Depuis 1946 et la création de la National Basketball Association, quelque cinq mille joueurs ont foulé les parquets de la Grande Ligue. Certains d’entre eux ont laissé une empreinte indélébile qui ne sera jamais oubliée. D’autres sont restés bien plus anonymes. Entre les deux ? Des centaines de joueurs, qui ont tour à tour affiché un niveau de jeu exceptionnel, mais dont on oublie bien souvent la carrière.
Dès lors, @BenjaminForant et @Schoepfer68 ont décidé de dresser – littéralement – le portrait de certains de ces acteurs méconnus ou sous-estimés. Au total, ce sont 60 articles qui vous seront proposés : un par année, entre les saisons 1950 – 1951 et 2009 – 2010. Pour chaque saison, un joueur a été sélectionné comme étendard, parfois en raison d’une saison particulièrement réussie, d’une rencontre extraordinaire ou encore d’une action historique …
Chaque portrait s’inscrira dans une volonté, celle de traverser l’Histoire de la NBA de manière cohérente. Ainsi, ces portraits (hebdomadaires) seront publiés dans un ordre précis : un meneur, un arrière, un ailier, un ailier-fort, un pivot. Au bout de cinq semaines, c’est donc un cinq majeur qui sera constitué. Les plus matheux d’entre vous l’aurons compris : au final, ce seront douze équipes, toutes composées de joueurs ayant évolué au cours de décennies distinctes, qui auront été composées.
A vous de déterminer lequel de ces cinq majeurs sera le plus fort, le plus complémentaire, le plus dynastique.
Vous trouverez en fin d’article les liens vous permettant de (re)consulter les articles précédents.
La jaquette
Pour chaque article, @t7gfx vous proposera ses créations. Vous y retrouverez une illustration du joueur présenté (en tête d’article) ainsi qu’une présentation de chaque cinq majeur projeté (chacun avec une identité visuelle propre).
Le synopsis
Après avoir passé plusieurs semaines dans les entrailles de la Ligue, entre Hudson, Heinsohn, Stokes et Martin, nous revoici à une période plus contemporaine. Celle qui a vu Larry Bird et Magic Johnson réaliser leurs premiers pas. Celle du renouveau d’une NBA souffrante d’une crise médiatique sans précédent. Celle où le meilleur joueur offensif était indubitablement George Gervin.
Il est clair et net que the Iceman est infiniment plus connu par la sphère basketball que ceux qui l’ont précédé dans les colonnes du Magnéto. Peut-être que certain(e)s d’entre vous le trouvent bien trop fort pour coller avec la ligne éditoriale que nous avons souhaité embrasser depuis désormais plus d’un an. En effet, comme d’autres avant-lui d’ailleurs, Gervin semble trop talentueux pour que nous en parlions aujourd’hui. Et pourtant, l’ancien arrière de San Antonio est un sempiternel mésestimé ; dans le paysage NBA, que nous parlions de scoring ou de classement all-time, il est fréquent d’attendre (trop) longtemps avant de voir surgir le nom du célèbre numéro 44.
Né le 27 avril 1952, George Gervin était un arrière / ailier filiforme de 2m01 pour 84 kilos selon les manifestants, 77 selon la police. Comme c’est trop souvent le cas, le basketball constitua une sorte d’exutoire dans sa tendre enfance, vécue dans la précarité à Détroit. Scoreur incroyable, nous en avions brièvement parlé il y a désormais près d’une année, lorsque nous évoquions la carrière de David Thompson, avec lequel il livra un génialissime mano à mano pour remporter le titre de meilleur scoreur de la saison 1977 – 1978.
Aux abris, les paniers vont pleuvoir.
Action !
