Depuis 1946 et la création de la National Basketball Association, quelque cinq mille joueurs ont foulé les parquets de la Grande Ligue. Certains d’entre eux ont laissé une empreinte indélébile qui ne sera jamais oubliée. D’autres sont restés bien plus anonymes. Entre les deux ? Des centaines de joueurs, qui ont tour à tour affiché un niveau de jeu exceptionnel, mais dont on oublie bien souvent la carrière.
Dès lors, @BenjaminForant et @Schoepfer68 ont décidé de dresser – littéralement – le portrait de certains de ces acteurs méconnus ou sous-estimés. Au total, ce sont 60 articles qui vous seront proposés : un par année, entre les saisons 1950 – 1951 et 2009 – 2010. Pour chaque saison, un joueur a été sélectionné comme étendard, parfois en raison d’une saison particulièrement réussie, d’une rencontre extraordinaire ou encore d’une action historique …
Chaque portrait s’inscrira dans une volonté, celle de traverser l’Histoire de la NBA de manière cohérente. Ainsi, ces portraits (hebdomadaires) seront publiés dans un ordre précis : un meneur, un arrière, un ailier, un ailier-fort, un pivot. Au bout de cinq semaines, c’est donc un cinq majeur qui sera constitué. Les plus matheux d’entre vous l’aurons compris : au final, ce seront douze équipes, toutes composées de joueurs ayant évolué au cours de décennies distinctes, qui auront été composées.
A vous de déterminer lequel de ces cinq majeurs sera le plus fort, le plus complémentaire, le plus dynastique.
Vous trouverez en fin d’article les liens vous permettant de (re)consulter les articles précédents.
La jaquette
Pour chaque article, @t7gfx vous proposera ses créations. Vous y retrouverez une illustration du joueur présenté (en tête d’article) ainsi une présentation de chaque cinq majeur projeté (chacun avec une identité visuelle propre).
Le synopsis
Drôle de choix, pourriez-vous vous dire. En effet, si vous n’êtes qu’observateurs lointains de l’Histoire de la NBA, le nom de Tom Gugliotta ne vous dit peut-être rien. Il se peut que le patronyme aux accents italiens vous échappe même si vous êtes un suiveur assidu de la Grande Ligue. Et pour cause, celui qu’on surnomme plus communément Googs n’a pas eu une carrière similaire à certaines légendes que nous avons déjà présentées dans le Magnéto (Isiah Thomas, Elvin Hayes, Jason Kidd …).
Et pourtant, s’il fut effectivement un joueur plus modeste que les superstars précitées, Tom Gugliotta était bon. Voire très bon, certaines saisons. Si l’on se souvient aussi peu de lui, c’est notamment parce que sa fin de carrière ressemble à un long chemin de croix. Afin de faire les choses dans l’ordre, commençons toutefois par présenter le profil de cet ailier-fort.
Dernier né d’une famille de sept enfants, Googs avait pour avantage de posséder toutes les mensurations d’un solide poste 4 de l’époque : 2m08 et 113 kilos. Aujourd’hui, il aurait été considéré comme un pivot moderne, puisqu’il était parfaitement capable de s’éloigner du cercle pour dégainer derrière l’arc. Le choix de consacrer sa vie au basketball n’est pas lié au hasard ; ses deux grands frères ont, eux aussi, été basketteurs professionnels (en Europe). C’est donc en suivant l’exemple des frangins, comme le font tous les enfants, que le petit Tom s’est mis à la balle orange.
Originaire d’Huntington Station, dans l’État de New-York, il ne quittera le cocon de sa ville de naissance qu’après le lycée. Il jouait en effet sous les couleurs de celle-ci en High School, avec un niveau et des résultats moyens. Au point que les portes (basketballistiques) de l’Université lui furent ouvertes, une fois n’est pas coutume, par un coup de téléphone. Alors que certains prospects sont courtisés par les facultés de tous le pays, Gugliotta intégra North-Carolina State grâce à un bon piston, et, bien entendu, quelques aptitudes. Ainsi, son père était un vieil ami de Jim Valvano, le coach controversé des Wolfacks, qui fit de son mieux pour accueillir le petit dernier de la famille au sein de son équipe.
