On savait les Raptors capables de rester compétitifs malgré le départ de Kawhi Leonard, et c’est un euphémisme de dire que ce fut le cas. Sûrs de leurs forces et de leurs qualités, particulièrement défensives, les canadiens nous ont offert une bonne petite saison régulière des familles, meilleure que celle du titre si l’on en croit le ratio victoires/défaites.
La solution au départ de The Klaw ne pouvait qu’être collective, alors tout le monde s’en est donné à cœur joie. Pascal Siakam, propulsé de facto leader de l’équipe, a connu le frisson du All-star Game pour la première fois de sa carrière, pendant que Fred VanVleet s’imposait comme un lieutenant des plus crédibles (17.6 points). Avec un Lowry encore très sérieux malgré le poids des années, et une raquette Gasol-Ibaka qui connaît le métier par cœur, les Raptors ont été infernaux à jouer pour à peu près tout le monde.
Cependant, la postseason a soulevé son lot de questions. Entre fin de cycle et doutes sur la capacité des jeunes à peser lorsque l’enjeu se fait maximal, l’élimination en demi-finale de conférence a eu le don de semer le trouble quant à la suite des opérations. L’intersaison s’annonçait importante pour Toronto, quels enseignements tirer de celle-ci ?
In & out : le point sur le roster
Ils ont quitté l’équipe : Marc Gasol, Dewan Hernandez, Rondae Hollis-Jefferson, Serge Ibaka, Malcolm Miller,
Ils ont rejoint l’équipe : Aron Baynes, DeAndre’ Bembry, Henry Ellenson, Malachi Flynn, Jalen Harris (two-way), Alex Len, Alize Johnson, Yuta Watanabe (contrats non garantis)
Le roster à ce jour :
Meneurs : Malachi Flynn, Kyle Lowry,
Arrières : Terence Davis, Jalen Harris, Patrick McCaw, Norman Powell, Matt Thomas, Fred VanVleet,
Ailiers : OG Anunoby, DeAndre’ Bembry, Oshae Brissett, Stanley Johnson, Yuta Watanabe,
Ailiers forts : Chris Boucher, Henry Ellenson, Alize Johnson, Pascal Siakam,
Pivots : Aron Baynes, Alex Len.
Les tendances de l’automne
Les principaux chantiers n’étaient pas compliqués à identifier : re-signer Fred VanVleet, et se débrouiller pour garder une raquette de qualité malgré un budget serré.
Pour le premier point, on ne peut pas dire que le doute ait plané très longtemps. Comme on s’y attendait, FVV prolonge l’aventure canadienne en s’octroyant une belle augmentation de salaire au passage (85 millions sur 4 ans). La somme est importante mais pas outrancière compte tenu des contrats actuels en NBA, surtout pour un joueur aussi méritant. Il fallait valider cette formalité administrative, c’est chose faite.
La situation est plus délicate à l’intérieur. On sentait Marc Gasol sur le départ après sa série compliquée face aux Celtics, sa signature chez les Lakers n’est donc pas une immense surprise. En revanche, le départ de Serge Ibaka, qui apportait encore 15 points, sa menace extérieure et sa défense chaque soir, fait mal. Nick Nurse perd là un membre très important de sa rotation, et la direction a dû faire avec les moyens du bord pour combler le vide.
La free agency 2020 ne regorgeait pas de gros noms et une fois les Montrezl Harrell et Tristan Thompson passés, il fallait avoir le nez fin ou tenter des paris. Masai Ujiri a jeté son dévolu sur Aron Baynes, qui a certes régalé la Terre entière durant sa pige en tant que titulaire chez les Suns, mais qui n’en demeure pas moins, historiquement, un joueur de devoir. Au sortir de deux saisons émaillées par les pépins physiques (62 matchs ratés en cumulé), le pivot Australien offre certaines garanties mais il ne faudra pas lui demander la lune.
Pour achever l’opération “remplissage de peinture”, Toronto a prolongé Chris Boucher, puis s’est attaché les services de l’espoir déchu Alex Len ainsi que d’Henry Ellenson, en quête de temps de jeu après avoir échoué à s’imposer chez les Pistons. Il y a une régression certaine sur le papier, mais il ne serait pas surprenant de voir Nick Nurse nous faire encore des merveilles avec ce groupe.
Focus sur la saison 2020-2021
Quelques rafistolages dans la muraille
L’habitude de voir les Raptors posséder une défense monstrueuse année après année, comme s’il s’agissait d’un fait acquis, tend à faire oublier le travail nécessaire au quotidien pour pérenniser l’excellence.