La carrière universitaire de Gervin n’est pas exempte de tout repos. Lui, l’enfant pauvre du Michigan, a traversé la moitié du pays pour jouer sous les couleurs de la California State university. Il n’y restera pas suffisamment longtemps pour qu’on puisse véritablement le considérer comme un joueur de l’université. Non pas qu’il n’eût pas le niveau pour en enfiler le maillot, bien au contraire. Comme Larry Bird quelque années plus tard, le choc des cultures vint à bout de lui. Le luxe de la Californie n’avait alors pas grand chose à avoir avec les conditions précaires du Michigan. En quelque sorte, Détroit – Los-Angeles, c’était un peu son Manhattan – Kaboul.
Comme un étudiant qui se rend compte à Noël que le droit administratif ne sera pas fait pour lui, Gervin rentra très rapidement dans son chez lui natal, pour intégrer la faculté d’East Michigan. Il est, à ce jour, sans aucun doute, le joueur le plus connu à être passé par les Eagles, où il y restera deux saisons. La seconde est d’ailleurs exceptionnelle, avec 29,5 points et 15,3 rebonds de moyenne, à 59,4 % au tir. Autant dire que le bonhomme avait l’impression de jouer avec des enfants.
Et pourtant, c’est un comportement enfantin qui l’éjectera du circuit universitaire. En effet, après avoir collé sa plus belle droite sur le coin du menton d’un illustre inconnu répondant au nom de Jay Piccola, Gervin fût suspendu de toute compétition pour une durée d’un an. En cette époque, il y avait donc une galaxie d’écart entre les sanctions prononcées en NCAA et celles auxquelles les plus férus des bagarreurs étaient condamnés en NBA.
Quoi qu’il en soit, pour éviter de passer une année sur le flanc, l’arrière intégra une Ligue mineure mais néanmoins professionnelle : la Eastern Basketball Association. Il y évolue sous le maillot des Pontiac Chaparrals. C’est là, en 1972 – 1973, qu’il attira l’œil des premiers scouts, en plantant 50 points sous les yeux des représentants sportifs des Squires de Virginia, éminente franchise de la ABA, Ligue directement concurrente à la NBA.
Cependant, les Squires, qui remportèrent le titre ABA sous le nom de Oakland Oaks en 1969 sont, en 1972, dans une belle panade financière. Une panade telle que le front office échange ses deux stars de l’époque, Swen Nater et Julius Erving (s’il-vous-plaît), contre du cash pour se sauver de la banqueroute. Elle fera d’ailleurs la même chose un peu plus d’une année plus tard, en vendant George Gervin aux Spurs de San Antonio pour 228 000 $, somme rondelette pour l’époque. C’est ainsi qu’il poursuivit sa carrière sous les couleurs noirs de la franchise Texane, alors pensionnaire de ABA.
Il termina cette seconde saison professionnelle avec 23,4 points, 8,5 rebonds et 2 passes décisives, en étant l’un des tous premiers à user du tir à trois-points, qui existait déjà en ABA. Une ligne statistique qui lui permet d’être drafté en NBA en 1974, en 40ème position, par les Suns de Phoenix, qu’il ne rejoindra jamais. En effet, en cette époque, les contrats étaient plus juteux du côté de la ABA ; c’était d’ailleurs le principal argument de la Ligue pour attirer certains joueurs reconnus.
C’est ainsi que Gervin évolua encore deux saisons dans celle que l’on peut considérer, a posteriori, comme la petite sœur. Il prit la bonne habitude de faire ce qu’il réalisera ensuite pendant 10 saisons en NBA : des cartons offensifs en veux-tu, en voilà. Dans une équipe où on retrouve également Swen Nater et George Karl, le futur Iceman n’est pas le dernier lorsqu’il s’agit de planter 50 points sur la truffe hagarde de son vis-à-vis. Bien qu’âgé seulement de 22 ans, il s’impose comme l’un des 10 meilleurs scoreurs de la Ligue, derrière George McGinnis, Julius Erving ou Artis Gilmore.