C’est ainsi que commença véritablement la carrière professionnelle de Tom Gugliotta. Costaud, le joueur a tardé à exploser. Son sens du jeu, son adresse et sa pugnacité firent le reste.
Action !
Il passa ainsi quatre saisons au sein de l’Université de North-Carolina State. Il devint l’illustration parfaite de ce que l’on appelle la “montée en puissance”. Toutefois, pour cela, il est malheureusement nécessaire de commencer bas. Ainsi, sa première saison universitaire, comme souvent, ne laissait pas présager une grande carrière professionnelle. Googs ne passa que 171 minutes sur les parquets, réparties en 21 rencontres, et avec des statistiques faméliques. Une saison freshman qui se termina en Sweet 16, face aux Hoyas de Georgetown, qui possédaient alors une raquette dévastatrice, composée d’Alonzo Mourning et de Dikembe Mutombo.
Ce qui ne tue pas rend plus fort, disent les Sayans. S’il vient bel et bien de notre planète, Gugliotta fonctionne, semble-t-il, de manière similaire. Il quadruple presque son temps de jeu pour sa saison sophomore, devenant par la même occasion un bon joueur de rotation. Alors que Valvano le faisait évoluer au poste d’ailier, son successeur le décalera en tant qu’ailier-fort, avec une certaines réussite individuelle. Si les Wolfpacks ratent finalement le tournoi NCAA, Gugliotta termine sa seconde saison avec 11 points et 7 rebonds au compteur. Et la farouche motivation de faire mieux la saison suivante.
Chose qu’il fera, bien évidemment. Il explosera ensuite véritablement lors de sa quatrième et dernière saison universitaire, à l’issue de laquelle il sera meilleur rebondeur et second meilleur scoreur de sa conférence. C’est aussi au cours de cette année1991 – 1992 qu’il réalisera ses plus gros cartons à la fac, avec notamment un retentissant 36 points, 8 rebonds, 5 passes décisives, 4 interceptions et 2 contres dans une victoire (+11). Pourtant, les Wolfpacks, vainqueurs du tournoi NCAA du temps (pas si lointain) de David Thompson, sombrent petit à petit dans une léthargie collective, de laquelle ils ne sortiront qu’au début du 21è siècle.
Tom Gugliotta quitte l’Université après un cursus complet, et en étant, potentiellement, le second meilleur joueur de l’Histoire de North-Carolina State, derrière le susnommé Thompson. Il se présente donc à la draft 1992, qui n’était pas avare en talent. Nous y retrouvons énormément d’intérieurs dominants, tels que Shaquille O’Neal (Orlando, first pick), Alonzo Mourning (Charlotte, pick 2) ou Christian Laettner, véritable légende de Duke (Minnesota, pick 3). Derrière ce trio intouchable, ce sont les Bullets qui jetteront leur dévolu sur Googs, avec leur choix numéro 6. Derrière lui, nous retrouvons notamment Robert Horry en 11è position (Houston), Latrell Sprewell en 24è (Golden-State) et Matt Steigenga en 52è et antépénultième position (Chicago). Si le nom de Steigenga ne vous dit rien, vous pouvez vous renseigner sur sa fantastique aventure lors des playoffs 1997 avec les Bulls ici).
Lorsqu’il foule un parquet NBA pour la première fois, Gugliotta a donc déjà 23 ans. Un âge bien avancé à une époque où, même si ce n’était pas courant, les lycéens pouvaient être draftés. Il est coaché par une légende vivante des Bullets, Wes Unseld. Vous en conviendrez, en tant qu’intérieur rookie, il y a pire que d’avoir un ancien pivot MVP et MVP des finales comme coach.
Nous l’avons vu, Googs eu besoin d’un temps d’adaptation à l’Université avant de devenir un joueur impactant. Il n’en sera rien en NBA. Nous évoquions, lorsque nous avons dressé le portrait d’Isiah Thomas, ces joueurs qui parviennent à s’illustrer dès leur première rencontre dans la Grande Ligue. Gugliotta fait manifestement parti de c ette caste, lui qui ne se fit pas prier pour briller lors du premier match de la saison, face aux Hornets (défaite -7) : 20 points, 6 rebonds, 7 passes, 2 interceptions et 1 contre, à 9 / 12 au tir.
