Depuis 1946 et la création de la National Basketball Association, quelque cinq mille joueurs ont foulé les parquets de la Grande Ligue. Certains d’entre eux ont laissé une empreinte indélébile qui ne sera jamais oubliée. D’autres sont restés bien plus anonymes. Entre les deux ? Des centaines de joueurs, qui ont tour à tour affiché un niveau de jeu exceptionnel, mais dont on oublie bien souvent la carrière.
Dès lors, @BenjaminForant et @Schoepfer68 ont décidé de dresser – littéralement – le portrait de certains de ces acteurs méconnus ou sous-estimés. Au total, ce sont 60 articles qui vous seront proposés : un par année, entre les saisons 1950 – 1951 et 2009 – 2010. Pour chaque saison, un joueur a été sélectionné comme étendard, parfois en raison d’une saison particulièrement réussie, d’une rencontre extraordinaire ou encore d’une action historique …
Chaque portrait s’inscrira dans une volonté, celle de traverser l’Histoire de la NBA de manière cohérente. Ainsi, ces portraits (hebdomadaires) seront publiés dans un ordre précis : un meneur, un arrière, un ailier, un ailier-fort, un pivot. Au bout de cinq semaines, c’est donc un cinq majeur qui sera constitué. Les plus matheux d’entre vous l’aurons compris : au final, ce seront douze équipes, toutes composées de joueurs ayant évolué au cours de décennies distinctes, qui auront été composées.
A vous de déterminer lequel de ces cinq majeurs sera le plus fort, le plus complémentaire, le plus dynastique.
Vous trouverez en fin d’article les liens vous permettant de (re)consulter les articles précédents.
La jaquette
Pour chaque article, @t7gfx vous proposera ses créations. Vous y retrouverez une illustration du joueur présenté (en tête d’article) ainsi qu’une présentation de chaque cinq majeur projeté (chacun avec une identité visuelle propre).
Le synopsis
L’Histoire des Hawks d’Atlanta est vaste. Certes, celle qui va, lors de la saison 2020-21, fêter sa 72ème bougie ne possède qu’un trophée Larry O’Brien dans le placard, néanmoins, au-delà de cet aspect collectif, les faucons ont vu passer une tripotée de superstars . Vous connaissez les plus connues : au sein de la capitale géorgienne, Bob Pettit, Dominique Wilkins et dans une moindre mesure Lenny Wilkens sont promus au rang de figures christiques. Derrière les trois échappés, le peloton est guidé par des joueurs moins connus mais primordiaux dans le vécu de la franchise.
Parmi ceux-là, Lou Hudson.
Baptisé Louis Clyde Hudson par ses parents, le jeune homme naquit le 11 juillet 1944 à Greensboro en Caroline du Nord, qui, pour votre culture générale, est jumelée avec Montbéliard. Cadeau de la maison. Doté d’un physique classique pour un ailier (1m96 et 95 kilos), Hudson était avant tout un athlète d’exception. Pour preuve, lorsqu’il arriva au sein de la James B. Dudley High School au début des années 1960, il intègre quatre équipes sportives, car en plus du basket, l’adolescent était particulièrement à l’aise au football américain, au baseball et au sprint.
Vous l’aurez compris, il choisira la voie de la balle orange. Son héritage multisport lui permettra, tout au long de sa carrière NBA, de posséder une vélocité et une rapidité peu commune pour la fin des sixties. Il développera, en sus, un tir presque létal et une gestuelle qui lui vaudra le surnom de Sweet Lou.
Action !
Courtisé par la faculté de North Carolina, Hudson choisira finalement de passer ses trois saisons NCAA au nord du pays, au sein de l’université de Minnesota du célèbre coach John Kundla. Il est alors l’un des tous premiers afro-américain à y évoluer et, a fortiori, à s’y imposer. Il est, avec Archie Clark, le joueur majeur de l’effectif. Sa saison sophomore parle d’elle-même : 23,3 points, 10,3 rebonds à 50 % de réussite au tir et une place au sein de la première équipe de sa conférence, mais également dans les All-Americain Team.