Si les Spurs se qualifieront assez aisément en playoffs, il n’y feront pas long-feu, puisqu’ils s’inclineront dès le premier tour face aux Pacers d’Indiana, futurs finalistes malheureux, où évolue McGinnis. La série, remportée 4 – 2 par Indiana, fût d’ailleurs le théâtre d’un feu d’artifice offensif des deux hommes :
- George McGinnis : 38,3 points, 18,8 rebonds et 9,2 passes en 44,6 minutes de moyenne ;
- George Gervin : 34 points, 14 rebonds, 1,3 passe décisive en 46,3 minutes de moyenne.
Pour la dernière saison d’existence de la ABA, qui s’apprête à fusionner avec sa grande sœur, l’arrière restera dans les standards qui furent les siens, et fût à nouveau éliminé au premier tour des playoffs, par les Nets de New-York (4 – 3), au sein desquels on retrouve un Julius Erving triple MVP en titre.
En tout et pour tout, George Gervin aura disputé 269 rencontres ABA, pour des moyennes de 21,9 points, 7,4 rebonds, 2,2 passes décisives, 1,4 interception et 1,6 contre. Il en est triple All-star et fût nommé, à ce titre, dans la ABA All-Time Team, qui est une sélection des 30 meilleurs joueurs de l’Histoire de la seconde Ligue.
Arrive donc la saison 1976 – 1977. Les Spurs, et donc leur arrière phare, disputent leur première saison NBA. A l’occasion, San Antonio conserve l’immense majorité de son roster, mais enregistre également l’arrivée de Louis Dampier au poste de meneur. Vétéran, Dampier a évolué 9 saisons chez les Kentucky Colonels, et est également membre de la ABA All-Time Team. Sur le papier, le renfort est de taille. Sur le parquet, Little Louie ne parviendra jamais à opérer la transition en NBA et n’occupera qu’un rôle anecdotique à la mène des Spurs.
Cet exercice symbolise à merveille la “période Gervin” au Spurs. Ainsi, San Antonio présente la plus haute PACE de la Ligue, avec 111,8 possessions disputées par soir. A cet égard, l’équipe affiche également le 3ème offensive rating parmi les 22 équipes. Cependant, et c’est un mal que nous retrouverons lors de la décennie suivante chez les Nuggets, les brèches défensives étaient si grosses qu’elles venaient compenser les exploits offensifs (20ème defensive rating).
Voir San Antonio jouer à la fin des seventies, c’était l’assurance de voir des points en pagaille. Par exemple, sur les 82 rencontres de saison régulière, les Spurs scorèrent au moins 100 points à 71 reprises. On les retrouve à 120 points ou plus en 32 occurrences. Il leur fallait bien ça pour gagner la rencontre ; lorsque les hommes de Doug Moe (le futur entraîneur du run & gun des … Nuggets des années 1980 !) inscrivaient moins de 107 points, il perdaient la rencontre 92 % du temps (23 fois / 25).
Dans ce festival de paniers, Gervin possède le bracelet V.I.P. Manifestement pas gêné par le changement de Ligue – et de jeu, par conséquent – il s’installe dans le top 10 des meilleurs scoreurs de l’année, avec 23,1 points par soir. Ses performances individuelles, mais également les bons résultats collectifs des Spurs, l’envoient au All-star game 1977, au cours duquel il inscrivit 0 point (0 / 6 au tir) pour la seule et unique fois de sa carrière.
Il devra cependant encore se montrer patient pour passer, pour la première fois de sa carrière, le premier tour des playoffs. En effet, si les Spurs parvinrent à se faufiler en 5ème place de la Conférence … Est, ils seront sweepés (2 – 0) par les Celtics, dans une série surdominée par JoJo White, meneur des verts.
Nous venons de terminer de narrer la 5ème saison professionnelle de George Gervin. Nous nous apprêtons surtout à entrer dans un tout autre monde. Le numéro 44 était une star ? Il va devenir l’une des têtes les plus incontournables de la Ligue. Il était excellent scoreur ? Il va s’imposer comme la référence en ce domaine. Reste désormais à voir si San Antonio va, dans le sillage de son arrière, passer un cap collectif.