De belles performances et des défaites. Tel sera le combo qui définira l’exercice rookie du joueur, qui fut l’une des rares satisfaction de la morne saison des Bullets. S’il reste inconstant (4, 5 et 0 points lors de ses dix premières rencontres), il est également capable de prendre feu. Alors qu’il était un piètre passeur au début de sa carrière universitaire, il est devenu un intérieur altruiste, faculté qu’il parvient immédiatement à transposer chez les grands. Voici donc, pour conclure cette première saison terminée avec un bilan de 22 – 60, l’illustration du potentiel présenté par le nouvel ailier-fort de la capitale :
- 21 nov. 1992 (9è match) vs Utah : 39 points, 15 rebonds et 5 passes décisives à 17 / 24 au tir, dans une victoire (+17),
- 5 déc. 1992 (16è match) vs Indiana : 19 points, 12 rebonds, 11 passes décisives et 5 interceptions à 8 / 21 au tir, dans une défaite (-2),
- 30 janv. 1993 (41è match) vs Charlotte : 25 points, 14 rebonds, 4 passes décisives et 1 interception à 11 / 26 au tir, dans une défaite (-6),
- 31 mars 1993 (68è match) @ Indiana : 21 points, 7 rebonds, 9 passes décisives et 2 interceptions à 9 / 14 au tir, dans une défaite (-19).
Gugliotta fait donc parti de ces 70 rookies ayant réalisé un triple-double. S’il n’est pas rare de voir un intérieur rookie réaliser une telle performance avec les passes décisives (19 d’entre-eux l’ont fait), seuls quatre autres primo-débutants (Magic Johnson, John Wall, Gary Payton et Chris Paul) sont parvenus à rajouter au moins 5 interceptions. La statistique est certes tirée par les cheveux, mais possède l’unique mérite de démontrer sa facette de joueur all-around.
Il sera élu dans la all-rookie team, au sein de laquelle nous retrouvons d’ailleurs cinq des six premiers picks de la draft 1992. Seul Jim Jackson (4è, Dallas) manque à l’appel, en raison d’une saison tronquée par les blessures.
La saison 1993 – 1994 ressemblera à la précédente pour les Bullets, avec un bilan collectif affreux (24 – 58, avec, toujours, Wes Unseld à la baguette) et un Gugliotta bien à l’aise dans ses pompes. Alors qu’il frôla le double-double de moyenne pour son premier exercice (14,7 / 9,6 / 3,8), l’ailier-fort va, à nouveau, afficher de belles promesses. Il prend ainsi une nouvelle dimension au sein du roster de Washington, en étant le troisième scoreur de l’équipe (17,1 de moyenne), le second passeur (3,5), mais aussi le meilleur rebondeur (9,3) et intercepteur (2,2). Malheureusement, on l’a dit, les Bullets restent l’un des paillassons officiels de la Ligue. Leur reconstruction semble n’aller nul part et il manque une véritable star à la franchise.
Dès lors, à l’hiver 1994, c’est Tom Gugliotta qui est mis dans un package, avec trois premiers tours de draft pour attirer Chris Webber dans la capitale. Googs est ainsi envoyé chez les Warriors, qui restent sur une bonne saison (50 – 32). Il ne jouera que 40 rencontres sous le maillot bleu et jaune des Guerriers de la baie, pour 9 petites victoires et des performances moyennes. Un cocktail qui l’envoya, deux mois plus tard, du côté de Minnesota, en échange du rookie qu’était alors Donyell Marshall.