Son exercice junior sera marqué par une fracture de la main droite, sa main de tir. Visiblement pas plus embêté que cela, il ratera 7 rencontres, avant de terminer la saison (17 matchs) avec la main dans le plâtre… en tirant de la main gauche. Ce n’est pas sans rappeler la performance de Larry Bird un soir de Saint Valentin 1986, du côté de l’Oregon.
Hudson n’atteindra pas les sommets de son futur homologue bostonien. Pour autant, ses prestations n’avaient rien à envier à celles de son exercice précédent : 20 points, 8 rebonds, avec une main en moins. Le seul moment où l’on pouvait remarquer que le bonhomme n’était pas gaucher, c’était sur la ligne des lancers : 65% de réussite, soit 13 points de moins qu’en 1964-65. D’ailleurs, cette saison-ci, il disputa une autre rencontre en étant blessé, puisqu’il termina celle remportée face à Purdue avec plusieurs points de suture posés sur le crâne suite à un énorme choc.
C’est ainsi avec l’étiquette d’ambidextre qu’Hudson se présente à la draft 1966, dont la tête de série sera Dave Bing (from Syracuse, sélectionné en 2è par les Pistons). Lou, lui, sera choisi deux picks plus bas, par les Hawks de Saint-Louis.
Il intègre une équipe vieillissante, bâtie autour de Wilkens, Guerin et Beaty, et sera immédiatement propulsé au poste d’ailier titulaire. Le succès ne sera pas immédiat, puisqu’il terminera sa première rencontre professionnelle avec 0 points dans une défaite face aux Bulls (à 0/6 aux tirs). Ce sera l’un des très rares ratés de celui qui aurait parfaitement pu terminer Rookie de l’Année. Pour se rattraper, il en inscrira 24 pour battre les Pistons de Bing, 5 jours plus tard.
Si les Hawks sont globalement moyens (un bilan en deçà de l’équilibre tout au long de la saison), leur jeune ailier connaîtra plusieurs coups de chaud. En témoigne la période qui s’étale du 16 décembre 1966 au 15 janvier 1967, où sur 16 rencontres il affiche 22,5 points, 5,3 rebonds et 2 passes décisives. Il profite d’ailleurs d’une revanche face à Chicago pour réaliser ce qui constitue alors sa plus belle performance : 34 points et 9 rebonds. Il en ira ainsi jusqu’à la fin de la saison régulière, terminée en fanfare avec deux rencontres à 38 points, mais surtout une masterclass à 41 points et 14 rebonds (18 sur 28 aux tirs) dans une énième défaite face à Cincinnati.
Si on exclut de la recherche les immenses baobabs des années 1960 / 1970 (Chamberlain, Hayes, Abdul-Jabbar et consorts), ils ne sont que 6 à ne pas être considérés comme “intérieur” à avoir réalisé un 41 / 14 en tant que rookie : Rick Barry (3 fois), Elgin Baylor, Derick Coleman, John Drew (2 fois), Bernard King et Lou Hudson. En élargissant le spectre, c’est-à-dire en tenant compte des intérieurs, nous n’avons vu qu’un seul rookie réussir une telle performance au 21ème siècle : Blake Griffin (2 fois). Plus globalement encore, depuis Hudson (6 mars 1967), seuls 19 rencontres se sont clôturées avec un 41 / 14 d’un primo-débutant. Parmi eux ? Kareem Abdul-Jabbar (5 fois), Michael Jordan, David Robinson ou Shaquille O’Neal.
C’est Dave Bing qui remportera le trophée de Rookie de l’Année., mais avec du recul, le débat pouvait exister entre Bing et Hudson. Certes, le futur maire de Détroit présente une ligne statistique plus impressionnante que celle de son homologue d’Atlanta (20pts, 4,5 rebonds, 4 assists contre 18,4/5,5/1,2 pour Lou), mais alors que Detroit terminait sa saison au fin fond de sa conférence (30 victoires pour 51 défaites), Atlanta décrochait un strapontin pour les playoffs (39-42).