Nous passerons rapidement sur l’exercice 1977 – 1978. En effet, c’est à l’issue de celui-ci que Gervin vint à bout de David Thompson pour devenir – pour la première fois de sa carrière – meilleur scoreur de la NBA. Notons tout de même qu’en plus de sa régularité exceptionnelle au scoring (69 fois au dessus des 20 points en 82 rencontres), l’homme de glace profita de la dernière et ultime rencontre de la saison pour passer 63 points à la défense du Jazz (défaite – 21 tout de même).
Au-delà du total, que rares sont ceux qui l’ont dépassé (Barry, Baylor, Booker, Bryant, Chamberlain, Jordan, Maravich, Robinson, Thompson), la manière est tout bonnement extraordinaire. Pour rappel, Gervin devait scorer 58 points a minima pour être nommé meilleur scoreur de la saison. En effet, un peu plus tôt dans la journée, Thompson avait conclu sa saison avec 73 points, mettant par-là la pression sur son meilleur ennemi.
C’est ainsi que l’arrière texan démontra qu’il pouvait donner deux acceptations à son surnom d’Iceman. Aux racines du sobriquet, on retrouve un de ses coéquipiers, qui énonçait que de la glace coulait dans les veines de Gervin, qui pouvait planter 35 points sans jamais transpirer. Pour les multi-sports contemporains, pensez à Roger Federer, capable des plus belles prouesses sans jamais – semble-t-il – transpirer ou être essoufflé. Il en allait de même pour Gervin à la fin des années 1970.
On peut aussi, postérieurement à ce 9 avril 1978, donner un second sens à ce surnom : le sang-froid. Il fallait scorer 58 points ? Il en inscrivit 20 dans le premier quart-temps, et 33 (record de l’époque) au cours du second. 53 points à la mi-temps, merci bonsoir. Il se trouve alors à 6 points du record de Chamberlain (59, le soir où il en scora 100 en 1962). Ces 100 points peuvent-ils tomber ?
Que nenni. Gervin en plantera encore 10 en début de 3ème quart-temps, avant de ne plus reposer ne serait-ce qu’un orteil sur le parquet. 63 points, en 33 minutes, à 23 / 49 au tir et 17 / 20 aux lancers. Inarrêtable.
Il ne baissera plus jamais le pied. Après une nouvelle élimination au premier tour de la post-season, il attaqua l’exercice 1978 – 1979 les deux pieds dans le phare, avec 35 points de moyenne sur la première quinzaine. Depuis son arrivée en NBA, la moyenne au tir a d’ailleurs explosé, passant au-dessus des 54 % de réussite.
Il faut dire que George Gervin a fait de l’attaque du cercle une certaine forme d’art. Sa spécialité ? Le finger roll, cette variante du lay-up qui s’avère – en réalité – bien plus technique qu’on pourrait le croire. Il s’agit ainsi pour celui qui pénètre de faire glisser le ballon jusqu’au bout des doigts, pour imprimer un effet à la balle, qui permet non seulement d’éviter le contre, mais également de toucher la planche pour terminer par terre, après avoir transpercée le panier. Encore aujourd’hui, si vous tapez finger roll NBA dans votre moteur de recherche favori, c’est le nom de George Gervin qui sera cité comme étant celui qui l’a utilisé le mieux.
Dès lors, c’est bel et bien l’enfant du Michigan qui termine en tête du nombre de paniers scorés à l’issue de la saison (947 paniers). Et puisqu’on le retrouve également à la 6ème place du meilleur convertisseur de lancers, c’est pour la seconde saison consécutives qu’il est élu meilleur scoreur de l’exercice : 29,6 points de moyenne. En cette époque, où la domination des grands s’estompent petit à petit, il est le 5ème membre d’un back-court à dominer la Ligue aux nombres de points scorés (et en terme de moyenne / match). Sa marque de 29,6 points est d’ailleurs historique pour un arrière du 20ème siècle, qui n’est guère battue que par Jordan et Nate Archibald.