Compte tenu des mouvements de l’intersaison, le système paraît promis à plusieurs ajustements. On le rappelle, l’équipe a perdu l’intégralité de sa rotation – et quelle rotation ! – au poste de pivot, position un chouilla importante quand il s’agit d’empêcher l’adversaire d’introduire le ballon dans le panier. Il faudra recréer des automatismes, et mettre tout ce beau monde sur la même longueur d’onde au niveau de l’aide, des switchs, de la défense sur les écrans, et ainsi de suite.
Entendons-nous bien. La question n’est pas de savoir si la défense de Toronto continuera d’être bonne, voire très bonne. Avec les joueurs en place, c’est une évidence. Il s’agit simplement de se demander si elle pourra maintenir le niveau élite qui lui a permis de se hisser à un match des finales de conférence. Cette différence subtile se joue sur des détails et même s’il y a sur le banc quelqu’un de plutôt qualifié pour mettre en place une organisation efficace, il sera intéressant de surveiller ce point lors des premières semaines de compétition.
Qui veut du temps de jeu ?
Si le cinq majeur semble clairement établi, aucune hiérarchie ne se dégage chez les remplaçants. Avec deux titulaires âgés de 34 ans, Nick Nurse sera obligé de trouver des role players fiables. Cependant, parmi la foule d’options à sa disposition, seuls Norman Powell et Chris Boucher semblent pour le moment assurés d’obtenir des minutes.
Sur les extérieurs, le coach se heurte à une pénurie de tireurs extérieurs. Bembry, Johnson, McCaw ou encore Brissett ont des qualités, mais il n’y en a pas un pour rattraper l’autre dans le domaine du tir à trois points, composante essentielle du jeu de Toronto en 2019-2020 (37 tentatives par match, 6e en NBA). De plus, il faudra faire souffler Kyle Lowry, ce qui laisse supposer Siakam ou VanVleet comme porteur de balle principal avec un besoin de spacing aux alentours.
Dans ce contexte, Matt Thomas aura l’occasion d’obtenir un rôle dans la rotation grâce à sa précision extérieure, à condition toutefois de ne pas trop affaiblir l’édifice défensif canadien. Terence Davis, fraîchement élu dans la All-Rookie 2nd team, aura aussi une belle carte à jouer. Norman Powell a été très bon en sortie de banc la saison dernière et ses responsabilités seront sans doute renforcées. Il y a bien moyen de bricoler quelque chose d’intéressant avec tout ça, non ?
Le secteur intérieur présente par contre un problème de profondeur évident. Une blessure d’Aron Baynes laisserait Chris Boucher et Alex Len comme seule rotation viable, une phrase qui n’est pas censée vous rassurer. Compte tenu de cette situation, l’option Siakam au poste 5, explorée la saison dernière, pourrait revenir plus fréquemment sur le devant de la scène, mettant ainsi à profit le réservoir d’ailiers. Si vous n’avez pas les joueurs requis pour votre système, à vous d’adapter votre système aux joueurs en place et Nick Nurse, coach de l’année en titre, en est largement capable.
Les joueurs à surveiller
Mine de rien, plusieurs Raptors jouent gros cette saison. Voici une liste non-exhaustive.
Pascal Siakam : le Camerounais a évolué à un niveau all-star durant la saison régulière mais a connu des playoffs très difficiles (17 points à 39% au tir et 19% à 3 points). Pour s’inscrire sur la durée dans la cour des grands, il doit trouver le moyen de peser sur les rencontres décisives. Cela passe notamment par une progression dans le jeu en isolation ; alors qu’il se classait 7e parmi les joueurs le plus fréquemment sollicités sur ces phases, on le retrouvait dans le ventre mou en termes d’efficacité, loin des standards des maîtres en la matière. Son adresse extérieure a également connu des fluctuations regrettables. Élevé au rang de franchise player et payé en tant que tel, Siakam peut-il encore passer un cap ?
Fred VanVleet : ce nouveau contrat traduit la confiance de la direction, qui souhaite faire de lui la 2e option offensive derrière Siakam. On ne vous apprendra pas qu’il est plus difficile de confirmer que de surprendre dans la Grande Ligue, et c’est au tour de l’arrière de se confronter à cette réalité. Le backcourt qu’il forme avec Kyle Lowry devra encore tourner à plein régime si les Raptors veulent tenir le choc face aux machines offensives du pays. Pour cela, il n’y a pas trente-six solutions : FVV doit maintenir a minima sa production de la saison passée, et même faire un peu mieux si l’on anticipe un éventuel déclin de Lowry, voire une blessure de ce dernier.