Les Hawks sweepèrent les Bulls, avant de céder face aux Warriors de San Francisco (4 – 2).
Pour sa première campagne de playoffs, Hudson n’oubliera pas de briller, en témoignent ces performances au scoring lors des 5 premières rencontres : 26, 29, 24, 36 et 24 points, soit une moyenne de 27,8 points. Une marque peu commune dans l’Histoire, où il rejoint un clan des plus select ; celui des meilleurs scoreurs sur les 5 premières rencontres de playoffs. Il y rejoint Michael Jordan (39,15pts de moyenne), Wilt Chamberlain (37,4), LeBron James (36,4), Kareem Abdul-Jabbar (36,2), George Mikan (36), Rick Barry (33,8), Allen Iverson ou Luka Doncic (29,6).
Il y a bien moins à dire sur sa saison sophomore. Entre blessures récurrentes et service militaire, le numéro 23 ne disputa que 46 rencontres avec un temps de jeu moyen atteignant péniblement les 10 minutes. Ce fût le calme avant la tempête : une tempête qui durera 7 saisons et qui coïncide – le hasard est parfois cocasse – avec la création de l’échelle de Saffir-Simpson, qui sert à mesurer la force des ouragans dans l’hémisphère ouest de notre globe. Nouvelle anecdote pour briller en soirée, servie par la maison.
Fini les blessures, exit l’armée, Hudson est de retour aux affaires et fera preuve, pour cette saison 1968-69, d’une régularité à toute épreuve.
A la sortie du mois d’octobre, c’est sur un rythme d’All-Star que l’ailier navigue : 25 points, 8 rebonds, 54 % de réussite au tir. Collectivement, cela restera moyennasse jusqu’à la fin de l’année (12 victoires, 15 défaites). Les fêtes de fin d’année 1968 seront synonymes d’un immense regain de forme de l’équipe dirigée par Richie Guerin : dans le sillage de son ailier (24,6 points et 7,1 rebonds sur la période), Saint-Louis remporta 18 des 20 matchs suivants. Au All-star break, les Hawks peuvent très largement viser les playoffs (26 victoires, 17 défaites).
C’est donc tout naturellement que la franchise est doublement représentée au All-Star Game. D’ailleurs, aucune franchise ne sera plus représentée lors de cette édition 1969. C’est donc accompagné de Joe Caldwell, joueur méconnu et pourtant quadruple All-Star, qu’Hudson dispute son premier match des étoiles. Il en ressortira avec la défaite, mais aussi avec 13 points et 0 perte de balle.
Avec 48 victoires au final, les Hawks font figures de dauphins des Lakers à l’Ouest.
Le premier tour des playoffs sera disputé face aux Rockets de San Diego, au sein desquels un jeune rookie du nom d’Elvin Hayes fait quelques émules. Celui-ci inscrit d’ailleurs 31 points pour son premier match de post-season. Sauf qu’en face, Hudson en mettra 39 dans la musette de San Diego, pour repartir avec la victoire. Puisque nous y sommes, sachez que c’est George Mikan qui détient la meilleure marque pour une première en playoffs : 37 points. Chamberlain, lui, s’est contenté de 35 points et … 27 rebonds.
Atlanta s’en sortira en 6 rencontres pour aller défier les Lakers de Chamberlain, Baylor et West en Finale de conférence. Les deux premières rencontres sont perdues à l’arrachée (-2 les deux fois). Derrière, LA déroula pour aller défier, et perdre, en Finales NBA face aux Celtics.
Que peut-on dire de plus pour la saison suivante ? Au rayon des similitudes, on retrouve le bilan collectif en saison régulière (48 victoires, 34 défaites), une qualification en finale de conférence et un sweep sec contre les Lakers. Dans celui des nouveautés, Atlanta récupère en cours de saison le pivot dominant qui lui manquait depuis le déclin de Zelmo Beaty : John Arthurs est ainsi échangé pour ramener Walt Bellamy en Géorgie, la franchise ayant déménagé à Atlanta.
