulle NBA les Blazers sont encore en lice pour décrocher une place en playoffs. Pour cela, il faut juste compter sur des Grizzlies moins percutants et une grosse performance. Alors que beaucoup d’équipes d’ores-et-déjà qualifiées sont en phase de test, Damian Lillard va reprendre sur les chapeaux de roues pour emmener les siens vers la post-saison. Dans le même temps, si la franchise ne peut compter sur Trevor Ariza, acquisition intéressante de la trade deadline, ils voient en revanche leurs rangs se garnir d’un comeback plus qu’appréciable : Jusuf Nurkic. Profitant de la pause, il voit un retour possible et va faire mieux qu’un acte de présence. Apparaissant très en forme, il va proposer un solide double-double de moyenne et apporter sa défense et sa faculté à créer.
Assez pour profiter d’un élan nouveau et d’arracher un play-in face aux Memphis Grizzlies. Moins en forme que les Trail Blazers, moins expérimentés, les oursons ne vont pas tenir le choc et finiront par lâcher leur spot en playoffs. Une 8ème place qui va envoyer Portland face aux futurs champions en titres. Après un premier match arraché face à une équipe qui réalisait là son pire match au tir de la saison, les lacunes des Blazers vont être exposées et LA passera un 4-0 pour avancer au tour suivant.
Portland aura souffert, mais Portland n’a plus raté les playoffs depuis sept ans. Une consolation.
In & out : le point sur le roster
Ils ont quitté l’équipe : Trevor Ariza (Houston Rockets, puis Detroit Pistons et finalement Oklahoma Thunder), Moses Brown, Wenyen Gabriel, Jaylen Hoard, Caleb Swanigan, Hassan Whiteside (Sacramento Kings),
Ils ont rejoint l’équipe : Robert Covington, C.J Elleby, Harry Giles, Derrick Jones Jr, Enes Kanter,
Le roster à ce jour :
Meneurs : Damian Lillard, Anfernee Simmons,
Arrières : Keljin Blevins (two-way contract), CJ McCollum, Gary Trent Jr,
Ailiers : Robert Covington, C.J Elleby, Derrick Jones Jr, Rodney Hood,
Ailiers-forts : Carmelo Anthony, Zach Collins, Nassir Little,
Pivots : Harry Giles, Enes Kanter, Jusuf Nurkic.
Les tendances de l’automne
Des ailes densifiées
Nous le disions, l’an passé, les Blazers ont souffert en défense, notamment en raison d’ailes très faibles. Les départs d’Al-Farouq Aminu, de Moe Harkless avaient contribué à beaucoup plus exposer la faible défense de Portland. Si l’arrivée de Carmelo Anthony apportait une force offensive supplémentaire, cela ne résolvait en rien les soucis de Terry Stotts. D’autant que Rodney Hood goûtait à l’infirmerie plus que de raison (21 matchs joués seulement) et que Trevor Ariza, renfort plus que bienvenu, n’apportait ses services que brièvement car absent de la bulle. Puisque le back-court des Blazers n’a jamais été réputé pour sa défense et qu’Hassan Whiteside est autant un intimidateur qu’un QI Basket négatif, il y avait de quoi baliser et expliquer, entre autre, la boucherie infligée par LeBron et les Lakers durant les Playoffs.
Cette saison, les choses seront plus sérieuses dans l’Oregon. Tout d’abord, il faudra compter sur les retours de Rodney Hood et Zach Collins au fil des semaines, mais aussi de deux additions importantes. Tout d’abord, Portland a obtenu Robert Covington en provenance de Houston. L’ailier est connu pour son statut du 3&D de luxe. Capable de défendre sur les extérieurs adverses mais aussi de se frotter aux intérieurs, il va apporter une polyvalence énorme à cette équipe. Par ailleurs, ses excellentes aptitudes à longue distance et son jeu sans ballon devraient se marier à la perfection avec le duo d’extérieur très gourmand balle en main. A ses côtés, moins costaud mais doté de qualités athlétiques hors normes, Derrick Jones Jr débarque de Miami pour s’installer à l’aile. Et pourrait bien glaner le poste de titulaire à l’aile.
Une raquette 2.0
L’an passé, les Blazers ont largement dû se reposer sur Hassan Whiteside. Problème, l’implication du joueur est à géométrie variable, il a tendance à se frustrer et son sens du placement en défense est une insulte à ses qualités athlétiques. Malgré son physique “à la Rudy Gobert”, Whiteside n’a pas apporté l’ombre de sa défense.