Après avoir subi deux transferts et effectué 7 100 kilomètres de trajet, le joueur désormais âgé de 26 ans pose ses valises du côté de Minneapolis, définitivement cette fois-ci. Et si l’instabilité de sa situation semblait avoir un impact sur ses prestations la saison précédente, Googs reprend ses vieilles habitudes sous le maillot des loups des bois. Dans un roster pas dénué de talent sur le papier (Terry Porter à la mène, Isiah Rider en arrière, Kevin Garnett à l’aile et Christian Laettner au pivot), Gugliotta s’intègre très rapidement, en réalisant quelques rencontres “Gugliottesques” :
- 10 nov. 1995 (4è match) vs Portland : 33 points, 17 rebonds, 5 passes décisives, 3 interceptions et 2 contres à 11 / 22 au tir, dans une défaite (-6),
- 24 nov. 1995 (10è match) vs Orlando : 29 points, 14 rebonds, 3 passes décisives, 1 interception et 3 contres à 12 / 21 au tir, dans une défaite (-11),
- 2 janv. 1996 (28è match) vs Houston : 25 points, 17 rebonds, 5 passes décisives, 2 interceptions et 3 contres à 11 / 19 au tir, dans une défaite (-5),
- 3 fév. 1996 (43è match) @ Dallas : 22 points, 20 rebonds, 1 passe décisive et 1 interception à 11 / 21 au tir, dans une victoire (+9).
Néanmoins, encore une fois, la franchise au sein de laquelle il évolue ne gagne pas. De sa carrière, il n’a pas encore connu une saison avec plus de 30 victoires. Cela s’explique principalement par le fait qu’il n’a pas encore joué avec un véritable franchise player. En effet, en cette saison 1995 – 1996, Kevin Garnett n’est encore qu’un rookie tout juste sorti du lycée. Il prendra toutefois vite l’étoffe du joueur dominant qui manquait tant à la carrière de Gugliotta. C’est ainsi qu’il nous convient d’aborder la saison 1996 – 1997, la meilleure de la carrière de Googs. Celle, aussi, où il était le meilleur joueur d’une franchise qui, à défaut d’afficher un bilan resplendissant, commence à montrer les crocs dans la conférence Ouest.
L’oscar de la saison 1996 – 1997
Ce nouvel exercice, s’il sera bien évidemment relié aux performances de son ailier-fort (phare), est également historique pour la franchise des Minnesota Timberwolves, à deux titres. Il s’agit ainsi, tout d’abord, du début de l’ère de Flip Saunders, qui prend les rênes du coaching, pour ne plus les lâcher avant 2005. C’est sous sa houlette que l’équipe de Minneapolis vivra ses plus belles heures, avec, comme point d’orgue, la finale de conférence disputée en 2004. Ensuite, nous y reviendrons, c’est à l’issue de cette saison 1996 – 1997 que les Wolves découvriront, pour la première fois de leur Histoire, les playoffs.
Vous l’aurez compris ; Gugliotta est intégré dans une équipe qui vise autre chose qu’une place dans le top 5 de la prochaine draft. L’effectif de Minnesota permet, en effet, de se projeter sur plusieurs années. Mieux, il est composé d’un potentiel big three aussi jeune que prometteur. Si, depuis le début de la décennie, c’est la franchise d’Orlando qui concentrait l’attention avec un duo juvénile et dévastateur (Shaquille O’Neal et Anfernee Hardaway), le départ du premier cité pour la cité des Anges fait de Minnesota l’une des darling de cette nouvelle saison.
Ainsi, le roster dirigé par Saunders est bâti autour de Stephon Marbury, qui, bien que rookie, s’est vu immédiatement confier la mène. Le poste d’ailier est toujours occupé par Kevin Garnett. Au poste d’ailier-fort, c’est Gugliotta qui est titularisé. Il ne va d’ailleurs pas attendre longtemps avant de se mettre en évidence, et de démontrer que si le futur de la franchise passera indéniablement par Marbury et Garnett, le présent, lui, se trouve entre ses mains.
Exit, la montée en puissance. Son début de saison aura pour mot d’ordre la régularité. Une régularité qui tranchera avec les résultats collectifs qui, eux, sont en dent de scie. Sur les sept premières rencontres de la saison, Googs en terminera quatre avec au moins 25 points et 10 rebonds. Des performances qui mèneront Minnesota à la victoire (4 – 3 de bilan) dans des rencontres souvent serrées. Alors que Kevin Garnett commence sa saison tranquillement, et que Marbury découvre le monde des adultes, c’est bel et bien Gugliotta qui mène la meute de loup.