Prenez garde, l’auteur est fourbe et la dernière phrase est un mensonge. Parce que Gervin ne s’est pas arrêté en si bon chemin, et s’apprête à réaliser une de ces saisons dont on se souvient ad vitae aeternam. En 1979 – 1980, il score 40 points ou plus à 18 reprises (pic à 55 points). En comparaison, on ne le retrouve sous les 25 points qu’en 13 occurrences. Le tout sans jamais transpirer.
Au final, il va gratifier la NBA, et l’ensemble de ses fans, de la 18ème meilleure saison au scoring de tous les temps, avec 33,1 points de moyenne. Depuis 1980, seuls Jordan (trois fois), Bryant (une fois) et Harden (deux fois) ont fait au moins aussi bien. Signe que le jeu de la Ligue s’est, petit à petit, déporté vers les postes arrières. En effet, avant lui, seul Tiny Archibald (34 points par soir, 1973) avait réalisé une telle performance en étant positionné sur le back-court.
A son apogée individuel, Gervin est élu meilleur scoreur de la Ligue pour la 3ème fois de suite. L’accomplissement n’est pas si rare dans l’Histoire, puisqu’il a été réalisé à 9 reprises. Collectivement, si les Spurs sont enfin parvenus à vaincre le signe Indien la saison précédente, s’inclinant en demi-finale de conférence, ils retomberont dans leurs travers cette année-ci. La raison est toujours la même : meilleure attaque de la Ligue, mais également plus mauvaise défense. Ainsi, les Rockets viendront à bout de San Antonio dans un duel fratricide texan (2 – 1, Gervin à 33,3 points de moyenne).
En 8 saisons professionnelles, Iceman présente 25,3 points, 6,2 rebonds et 2,5 passes décisives de moyenne, à 51,3 % au tir et 83,4 % aux lancers. Il est triple meilleur scoreur de la Ligue, MVP du All-star game (1980) et présent à trois reprises sur le podium du classement du MVP : 2ème en 1978, à 15,5 points de Bill Walton, 2ème en 1979, loin derrière Moses Malone, 3ème en 1980 derrière Kareem Abdul-Jabbar et Julius Erving.
Énoncé autrement, à l’heure de plonger dans la saison 1980 – 1981, George Gervin est le meilleur extérieur du monde. Avec Erving, allez.
L’oscar de la saison 1980 – 1981
Top chrono ! Nous sommes deux des plus grands joueurs a avoir un jour joué en NBA. Nous sommes les deux seuls à avoir terminé 4 saisons consécutives en tant que meilleur scoreur. Nous sommes, nous sommes, nous sommes ?
Effectivement, George Gervin fait figure de favori ultime pour se succéder à lui-même et devenir le second – à l’époque, un indice chez vous – quadruple meilleur scoreur consécutif de la Ligue. Rares sont ceux qui peuvent légitimement, avant que les dragsters ne soient lancés, lui tenir tête : Moses Malone, Kareem Abdul-Jabbar, Julius Erving ou Adrian Dantley.
Difficile de dire que le natif du Michigan ne mit pas toutes les chances de son côté pour définitivement assurer son hégémonie dans le domaine. Dans sa foulée, San Antonio réalise un début de saison canon, avec 90 % de victoires après 10 rencontres. Pourtant, le roster n’est pas celui d’un contender au titre NBA. Certes, la traction arrière, composée de Gervin et de James Silas, a de quoi faire des envieux. Il est cependant compliqué, sans tomber dans l’emphase injustifiée, d’en dire autant des forwards. En effet, Mark Olberding, Paul Griffin et Dave Corzine ne laissèrent pas de trace indélébile dans l’Histoire de la franchise, ni dans celle de la Ligue.
Sur le banc, Doug Moe s’est vu montrer le chemin vers la porte, et fût remplacé par Stan Albeck. Le changement de coach n’entraînera pas un véritable changement de doctrine. Si les Spurs jouent moins vite (7ème PACE, 102,9), leurs forces et faiblesses demeurent les mêmes, et sont – du coup – connues de tous. Toutefois, à l’inverse des exercices précédents, où la perméabilité défensive globale prenait le pas sur l’excellence des inspirations offensives, il semblerait qu’en cette nouvelle décennie, les rouages se soient inversés.