Cette saison, la franchise revient aux bases puisqu’elle reforme d’une part la raquette de la saison 2018-2019. Jusuf Nurkic sera de retour en pleine forme après avoir utilisé la bulle pour se relancer en compétition et pourra compter sur le revenant Enes Kanter. Pourtant, si le Turc représente un back-up intéressant, c’est bien Harry Giles qui représente l’ajout le plus intriguant. Si les blessures ont largement réduit le plafond du jeune intérieur, toujours est-il qu’il apporte théoriquement plus de variété que Kanter. Plus vif, avec de meilleures aptitudes défensives, il apporte en prime un playmaking d’une rare acuité sur le poste de pivot. Puisque Portland joue déjà avec un pivot capable de distribuer et de ressortir proprement avec Nurkic, pouvoir enchaîner sur les mêmes schémas avec son back-up pourrait s’avérer très précieux.
Résultat, alors que l’an dernier la franchise ne semblait posséder qu’une valeur sûre, son back-court, elle a complètement consolidé son roster et notamment, sa raquette.
Focus sur la saison 2020-21 des Blazers
Rester dans l’élite
L’an passé, malgré une saison décevante sur le plan comptable, tout n’était pas à jeter, loin s’en faut. Si, en 2018 – 2019, l’équipe faisait partie de l’élite offensive de la ligue (3eme, 113,7 d’off rating), eh bien… c’était également le cas (3eme, 113,2 d’off rating) l’an dernier. Depuis plusieurs saisons, la paire Lillard-McCollum fait partie des tandems les plus intenables de la Ligue. Avec deux joueurs capables de créer pour eux même, pour autrui et de dégainer de n’importe où, Terry Stotts n’a jamais eu à se creuser la tête pour imaginer son schéma de jeu. Comme les Rockets, comme les Mavericks avec Doncic, les Trail Blazers possèdent une attaque où l’essentiel des ballons passent par les mains d’un ou deux joueurs.
Avec beaucoup de joueurs capables de sanctionner les aides sur le porteur de ballon, en continuant d’additionner des joueurs polyvalents balle en main, les Blazers peuvent prétendre à être encore sensiblement meilleurs que les saisons précédentes. En effet, plusieurs jeunes éléments, particulièrement Gary Trent Jr et Anfernee Simmons sont susceptibles d’effectuer des progrès tangibles cette saison. A cela, il faut ajouter Nurkic, Collins (courant janvier pour lui) et Hood de retour, les additions sur les ailes et Carmelo Anthony qui a prolongé. Si les minutes pourraient parfois être compliquées à dispatcher, il va sans dire que les Blazers n’ont probablement jamais eu une telle densité de joueurs offrant des certitudes en attaque à la fois dans le cinq de départ et sur le banc.
Évidemment, on peut se dire que posséder un système centré quasi-exclusivement sur la création de ses deux arrières est presque dommageable compte tenu des différentes greffes apportées par l’intersaison. Toutefois, peu probable de voir Portland changer une recette qui gagne. La franchise continuera probablement de posséder le plus faible ratio de passe de la ligue (grande habituée de la 30eme place en la matière), obligeant tout joueur autour de Lillard et McCollum d’exister essentiellement sans ballon.
Le chantier défensif
L’an dernier, Portland possédait le 18eme defensive rating de la Ligue. Espérer frapper un grand coup dans une conférence ouest aussi dense en encaissant plus de 114 points pour 100 possessions est très compliqué. Et en dépit d’une attaque de feu, les Blazers n’ont finalement accroché la post-saison que grâce à des équipes en dilettante dans la bulle.
Cette saison, pourtant, le problème est reconnu à tous les niveaux de la franchise.
“Je pense que CJ et moi devons prendre le défi défensif plus sérieusement”. – lançait la semaine dernière Damian Lillard.
“En tant qu’équipe, je pense que ça vient des guards – les guards doivent faire un meilleur travail quand il s’agit de défendre. Cela commence avec Dame et moi”. – ajoutait McCollum.
Après une saison compliquée, le message semble être reçu par les principaux concernés. En effet, la paire Lillard-McCollum, l’une des plus harassantes à tenir de la Ligue possède une problématique majeure : ni l’un, ni l’autre n’a la faculté à réaliser des missions défensives. Or quand vos deux extérieurs représentent des cibles pour les équipes adverses, cela complique énormément la tâche du front-court qui doit compenser les brèches. Plusieurs bonnes nouvelles néanmoins : la qualité des ailiers et du pivot dans le cinq cette saison permet d’envisager des aides de meilleure qualité et une protection de la raquette plus solide. Par ailleurs, si le back-court n’est pas excellent en défense, il n’est pas à ranger dans la catégorie des cas désespérés : loin s’en faut.
A ce titre, il est peut être nécessaire de rappeler, qu’il y a deux saisons, sans avoir un effectif plus impressionnant en la matière, les Trail Blazers avaient terminé avec un défensive rating de 109.4. Pas de quoi approcher le top 10 défensif, mais de quoi ne pas se reposer uniquement sur son attaque.