Du côté d’Hudson, la constance est toujours de mise. Par contre, c’est désormais dans l’excellence que Sweet Lou s’inscrit. Le début de saison est MVPiesque : après un mois de compétition, l’enfant de Greensboro présente 30 points, 5 rebonds et 5 passes décisives de moyenne, à 55,7 % au tir. Surtout, il a réalisé en date du 10 novembre 1969 ce qui se révélera, au final, être le meilleur match de sa carrière.
Atlanta reçoit des Bulls menés par le duo Chet Walker – Bob Love. On se souvient, pour l’anecdote, qu’Hudson disputa son premier match professionnel face à Chicago, pour 0 points scoré. 218 rencontres plus tard, c’est une toute autre limonade : 57 points, 8 rebonds, 8 passes décisives à 25/34 aux tirs et le tir de la gagne à une poignée de seconde de la sirène finale (133-132). La prestation est historique et confine au légendaire, comme vous vous en rendrez compte avec le tableau ci-dessous :
Remarquons au passage que Rick Barry n’était qu’à une passe décisive de réaliser l’un des triples doubles les plus incroyables de tous les temps.
Lou Hudson est fort, Lou Hudson est clutch, et on pourrait presque se demander ce qu’Atlanta pourrait souhaiter de plus. Pour l’heure, la réponse s’amuse du côté de l’université de l’État de Louisiane, mais en attendant la draft 1970, Sweet Lou va disputer son second All-Star Game, en tant que titulaire pour le compte de la conférence Ouest.
Une sélection d’ailleurs particulièrement méritée dans le 5 majeur de la plus prestigieuse des équipes, et qui sera suivie de consécrations individuelles en fin de saison.
- Au classement du MVP tout d’abord ; si celui-ci est dominé par le trio Willis Reed, Jerry West et Kareem Abdul-Jabbar, Hudson se retrouve en 7è position, en étant d’ailleurs classé en 1ère position à 2reprises. Ses statistiques ? 25,4 points, 4,7 rebonds, 3,5 passes décisives à 53 % aux tirs, ce qui fait de lui le 5è meilleur scoreur de la saison. Il justifie pleinement son surnom en présentant le 4è true shooting percentage de la Ligue.
- Au sein de la All NBA 2nde Team ensuite, aux côtés de quelques jolis noms comme Oscar Robertson, John Havlicek ou Kareem Abdul-Jabbar. C’est Gus Johnson, dont nous vous parlions il y a quelques mois, qui occupe le poste 4 de cette équipe que personne n’a envie de jouer. En cette époque, en NBA, seul Billy Cunningham peut être légitimement considéré comme étant un meilleur joueur, au poste d’ailier, que Lou Hudson.
Les plus observateurs l’auront compris, il nous reste encore 3 saisons à présenter avant de passer à la rubrique suivante. Puisqu’elles sont toutes très ressemblantes, aussi bien individuellement que collectivement, tentons de les analyser ensemble.
Commençons par l’aspect collectif.
Avec le 3è choix de la draft, le front-office fît le choix de sélectionner Pete Maravich. Un choix plus de logique tant l’arrière a surdominé la compétition universitaire ; en 4 saisons, Pistol Pete affiche 44,2 points de moyenne : 43,6, 43,8, 44,2, 44,5. Sur le papier, Atlanta peut donc effrayer, puisque c’est un big-three que la franchise présente au coup d’envoi : Pete Maravich au poste d’arrière, Lou Hudson à l’aile et Walt Bellamy, vieillissant, sous les cercles.
Pourtant, si comme depuis 1956, les Hawks iront en playoffs (une seule campagne ratée, en 1962), ils n’y brilleront pas. Au cours de nos trois saisons restantes (1971, 1972, 1973), la franchise s’inclina toujours au premier tour. A aucun moment, il y eut de véritable suspens. Les Knicks, champions en titre, s’imposeront sans jamais trembler du poignet (4-1), malgré un Hudson en 26/7. Les deux saisons suivantes, ce sont Boston et Havlicek qui viendront à bout de la franchise Géorgienne (4 2 à chaque fois).
Quid individuellement, du coup ?