C’est ainsi que les noirs semblent bien partis pour réaliser la meilleure saison collective de leur courte histoire NBA. De là à pouvoir légitimement prétendre au titre ? Sur le papier, cela semble compliqué. Non seulement – on l’a dit – l’équipe ne semble pas taillée pour performer au mois de juin, mais en plus la concurrence est féroce. A l’Ouest, les Suns et les Lakers font figure de favoris pour rejoindre les finales NBA. A l’Est, Bucks, Celtics et 76ers semblent un ton au-dessus. Cependant, derrière cette échappée à cinq coureurs, ce sont les Spurs qui prennent la tête du groupe des poursuivants.
S’il reste toujours aussi constant, Gervin semble cependant connaître plus de difficultés à atteindre les sommets des deux saisons passées. C’est ainsi qu’on le retrouve un peu plus souvent sous la barre symbolique des 20 points (17 fois, pour 64,7 % de victoires). De même, alors qu’il avait atteint, au moins à une reprise, les 50 points scorés lors des 3 dernières saisons, celle-ci semble un petit peu plus lointaine en 1980 – 1981.
Est-ce à dire qu’il ne score plus ? Bien évidemment que non. Au moment de célébrer l’année 1981, 40 rencontres ont été disputées. San Antonio a remporté 27 d’entre elles. Gervin, lui, est le troisième meilleur scoreur de la Ligue, avec 28 points par soir. Historiquement, une marque à 28 points par soir permet de terminer en tête du classement des scoreurs 22 % du temps. Pas cette année-ci, par contre ; un gap semble s’être creusé entre Dantley et ses 31,3 points et ses plus proches poursuivants.
Dès lors, sauf si l’ailier du Jazz venait à craquer, Gervin semble devoir faire une croix sur ses ambitions de quadruplé. Peu importe, serait-on tenté de dire, si les résultats collectifs répondent au rendez-vous.
A cet égard, San Antonio connaîtra une courte baisse de régime à la mi-janvier, avec 5 défaites en 6 rencontres. Ces défaites coïncident avec la méforme du franchise player maison qui, en panne d’adresse, enchaînera les petites performances (entre 17 et 26 points), hypothéquant par-là toutes ses chances de refaire son retard sur Adrian Dantley.
Reste que pour la 8ème année consécutive, Iceman est All-star. Il s’impose comme le meilleur joueur de l’Histoire de sa franchise, titre honorifique qu’il gardera jusqu’au tournant du siècle.
Pour s’assurer l’avantage du terrain en playoffs, San Antonio ne doit pas traîner en chemin. C’est chose faite, avec une fin de saison convaincante (19 victoires et 10 défaites post All-star break). Avec 52 victoires au total, les texans terminent ici leur meilleur exercice, ex-aequo avec 1977 – 1978.
Gervin termina 3ème au classement des meilleurs scoreurs de la saison, derrière Dantley et Moses Malone. Il figure dans la All-NBA 1st team pour la 4ème fois d’affilée. A ce palmarès individuel interminable, il convient désormais d’ajouter une breloque collective.
Grâce à cette troisième place de conférence, la franchise s’évite un premier tour des playoffs et se retrouve directement qualifiée pour les demi-finales de conférence, disputée contre les Rockets, tombeurs surprise des Lakers au tour précédent.
C’est ici un bizarrerie du système de l’époque. Ainsi, Los Angeles et ses 54 victoires dû disputer le premier tour, alors que les Spurs (52 victoires, pour rappel) en furent exemptés. Cela s’explique par le fait que les champions de division étaient, peu importe le bilan, directement qualifiés pour le second tour. Or, dans la division Pacifique (celle des Lakers), ce sont les Suns (57 victoires) qui terminèrent en tête.