OG Anunoby : Toronto a besoin de trouver un lieutenant pour épauler le duo Siakam – VanVleet dans le futur, et les regards se tournent inévitablement vers le britannique. Solidement installé dans le cinq majeur grâce à ses qualités défensives et athlétiques, il doit désormais affiner sa palette offensive pour devenir une menace soir après soir. On attend notamment de lui une plus grande aisance balle en main, afin d’être moins dépendant du collectif pour créer ses opportunités de tir. S’il ne signe pas d’extension d’ici le début de la saison, il sera agent libre restreint en 2021. En d’autres termes, l’ailier a 8 mois pour prouver qu’il mérite une place de choix dans le nouveau cycle à venir au sein de la franchise canadienne.
Au final, quel(s) objectif(s) ?
Même si l’on vient de s’amuser à semer l’incertitude dans vos esprits, il va de soi que Tampa Bay (et oui) restera une équipe redoutable, qui n’aura aucun mal à se qualifier pour les playoffs si elle est épargnée par les blessures.
L’ennui, c’est que le gratin de la conférence Est s’est épaissi. Philadelphie aura à cœur d’effacer une saison catastrophique, Brooklyn pourra enfin compter sur un effectif au complet, et les autres clients (Bucks, Celtics, Heat) n’ont aucune envie de descendre dans la hiérarchie.
Aussi habile Nick Nurse soit-il, aussi appliquée et rugueuse sera son équipe, il nous est difficile d’imaginer Toronto rééditer sa performance de l’an passé et terminer sur le podium, à moins d’une progression spectaculaire en interne. Nous n’avons par contre aucun mal à voir la franchise traîner aux alentours de la cinquième place, destinée à être une énorme épine dans le pied de n’importe quel contender qui croisera sa route lors des phases finales. A partir du moment où Kyle Lowry est sur le parquet, de toute façon…
Pour finir, il est important d’avoir à l’esprit que cette saison s’inscrit dans un projet plus grand. Toronto est en pleine transition entre deux cycles, et nous devrions assister à la phase finale du passage de flambeau entre les générations Lowry et Siakam. Une réalité renforcée par le fait que le meneur emblématique entre dans sa dernière année de contrat, tout comme Masai Ujiri, qui n’a donné aucune indication claire sur la suite qu’il souhaitait donner à sa carrière. La possibilité que Toronto perde les deux visages de la décennie écoulée à l’issue de cette saison existe bel et bien.
Mais en attendant, le GM est toujours là et sa mission est claire : faire en sorte que sa franchise reste compétitive malgré le changement de cycle, à l’approche d’une intersaison 2021 riche en free agents de renom. Pas réputé pour sa peur de trancher dans le vif, Ujiri a encore des cartes dans sa manche et il ne faudrait pas s’étonner de le voir tenter un ou deux coups de poker d’ici la trade deadline si la mayonnaise ne prend pas. L’excellence est à ce prix.
L’avis éclairé, avec @Miky_YG et @Raptors_FR
Quel est ton avis sur l’intersaison ?
@Miky_YG : Les Raptors avaient pour objectif principal de conserver Fred VanVleet et de garder du cap space pour 2021 en n’offrant que des contrats avec une seule année garantie pour tous les autres free agents. C’est à mon grand regret ce qui a causé le départ de Serge Ibaka, qui a accepté un challenge sportif plus intéressant pour lui avec un contrat de deux ans. Marc Gasol de lui même a indiqué qu’il ne pensait plus être en mesure d’apporter ce que les Raptors attendaient de lui (un rôle majeur voire de titulaire avec un temps de jeu important) et a choisi un autre défi.
Au final la free agency a été bien gérée avec le profil de Baynes qui est intéressant et on fait confiance à Masai au sujet des paris tentés comme Len et Bembry. La draft de Malachi Flynn semble être un très bon choix. Donc au final objectifs remplis de resigner FVV et garder du cap space pour 2021 tout en gardant un effectif moins expérimenté (et moins fort ?) mais toujours compétitif.
Attends-tu des choses supplémentaires venant de Fred VanVleet, maintenant qu’il a signé un gros contrat ?
@Miky_YG : Fred VanVleet (comme SIakam) doit maintenant justifier son contrat. On pourra dire qu’il est trop payé s’il ne répond pas aux attentes cette saison. Evidemment on en attend plus, on attend encore une progression dans son jeu offensif. Personnellement j’aimerais le voir ajouter du tir mi-distance dans son arsenal et plus de variété dans son jeu de pénétration qui est bon mais prévisible (un floater serait le bienvenu par exemple). Il doit aussi améliorer sa gestion du pick and roll. Défensivement il est déjà très solide, on attend qu’il continue ainsi.