Jusqu’où ? Telle est la question. Alors que Garnett est écarté de l’équipe pour cinq rencontres (pour autant de défaites), on se demande bien si les attentes placées dans ce roster pourront être récompensées par autre chose qu’une nouvelle déception. A l’heure de célébrer la nouvelle année, les Wolves semblent distancés, avec un bilan collectif de 13 – 18. Et encore, ce total est dû à une série, en cours, de 5 victoires sur les 6 dernières rencontres.
Malgré les déceptions collectives, Gugliotta répond présent. Mieux encore, il semble jouer le meilleur basket de sa vie, à l’heure de souffler sa 27è bougie. Voici ses statistiques, brutes et avancées, des deux premiers mois de la saison (du 1e nov. 1996 au 3 janv. 1997) :
Alors que, pour l’heure, il n’avait jamais inscrit plus de 17,1 points par saison (saison sophomore), voilà que Googs prend les clés de la franchise en attaque. Du pur point de vue des statistiques brutes, il évolue d’ailleurs à un niveau que l’on peut qualifier d’All-star : 22,3 points, 8,9 rebonds, 3,6 passes décisives, 1,6 interception et 1,2 contre, en 45 / 40 / 83 % au tir.
Ce bon statistique au scoring s’explique aisément. Il tente sa chance 16,9 fois en moyenne par rencontre, contre 13,2 fois depuis le début de sa carrière. Son adresse, elle, est restée sensiblement la même. De plus, alors qu’on pouvait lui reprocher un manque d’agressivité dans l’attaque du cercle, il provoque désormais 7,9 lancers-francs par rencontre sur cette période (+3,1 par rapport à la saison précédente). Le mélange de ces deux éléments nous donne quelques prestations de choix, dont celle du 3 janvier 1997 sur le parquet du TD Center de Boston : 32 points, 17 rebonds, 7 passes décisives, 3 interceptions et 1 contre, à 7 / 15 au tir et 18 / 20 aux lancers. Or, alors que ce genre de match se soldait généralement par une défaite lors de ses passages à Washington ou Golden State, Minnesota est reparti de la côté Est avec la victoire (+10) dans la besace.
Malgré un loupé à Toronto (8 points et 9 rebonds en 31′ de jeu), Gugliotta parviendra encore à hausser son niveau de jeu sur ce mois de janvier 1997. Dans son sillage, les loups se mettent à gagner et parviennent à afficher un bilan équilibré pour la première fois depuis le 14 novembre. Replacé dans la course à la post-season, Minnesota va être récompensée, avec deux joueurs sélectionnés pour le All-star game : Kevin Garnett et … Tom Gugliotta.
C’est ainsi que l’ailier-fort va prendre part à son premier – et unique – match des étoiles, disputé le 9 février 1997 à Cleveland. Cet All-star game reste dans toutes les mémoires comme celui où furent désignés les 50 greatest, les 50 meilleurs joueurs de l’Histoire de la Ligue. Jamais il n’y eu autant de légendes vivantes au centimètre carré sur un terrain de basket qu’en cette mi-temps du 9 février 1997. Et si Tom Gugliotta ne faisait, bien entendu, pas parti de la liste, plusieurs joueurs en activité eurent cet honneur : Michael Jordan, David Robinson ou John Stockton, par exemple.
Remplaçant au coup d’envoi, Googs aura droit à 19 minutes de jeu, pour 9 points, 3 rebonds et 4 passes décisives, dans un temps où le All-star game était encore farouchement disputé. A ce petit jeu, c’est toutefois la conférence Est qui l’emportera, et Glen Rice sera nommé MVP de la rencontre.
Dans l’Histoire, certains joueurs sont moqués pour leur présence au All-star game. Combien de fois avons-nous entendu la phrase : “tu te rends compte, Jamaal Magloire est All-star !”. Cette phrase ne peut pas être prononcé avec le nom de Tom Gugliotta. Non pas parce que le nom du bonhomme échappe aujourd’hui à nombre de fan de NBA, mais bien parce que le niveau de jeu déployé par l’ailier-fort en cette saison 1996 – 1997 vient couronner un travail long de quatre saisons, au cours desquels il a toujours été un excellent joueur de rotation. Désormais, avec sa cinquième, s’il semble exagéré de le considérer comme un franchise player, il ne serait pas infamant de lui octroyer un rôle de seconde option dans une bonne équipe. Un rôle de All-star.