Nous avions quitté un Sweet Lou à 25,5 points de moyenne en 1970. L’arrivée de Pete Maravich, ainsi que l’installation de Walt Bellamy dans la raquette auraient pu avoir un impact négatif sur son nombre de tickets shoot. Vous aurez noté l’emploi du conditionnel, car en effet, il n’en sera rien. Jusqu’alors, il tirait au maximum 19,6 fois de moyenne par rencontre (1969-70). Il oscillera entre 20 et 22,8 entre 1971 et 1973. Et s’il tirera un peu moins bien, cet accroissement du nombre de tentatives suffira pour lui permettre d’augmenter – encore – ses moyennes statistiques.
Il participera, à chaque fois, aux matchs des étoiles, montant son compteur a 5 sélections consécutives. Sur la période (1969-1973), seuls deux autres joueurs ont participé à 100 % des All-Star Games : John Havlicek et Elvin Hayes – ndlr : il en va de même pour Jerry West, mais celui-ci n’a pas disputé le ASG 1970 en raison d’une blessure.
Au final, Super Lou va enchaîner 3 saisons de haute voltige. La plus belle – qui sera également la meilleure de sa carrière – est celle disputée en 1972-73 : 27,1 points, 5,4 rebonds et 3,4 passes décisives. En 75 rencontres, il inscrira 20pts à 64 reprises et dépassera les 30pts en 30 occurrences. Curieusement, sur ses 7 meilleures performances au scoring (entre 43 et 37 points), Atlanta s’est incliné 5 fois. A l’inverse, lorsqu’il scorait entre 31 et 36 points, la franchise s’est imposée absolument tout le temps (20/20).
Sans entrer dans les détails, précisons simplement que, statistiquement, on ne retrouve que 42 saisons d’un niveau équivalent à celle d’Hudson. Sans surprise, on ne retrouve (presque) que des légendes : LeBron James (10 fois), Elgin Baylor (5 fois), Kevin Durant (4 fois), Larry Bird, Karl Malone, Adrian Dantley (3 fois), John Havlicek, Tracy McGrady, Giannis Antetokounmpo (2 fois), Kawhi Leonard, Alex English, Charles Barkley, Paul George, Carmelo Anthony, Dominique Wilkins, Rick Barry et Jack Twyman (1 fois).
Pour terminer, parlons rapidement des playoffs 1973. Si, nous le savons, les Hawks se sont inclinés face aux Celtics (4-2), ce n’est pas faute pour Hudson de briller. La première rencontre se termina sur un blowout : 134-109 pour Boston, avec un John Havlicek unique : 54 points, 9 rebonds, 6 passes décisives à 66,7 % au tir. Prestation que seul … Donovan Mitchell a également réalisée, au mois d’août dernier.
Sans Havlicek, les Hawks auraient d’ailleurs pu caresser l’espoir d’une qualification. A l’ailier bostonien, Hudson et Maravich ont donné la réponse au cours des 6 rencontres. Sweet Lou, qui n’a plus passé le premier tour depuis 1970, termine sa série avec 29,7 points, 8 rebonds et 3 passes décisives à 46 % au tir. Nous en reparlerons ci-dessous, mais pour l’heure, il affiche de meilleurs statistiques en playoffs (52 rencontres) qu’en saison régulière.
Cependant, lui qui n’a connu que très peu de blessures dans sa carrière, approche de son crépuscule. Il lui reste – mais il ne le sait pas, bien évidemment – une seule saison de très haut niveau. C’est sur celle-ci que nous avons décidé de nous axer.
L’oscar de la saison 1973-74
Instant fanfiction : à l’étude des rosters, il s’avère que l’équipe des Hawks à l’aube de la saison 1973-74 présente des faiblesses là où l’effectif actuel semble être le plus fort. Ainsi, autour de Maravich, Hudson et Bellamy, on retrouvait Herm Williams à la mène et Jim Washington au poste 4. On en vient donc à imaginer, en 2020, une équipe Trae Young – Pete Maravich – Lou Hudson – John Collins – Walt Bellamy. Ça ne défend pas des masses, mais le spacing est incroyable. Pour Mike D’Antoni, cela ressemble à un rêve érotique. Trêve de What If.