Évidemment, Terry Stotts et son staff devront faire mieux. Les bonnes attaques ont connu une inflation depuis l’an passé et son banc ne présente pas réellement de spécialiste en la matière. Le défi est bien entré dans les têtes. Il convient maintenant de trouver des solutions pour repasser dans la première moitié de la Ligue a minima.
Un effectif trop dense ?
Une question qui rappelle la difficulté de construire un roster NBA. L’an dernier, après un été difficile à négocier, les Blazers s’étaient retrouvés quelque peu exsangues en talent. Problèmes d’équilibre, manque de profondeur sur certaines positions, auxquels les blessures se sont ajoutées. La saison de Portland s’en est largement ressentie et pourtant, c’est un problème inverse qui pourrait se poser cette saison.
En récupérant du monde, accueillant des blessés sur le retour, Portland est passé dans une autre dimension. Qui n’est pas non plus sans source d’interrogations. On sait comme la vie d’un groupe et les satisfactions personnelles sont importantes dans la vie d’une équipe. Or, en l’état, 13 des 15 joueurs du roster peuvent prétendre à des minutes de jeu en NBA. Cet état de fait peut sous-entendre une situation délicate pour les coachs. Soit la nécessité de distribuer des minutes trop faibles, soit de faire jouer plusieurs joueurs certains soirs et pas d’autres, soit établir une hiérarchie claire et accepter les aspects néfastes de l’insatisfaction.
Au choix, les Trail Blazers pourraient donc avoir des rotations trop larges, trop instables, ou une partie du vestiaire rongeant son frein. Si ce scénario n’est pas une certitude, c’est pourtant une problématique à laquelle ils pourraient faire face. Ce qui est une force face aux blessures et parfois un problème quand tout va bien.
Au final, quel(s) objectif(s) ?
Si l’on excepte l’anomalie de l’année dernière, on imagine que les objectifs des Trail Blazers seront les mêmes que par le passé. Avec une seule superstar, les chances de titre de Portland apparaissent toujours comme maigres. Pour autant, ce sera sûrement l’objectif affiché de la franchise qui va à nouveau courir après l’avantage du terrain afin de maximiser ses chances de se retrouver dans le dernier carré.
La saison régulière sera à la fois l’occasion de cimenter les rotations d’un effectif qui a connu diverses additions, mais aussi d’éprouver une jeunesse nombreuse qui va jouer un rôle majeur derrière les habituels cadres de la franchise. Anfernee Simmons, Gary Trent Jr. et Harry Giles devraient, en particulier, avoir une carte à jouer pour cette saison.
De quoi devenir enfin, un contender sérieux ? Le doute est permis, mais il faudra de toute façon compter sur les Blazers pour viser le podium de l’Ouest. Et ce malgré l’effrayante concurrence qui se dresse devant l’Oregon.
L’avis éclairé, avec @BlazersFr
Gros été pour la franchise, quelle a été l’addition la plus importante selon toi ?
Robert Covington. Il vient combler un très grand nombres de manques. Sa capacité à défendre sur le poste où il y a le plus de joueurs Elite en NBA va nous être d’une très grande utilité (surtout quand on sait que Lillard et McCollum ne sont pas de grands défenseurs), il peut aussi défendre 1-4 sans problème, et on a vu à Houston cette saison que même lorsque ça switch et qu’il se retrouve face à des 5 près du cercle il reste dissuasif grâce à son timing et sa grande envergure (2.18m).
En plus, il va nous apporter énormément sur le jeu de transition (interception / contre attaque), son jeu offball et ses qualités de catch & shooteurs. Le complément parfait de Lillard et McCollum finalement + Jusuf Nurkic (qui va régaler RoCo en attaque). C’est le fit parfait à mes yeux pour l’équipe et pour le joueur.
Dans une conférence Ouest toujours plus dense, où se situe Portland cette saison ?
Il y a plusieurs facteurs à gérer cette saison, à commencer par le contexte sanitaire. A l’image de la NFL, il se peut qu’un ou plusieurs joueurs soient touchés par le COVID et ça bouleverserait toute la hiérarchie avec des absences de quelques semaines. Donc compliqué d’avoir des certitudes dans ce contexte si particulier mais si on gère bien à ce niveau et qu’on est épargnés par les blessures, on a clairement l’effectif pour finir dans le Top 4 à l’Ouest.
S’il y avait un dernier poste à renforcer en vue des Playoffs, ce serait lequel ?
Si Neil Olshey a fait le choix de commencer la saison à 14 c’est qu’il estime qu’il n’y a pas vraiment de trou dans l’effectif actuel et qu’il décide de garder de la flexibilité en cas de blessure. Je suis plutôt du même avis, mais si on doit vraiment sortir un poste ça serait celui de meneur. La franchise fait confiance à Anfernee Simons mais si jamais il venait à décevoir, il se pourrait qu’au cours de la saison nous allions chercher du renfort.