Plus habitué à disputer l’intégralité d’un exercice, il terminera sa saison régulière sur les rotules et avec des statistiques en légère baisse. Dans son sillage, les Wolves parviendront néanmoins à décrocher la sixième place de la conférence Ouest, avec un bilan de 40 – 42. Si Minnesota n’a toujours pas réussi à terminer une saison avec un bilan équilibré (et, de facto, positif), la franchise va découvrir les playoffs. C’est l’accomplissement collectif ultime pour cette équipe extrêmement jeune et menée, dans les faits, par un joueur qui n’était pas censé avoir les épaules pour le faire.
Et pourtant, le 24 avril 1997, c’est bel et bien Gugliotta, Garnett et Marbury qui font face à un big three certes vieillissant, mais également effrayant : Hakeem Olajuwon, Clyde Drexler et Charles Barkley. Soit deux MVP et un membre incontesté de la Dream Team 1992. Les deux premières rencontres, disputées à Houston, se solderont par deux blow-out. La dernière sera plus serrée. Devant leur public, les Wolves tentent de décrocher leur première victoire de post-season de leur Histoire. A cet égard, le cinq majeur mis tout en oeuvre, avec 100 points scorés. Toutefois, ce sont les Rockets qui repartiront avec la victoire – et la qualification – 125 – 120. Googs, lui, terminera la rencontre avec 27 points, 10 rebonds, 4 passes décisives, 3 interceptions et avec une shoot chart qui trahis non seulement son époque (mi-distance, de quoi donner des boutons à Daryl Morey), mais aussi le style de jeu de l’ailier-fort : stretch 4. Pour l’anecdote, c’est lui qui inscris l’unique panier à trois-points de son équipe dans cette rencontre.
La saison des Wolves se termine donc après cette troisième défaite. Elle sera la pierre fondatrice des belles années de Minnesota, qui disputera les joutes printanières jusqu’en 2004. Pour Gugliotta, elle ne sonne pas encore le glas de ses plus belles années. La fin n’était pourtant plus très loin.
Le générique de fin
Gugliotta disputera ainsi encore une saison sous le magnifique maillot des Wolves, avec une ligne statistique absolument similaire à la précédente. Il est cependant obligé de passer sur le billard pour la première fois, en raison d’une blessure à la cheville, ce qui l’empêchera d’être sélectionné une seconde fois pour le All-star game. Et si Minnesota présente un bilan solide (45 – 37), les hommes de Flip Saunders échouèrent à nouveau au premier tour des playoffs (3 – 2 face aux Sonics). Toutefois, alors que son contrat arrive à échéance et qu’il reste sur deux saisons à plus de 20 points et 8,5 rebonds, il ne sera pas conservé par le management des Wolves. A l’issue du lockout qui impacta la saison 1998 – 1999, il signa chez les Suns de Phoenix.
La venue de Googs dans l’Arizona va coïncider avec des blessures à répétition. L’ailier-fort, pourtant dominant les deux saisons précédentes, va être fauché en plein élan. Le passage au 21è siècle sonne, en quelques sortes, le glas de la première carrière du joueur.
Enfin intégré dans une équipe ambitieuse et qui gagne (53 – 29 en 1999 – 2000), alors qu’il est désormais la seconde option au poste d’ailier-fort, derrière Rodney Rogers, Gugliotta va connaître deux terribles coups du sort. Le 17 décembre 1999, alors qu’il était au téléphone avec sa femme, dans le bus de l’équipe, Gugliotta cessa de respirer et s’écroula. Il s’avère que, souffrant de troubles du sommeil après les rencontres, il prenait des comprimés pour s’endormir. Comprimés qui contenaient du GBL, un produit dont on sait aujourd’hui qu’il est la cause de plusieurs décès. Il n’eut la vie sauve que grâce au génial réflexe de sa bien-aimée, qui contacta la femme de Rex Chapman, son coéquipier, qui transmis l’information à son mari. C’est ainsi Chapman qui pu indiquer aux médecins le traitement pris par Gugliotta, ce qui permis au personnel médical de lui donner un antidote.