On le sait désormais, le trio des Hawks donnait de meilleurs résultats sur le papier que sur le parquet. Il se murmure même que Maravich commence à avoir la bougeotte. C’est donc dans une situation d’urgence – ou presque – que se trouve la franchise dirigée par Cotton Fitzsimmons. Dans cette optique, les 10 premières rencontres sont encourageantes, puisqu’avec 7 victoires, Atlanta se trouve bien évidemment dans le peloton de tête de sa conférence.
Son ailier phare n’a d’ailleurs pas eu de retard à l’allumage, puisqu’il affichait déjà 75 points scorés après deux journées de compétition : 41 dans une victoire contre les Bullets en soirée inaugurale, 34 le surlendemain pour botter l’arrière-train or et violine (+27). Et puisque Maravich en avait inscrit 50 et Bellamy 45, cela nous faisait la bagatelle de 170 points pour le big three, soit le total de 2 rencontres disputées dans les années 1990.
Après un peu plus de 15 jours de compétition, Hudson est d’ailleurs le meilleur scoreur de la Ligue, avec 31,6 points de moyenne. Il connaîtra une légère baisse de régime d’une semaine, sans conséquence sur les résultats positifs des siens, avant d’enchaîner, à nouveau, six rencontres de très haut niveau (32,2 points, 6 rebonds 6,5 passes décisives, 3 victoires).
En vérité, tout va bien à Atlanta, cela jusqu’au 1e décembre, date de la 13è victoire de la franchise. C’est à partir de là que tout va commencer à partir à vau l’eau.
Difficile, d’ailleurs, de trouver une justification rationnelle à cette subite crise de résultats collectifs. On pourrait mettre ça, momentanément, sur le compte d’un road trip de 5 matchs à l’extérieur, tous perdus. Ce n’est cependant une explication satisfaisante qu’à court terme. En effet, le mois suivant, Atlanta chutera à 7 reprises en 9 rencontres, alors que 75 % des rencontres perdues ont été disputées à domicile.
Nous sommes à la mi-janvier, et Lou Hudson est à nouveau titulaire pour son sixième All-Star Game consécutif. Il y retrouvera son compère Pete Maravich. Ce sera l’une des rares bonnes nouvelles pour la franchise.
Pourtant, si le bateau Atlanta coule petit à petit, ce n’est pas faute pour son ailier de ramer. Et c’est là tout le problème de ces Hawks : avec 108,6 points scorés, Hudson et cie possèdent la 5è attaque de la Ligue (comptant alors 18 équipes). La problématique, c’est que les hommes de Fitzsimmons affichent la 14è défense. Dès lors, inutile de chercher plus loin pourquoi le radeau prend la flotte.
Cela n’ira pas en s’améliorant. Tels les pirates dans un album d’Astérix, les Hawks vont tenter de se réfugier au sommet du mât alors que la coque est déjà immergée. Les individualités, prises séparément, semblent pourtant faire le job. Maravich termine sa saison sur le podium des scoreurs de la Ligue. Hudson, lui, réalise à nouveau une série de 11 rencontres à plus de 30 points, 6 rebonds et 3 passes de moyenne. Cependant, les deux arbres ne cachent plus la forêt et, pour la seconde fois depuis un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître, les Hawks vont assister aux playoffs à la télévision.
D’ailleurs, étonnement, celui qui avait fait de la constance son crédo depuis 6 longues années a complètement craqué dans la dernière ligne droite. Il se blessa – certes – fin février, et son retour fût particulièrement catastrophique : 36 points scorés en 4 rencontres, dont une bulle contre les Knicks. Est-ce cela qui coûta la qualification aux Hawks ? Que nenni, Atlanta termina bien loin des Braves, derniers qualifiés à l’Est.
Deux statistiques sorties de derrière les fagots, pour terminer, si vous le voulez bien.