Quoi qu’il en soit, San Antonio fait office de favori indiscutable dans cette demi-finale de conférence, face à une équipe qui présente un bilan négatif en saison régulière (40 – 42). Pourtant, la logique du papier n’est pas celle du terrain. D’ailleurs, entre novembre et mars, Houston gagna 50 % des confrontations du derby texan.
Les deux équipes jouèrent au chat et à la souris au cours de ces demi-finales. Jamais une franchise ne remporta deux matchs consécutifs. Dès lors, vous l’aurez compris, celle qui gagna le premier d’entre eux a, nécessairement, remporté le dernier. A ce petit jeu, ce sont les fusées de Malone et Murphy qui compostèrent leur billet pour la finale de conférence, puis pour la finale NBA. Gervin passa d’ailleurs à côté de son game 7, avec 21 points à 8 / 22 au tir (défaite 105 – 100).
Double désillusions, donc. Avant les Ewing, Barkley et autres Karl Malone, le numéro 44 se taille, petit à petit, cette réputation de monstre sans bague, celle des perdants magnifiques. Celle dont personne ne veut. Toutefois, il n’était pas encore l’heure du crépuscule, et l’homme de glace possédait encore une demi-décennie pour poser les mains sur le trophée Larry O’Brien.
Le générique de fin
Spoiler : il n’y parviendra pas. En effet, vous n’êtes pas sans savoir que les Spurs remporteront leur premier titre NBA en 1999, grâce notamment à l’apport immédiat d’un Tim Duncan exceptionnel.
Ce n’est pas pour autant que la fin de carrière du numéro 44 est un long chemin morne. Pour commencer – si l’on peut dire ainsi – sa saison 1981 – 1982 est une nouvelle masterpiece, qui le vit inscrire au moins 40 points à 16 reprises. A l’issue des 79 rencontres qu’il disputa, il inscrivit la bagatelle de 2 551 points. C’est-à-dire le 24ème total de l’Histoire. On le retrouve d’ailleurs également en 21ème position, avec ses 2 585 points de l’exercice achevé en 1980.
Tout ceci pour dire que pour la 4ème et dernière fois de sa carrière, Gervin fût meilleur scoreur de la NBA. Mieux encore, il fît sa première incursion en finale de conférence ; à nouveau exemptés de premier tour, les Spurs vinrent à bout des Sonics en demi-finale (4 – 1). Malheureusement, lors de la dernière marche avant les NBA Finals, les Lakers de Magic, Worthy et Abdul-Jabbar étaient largement supérieurs (4 – 0). Gervin termina sa campagne avec 29,4 points, 7,3 rebonds et 4,5 passes décisives.
La saison suivante sera une sorte de rebelote grandeur nature. A quelques exceptions près. Désormais âgé de 30 ans, l’arrière ne transpire pas plus, mais laisse la jeunesse se bagarrer à qui marquera le plus de points. Enfin, manière de parler, puisqu’on le retrouve tout de même en 4ème position (26,2 points, derrière Tripucka, Vandeweghe et English). Les Spurs échoueront à nouveau en finale de conférence face aux Lakers (4 – 2) après avoir appris la vie aux jeunes Nuggets de Doug Moe au tour précédent (4 – 1).
Il faut dire que depuis deux saisons, Gervin n’est plus l’unique franchise player de l’équipe, lui qui fût rejoint par Artis Gilmore – certes vieillissant – dans le Texas.
Cette défaite en finale de conférence scelle la fin de la “génération Gervin” aux Spurs. Non pas que le bonhomme prit immédiatement sa retraite. Cependant, plus jamais San Antonio aura de résultats collectifs probants avec son arrière star. Pourtant, celui-ci resta encore deux saisons au sein de l’équipe, pour 25,9 et 21,2 points de moyenne.