Après cette expérience de mort imminente, il remonta sur les parquets … mais pas longtemps, puisqu’il se rompra les ligaments croisés antérieurs et postérieurs du genou à la mi-mars 2000. Une blessure terrible pour un joueur professionnel, de laquelle il ne se remettra jamais. Il continuera bien à jouer en NBA jusqu’en 2005, étant transféré de franchises en franchises comme le joueur de bout de banc qu’il est devenu (jamais plus de 6,5 points ou 5 rebonds de moyenne). Il évoluera ainsi sous le maillot du Jazz en 2003 – 2004, pour la dernière saison de John Stockton. Il sera ensuite transféré coup sur coup à Boston et à Atlanta en 2004 – 2005, pour ce qui fut sa dernière saison en carrière.
Il terminera son parcours en NBA avec les moyennes suivantes : 13 points, 7,3 rebonds, 2,8 passes décisives, 1,4 interception et 0,6 contre, à 45 % au tir. Des statistiques qui reflètent mal, voire pas du tout, l’impact qu’a pu avoir Googs dans ses plus belles années. A titre de comparaison, avant ses problèmes de santé (soit 7 saisons NBA), il présente des moyennes bien différentes : 16,7 points, 8,8 rebonds, 3,6 passes décisives, 1,7 interception et 0,8 contre.
Au final, puisqu’il fut fauché en plein prime, la liste des récompenses qu’il a obtenues dans sa carrière est relativement courte :
- All-rookie team, en 1993,
- All-star, en 1997.
Sa carrière ressemble donc à celle d’un joueur constamment tombé au mauvais endroit au mauvais moment. Il aurait largement pu endosser le rôle d’une solide troisième option dans une équipe qui visait le titre NBA. Néanmoins, en début de carrière, les Bullets, les Warriors et les Wolves n’avaient pas de telles ambitions. Et lorsque celles-ci apparurent du côté de Minneapolis, le trio composé avec Garnett et Marbury explosa en vol. Au final, c’est bel et bien chez les Suns que Gugliotta aurait pu espérer connaître les finales NBA, voire le titre. Las, c’est cette fois-ci sa santé qui l’en empêcha, dans ce qui peut ressembler à un véritable What if ?
Crédits et hommages
L’inconvénient, lorsque l’on traîne notre peine pendant plusieurs années avant de prendre sa retraite, c’est que celle-ci se prend généralement dans l’anonymat le plus total. Ce n’est pas Paul Pierce qui dira le contraire. Dès lors, si l’on excepte un article d’Herb Sendek, entraîneur de North-Carolina State au début du siècle, qui considère que Gugliotta fut l’une des plus belles réussites sportives de l’Histoire de l’Université, il est complexe, voire impossible, de trouver des hommages à celui qu’on appelait Googs.
Si c’est forcément handicapant pour faire comprendre l’impact qu’a eu le joueur sur sa franchise, cela entre néanmoins toutefois dans la ligne qu’on s’est fixé avec le Magnéto : parler de joueurs, parfois (très) connus et sous-estimés, mais aussi parler de joueurs (re)devenus anonymes. A notre sens, Tom Gugliotta est l’un de ces joueurs dont la carrière mérite d’être contée, puisqu’elle présente, si l’on s’y penche, les ingrédients qui font généralement un bon roman : un départ difficile, une montée en puissance conclue par une saison d’exception, et une chute aussi brutale qu’irrémédiable. Une carrière atypique et terriblement remplie, en somme.
Les précédents épisodes et portraits du Magnéto :
- Cinq majeur #1 : Penny Hardaway (1994/95), Manu Ginobili (2007/08), Terry Cummings (1988/89), Jerry Lucas (1964/65), Nate Thurmond (1974/75),
- Cinq majeur #2 : Jason Kidd (1998/99), Tracy McGrady (2004/05), Rick Barry (1966/67), Elvin Hayes (1979/80), Neil Johnston (1952/53),
- Cinq majeur #3 : Isiah Thomas (1989/90), David Thompson (1977/78), Paul Arizin (1951/52),
Super ces articles… mais que sont-ils devenus ?
Difficile de trouver des infos sur ce que sont devenus les joueurs après leur carrière en tant que simple internaute. Si vous avez accès à des infos, ça ferait une super rubrique !