D’abord, en dépit des apparences, la ligne statistique d’Hudson en 1973-74 possède une portée historique : 25,4 points, 5,4 rebonds, 3,3 passes décisives et 2,5 interceptions, à 50 % aux tirs. Depuis, on ne retrouve trace que de 8 saisons au moins équivalentes : Michael Jordan (5 fois), Rick Barry et Clyde Drexler (2 fois).
Et c’est là que le bât blesse d’ailleurs, pour Hudson. Si l’on se concentre autant sur les statistiques, c’est qu’il n’y a pas grand chose d’autre à se mettre entre les molaires. Sur les 8 saisons en question, nous avons 3 titres NBA (Jordan x2, Barry), deux finales de conférence, une demi-finale de conférence et deux défaites au premier tour. Autrement dit, Hudson est le seul joueur de l’Histoire à présenter une telle ligne statistique sans aller en playoffs. C’est terriblement significatif de sa carrière où, hormis deux finales de conférence dans une NBA à 14 équipes (et où il suffisait de passer un tour pour être en finale de conférence), c’est un immense désert collectif.
Signe que tout aussi fort individuellement qu’il fût, il n’était pas apte à placer une franchise sur ses épaules.
Parce que oui, – et nous termineront là dessus – son prime était tout de même impressionnant. Sur six saisons, dans le seul art du scoring, il présente la 4ème moyenne de points et le 4ème total de points scorés. Devant lui, que des franchise player, Hall-of-famer, bagués et membres d’un top 40 all-time :
Cela permet de donner une plus grande résonnance encore à la célèbre phrase de Michael Jordan, qui affirmait que si la victoire fait lever la foule, c’est la défense qui fait gagner les titres. Les Lakers édition 2019-20 nous l’ont d’ailleurs encore prouvé. C’est globalement ce qui fît défaut aux Hawks version Hudson pendant une décennie : être incapable de faire le stop défensif qu’il fallait au moment idoine. D’autres, après lui, connaîtront cette problématique ; on pense, par exemple, aux Suns de Steve Nash.
C’est ainsi que se termina – tristement donc – la 8è saison professionnelle de Sweet Lou. On a eu l’occasion de le mentionner, la suite de sa carrière sera bien moins lumineuse. Nous pourrions d’ailleurs renommer provisoirement notre prochaine rubrique en “le générique d’une énième fin gâchée à cause d’un pépin physique”.
Après conciliabule, nous en sommes arrivés à la conclusion que c’était trop long, bien que cela aurait été particulièrement pertinent.
Le générique de fin
Ainsi, l’exercice suivant sera très court, puisqu’il y sera mis fin après 11 rencontres en raison d’une blessure qui le mettra sur le flanc pendant 9 mois. En son absence, la franchise était particulièrement démunie de joueurs de talent. En effet, Pete Maravich s’est fait la malle à l’issue de la saison précédente. Les deux meilleurs joueurs de l’équipe sont John Drew, cependant rookie et Tom Van Arsdale.
Hudson ne reviendra jamais à son niveau All-Star. Son âge le lui aurait pourtant permis (31 ans). Il effectuera encore deux saisons à Atlanta, en étant la troisième option offensive du roster, derrière Drew et Robinson. Néanmoins, les Hawks seront abonnés aux dernières places de la conférence Est.
Bien des années plus tard, on prête à Michael Jordan – décidément – la phrase suivante : “We don’t trade a legend”, manifestement pour parler de Patrick Ewing, que les Knicks eurent le culot de transférer après 15 saisons extraordinaires. La formule aurait presque pu s’appliquer à Hudson, auquel il manquait cependant de véritables résultats collectifs pour pouvoir prétendre au statut de légende des Hawks.
Quoi qu’il en soit, le jump shot le plus soyeux de la décennie (oui, c’est probablement exagéré) est envoyé à Los Angeles contre l’anonyme Ollie Johnson, ce qui, dans le jargon NBA francophone actuel, peut être considéré comme un blasphème.
Il disputera donc deux saisons chez les Lakers, aux côtés d’Abdul-Jabbar, Wilkes ou Cooper. Il prendra sa rentraite à l’issue de l’exercice 1978 – 1979 et n’aura donc pas, à ce titre, l’occasion d’évoluer sur le parquet avec Magic Johnson. Le timing de la retraite, a posteriori, laisse des regrets ; un an plus tard, les Lakers vinrent à bout des Sixers pour remporter le titre NBA qui manque tant au palmarès de Sweet Lou.