@Raptors_FR : On attend qu’il apporte un registre supplémentaire à l’équipe, il doit travailler sa création et ne pas se faire avoir par les acquis qu’il a. On attend de lui un peu plus de création, d’inventivité offensive et aussi un jeu de passe plus conséquent. Dans l’idée, il devrait step-up dans l’intégralité de son jeu. Les deux premiers matchs de la pré-saison ont montré qu’il avait faim alors à lui de continuer pour nous éblouir toujours plus et surtout de justifier son contrat !
Quelles faiblesses identifies-tu dans cet effectif ?
@Miky_YG : Gros point d’interrogation sur le secteur intérieur bien sûr. Boucher sera t-il au niveau attendu en tant que back up sur les postes 4 et 5 ? Les Raptors vont-ils parvenir à faire quelque chose de Len ? Baynes va-t-il être capable d’assumer un temps de jeu de titulaire et rester en bonne santé ? Siakam va-t-il retrouver son niveau pré-bulle? Beaucoup de questions sans réponse pour l’instant. La question du manque d’une superstar se posera certainement aussi à l’approche des playoffs.
@Raptors_FR : Les faiblesses sont sûrement à l’intérieur où notre secteur a été dépecé, ce qui est difficile à reconstruire en claquant des doigts. On en attend beaucoup de Baynes et Boucher, à eux de prouver qu’ils peuvent tenir la raquette et nous rendre sereins sur la question. Après le banc va aussi avoir besoin d’un Powell au top, c’est un des points nécessaires à une bonne saison des Raptors. En résumé, les faiblesses sont surtout des incertitudes mais les matchs de pré-saison ont prouvé que Nurse avait fait le travail pour rendre les gros mouvements de l’effectif indolore.
Quid des forces ?
@Raptors_FR : Difficile de ne pas citer le backcourt qui ne bouge pas avec un Lowry et un VanVleet en mène de reconnaissance. Le collectif sera aussi à mettre du côté des forces. Nurse est aussi un atout sans aucun doute, sa maîtrise tactique va beaucoup nous apporter. De plus, son staff est complet et équilibré, ce qui permettra aux Raptors de proposer un jeu complet et intéressant. On attend le début de la saison pour avoir des réponses à nos questions mais on est confiant !
OG Anunoby peut-il émerger comme le complément idéal du duo VanVleet – Siakam ?
@Miky_YG : Je prédis une breakout season, une saison de l’explosion pour OG qui a toutes les cartes en main pour s’imposer comme un joueur majeur de l’équipe cette saison. Il l’est déjà en défense et devrait avoir plus de responsabilité en attaque. Je prends le pari qu’il sera candidat au titre de MIP et dans une des all NBA defensive teams, peut-être même en course pour le DPOY, même si ces dernières années il revient plus à des intérieurs.
Quel serait le scénario idéal pour la saison à venir ?
@Miky_YG : La bonne réussite de cette saison va dépendre de l’évolution de beaucoup de joueurs. Le scénario idéal c’est donc de voir VanVleet, Siakam, OG, Powell, Boucher et des joueurs surprises tous avoir un niveau supérieur à la saison dernière dans une attaque qui tourne mieux grâce à l’apport du nouvel assistant offensif Chris Finch. Avec une défense toujours dans ce qui se fait de mieux en NBA, les Raptors créent la surprise en éliminant une équipe plus forte qu’eux sur le papier en demi-finale de conf. Une saison qui se finirait ne serait-ce qu’en finale de conf serait une saison parfaite et réussie. Sinon j’espère au moins une demi-finale à l’Est.
Comment rendre la franchise la plus attractive possible lors de la free agency 2021 ?
@Raptors_FR : Il y aura deux points importants, le premier sera de faire logiquement une bonne saison pour prouver que des mouvements à la FA, même les plus gros (cf Ibaka et Gasol), ne font pas vaciller un collectif. Ensuite il faudra dans un second temps espérer que Masai ait un plan et qu’il ponce son BlackBerry pour nous amener le joueur qui changera le visage et la dimension de cette équipe. C’est bête à dire mais on doit juste avoir confiance dans notre équipe et notre FO pour cette saison, un partie de notre destin est entre nos mains mais rien n’est complètement fait surtout suite à l’extension de Giannis.