A l’instar d’Ewing ou d’Olajuwon, il fût tradé le 24 octobre 1985 aux Bulls de Chicago contre Dave Greenwood. On ne répètera jamais assez qu’il est honteux de trader une légende. Car c’est effectivement le terme adéquat :
- Hall-of-famer : intronisé en 1996 ;
- Membre des 50 greatest de 1996 ;
- All-star, à 12 reprises ;
- All-NBA Team, à 7 reprises : 5 fois dans la première, 2 fois dans la seconde ;
- ABA All Time Team de 1997 ;
- Meilleure scoreur, à 4 reprises ;
- Numéro 44 retiré à San Antonio ;
- 9ème meilleure moyenne de points en carrière : 26,18 points par match ;
- 7ème meilleure moyenne de points en playoffs : 27 points par match.
Crédits et hommages
Soyeux, gracieux, créatif, inarrêtable. Voici les quatre adjectifs par lesquels le hall-of-fame commence son hommage à George Gervin. Le décor est placé. Comment expliquer, dès lors, que le bonhomme passe tellement souvent sous les radars ? Quels sont les arguments qui permettent d’occulter sa carrière, alors qu’il faisait mieux que de regarder dans les yeux les meilleurs de ses contemporains ?
Le principal intéressé donne peut-être lui même indirectement la réponse :
“Je ne dunkais jamais. La seule chose que je pouvais faire, c’était un finger roll”.
La réponse se trouve peut-être donc dans le jeu déployé par the Iceman, pas franchement spectaculaire. Pourtant, l’argument ne semble pas convaincant. C’est peut-être un de ces éléments irrationnels qu’on peine à expliquer. Quoi qu’il en soit, il en reste pour saluer l’exceptionnel joueur que fût Gervin :
“Je suis prêt à le payer pour le voir jouer”, Jerry West, 1982.
Finesse en lieu et place de la dimension physique XXL, mid-range en lieu et place d’un tir fiable à trois-points, l’ancien numéro 44 n’était peut-être pas fait pour la NBA d’aujourd’hui. Qu’importe, puisqu’à son époque, il en était le visage ?
Les précédents épisodes et portraits du Magnéto :
- Cinq majeur #1 : Penny Hardaway (1994/95), Manu Ginobili (2007/08), Terry Cummings (1988/89), Jerry Lucas (1964/65), Nate Thurmond (1974/75),
- Cinq majeur #2 : Jason Kidd (1998/99), Tracy McGrady (2004/05), Rick Barry (1966/67), Elvin Hayes (1979/80), Neil Johnston(1952/53),
- Cinq majeur #3 : Isiah Thomas (1989/90), David Thompson (1977/78), Paul Arizin (1951/52), Tom Gugliotta (1996/97), Yao Ming (2008/09),
- Cinq majeur #4 : Baron Davis (2006/07), Bill Sharman (1958/59), Chet Walker (1963/64), Gus Johnson (1970/71), Jack Sikma (1982/83),
- Cinq majeur #5 : Tiny Archibald (1972/73), Dick Van Arsdale (1968/69), Bernard King (1983/84), Jermaine O’Neal (2003/04), Larry Foust (1954/55),
- Cinq majeur #6 : Fat Lever (1986/87), Richie Guerin (1961/62), Grant Hill (1999/00), Dan Issel (1971/72), Ben Wallace (2002/03),
- Cinq majeur #7 : Lenny Wilkens (1965/66) (Lenny Wilkens, bonus : le coach), Calvin Murphy (1975/76), Peja Stojakovic (2001/02), Shawn Kemp (1991/92), Arvydas Sabonis (1995/96), (Arvydas Sabonis, bonus n°1 : la carrière européenne), (Arvydas Sabonis, bonus n°2 : la carrière internationale).
- Cinq majeur #8 : Kevin Porter (1978/79), Tom Gola (1959/60), Xavier McDaniel (1987/88), Bob Pettit (1955/56), Vin Baker (1997/98),
- Cinq majeur #9 : Stephon Marbury (2000/01), Michael Cooper (1984/1985), Lou Hudson (1973/1974), Tom Heinsohn (1962/63), Maurice Stokes (1957/58),
- Cinq majeur #10 : Slater Martin (1953/54),