Il quitte donc la NBA, au sein de laquelle il a scoré 17.940 points. Cela représente aujourd’hui, 41 ans plus tard, le 77è meilleur total de l’Histoire. A l’époque, ils n’étaient que 12 a avoir scoré plus de points que lui, parmi lesquels on retrouve Chamberlain, Robertson, West, Pettit ou encore Bing. Plus encore, tant que nous y sommes, Hudson a terminé sa carrière longue de 13 saisons avec plus de 20 points de moyenne. Mine de rien, l’accomplissement ne court pas les rues. Aujourd’hui, parmi ceux qui sont définitivement éloignés des terrains, ils sont 43 à afficher au moins 20 points par soir (de 20,00 pour Mark Aguirre à 30,12 de Michael Jordan). Lorsqu’il rangea les basket, Hudson n’était que le 10ème à intégrer ce clan fermé.
Nous l’avons brièvement mentionné, mais l’ailier soyeux est également l’un de ceux qui se sublimait lorsque l’odeur des playoffs lui arrivait dans les narines. Certes, c’est relativement fréquent, notamment parmi les superstars. C’est, par exemple, le cas pour Jordan, Durant, West, Olajuwon, Nowitzki, Duncan ou Iverson. Quoi qu’il en soit, pour terminer sur les statistiques au scoring, il semblerait que la NBA n’ait vu que 34 joueurs (aujourd’hui à la retraite) qui sont parvenus à maintenir leur moyenne de points au-dessus de la barre symbolique de la vingtaine à la fois en saison régulière et en playoffs. A ce petit jeu, Hudson fait mieux que David Robinson, Tim Duncan, Bob McAdoo ou Mitch Richmond.
Aujourd’hui, si vous entendez parler de Sweet Lou, il y a de grandes chances que ce soit pour évoquer son jump shot. Le numéro 23 – retiré chez les Hawks – a évolué dans une NBA qui ne connaissait par le tir à 3 points. Nul doute, cependant, qu’il se serait admirablement adapté au tir derrière l’arc. En effet, ce n’est pas la distance qui lui faisait peur, comme l’indiquait Bill Bridges, un de ses coéquipiers :
“Dès que Lou mettait un pied dans le stade, il était à bonne distance pour marquer”.
La vidéo ci-dessous démontre avec pertinence – nous le croyons – pourquoi Hudson était surnommé Sweet Lou.
Crédits et hommages
Le titre de la vidéo est évocateur ; effectivement Lou Hudson est décédé d’une attaque cardiaque en 2014, à l’âge de 69 ans. Il reste comme l’un des tous meilleurs joueurs des Hawks, franchise qui, en raison de son âge, en a vu passer d’autres. Son palmarès est celui d’un joueur confirmé :
- All-NBA Team : à une reprise,
- All-star : à six reprises,
- Maillot retiré : n°23 à Atlanta,
- 13ème meilleur scoreur de l’Histoire : au moment de prendre la retraite.
Ses accomplissements pour le compte d’Atlanta dépassent très largement le fait d’avoir porté le maillot de la franchise pendant 11 saisons. Il a ainsi été, en son temps, mentor d’un jeune adulte qui a réalisé l’ensemble de sa carrière universitaire en Géorgie : Dominique Wilkins. C’est d’ailleurs peut-être la figure emblématique des Hawks qui parle le mieux de Sweet Lou :
“Il devrait être au Hall-of-fame. C’est inexplicable qu’il n’y soit pas. C’était un des tous meilleurs à son poste. Regardez sa carrière et ses chiffres, vous comprendrez ce qu’il a fait”.
En tout cas, vu les mensurations et le poste, il n’est pas improbable que désormais, où qu’ils soient, Hudson et Bryant disputent des un contre un endiablés. En attendant une intronisation posthume au hall-of-fame pour les deux joueurs ?