Au secours y’a le feu! Au secours y’a le quoi ?
Quand on est fan de Cleveland, il faut apprendre à prendre du recul très vite et avoir pas mal d’humour.
Depuis le départ de LeBron (et même avant) la génération dorée de 2016 flétri comme un Warrior à l’infirmerie. De l’ivresse de la fête à la grosse gueule de bois bien moche. Mais pour une fois,on est pas tombés dans le piège d’el famoso “Je bois un verre et je rentre” qui se finit en farandole dans un bar à 5 du mat’. Non là on avait prévu la ceinture de canettes, le jerricane de vodka dans le dos et le casque avec les bouteilles de Jack fixées dessus. Le front office avait prévenu “on va reconstruire” et cette phrase ne date pas d’il y a 5 ans mais de l’été 2018.
Un chantier titanesque où les contremaitres ont choisi Kevin Love comme chef de cavalerie. Il était là dans la future Rocket machin truc au milieu des petites gens qui s’affairaient à bâtir pour signer un contrat de 4 ans et quelques 120 millions de dollars. Symbole on ne peut plus fort et qui laissait entrevoir des lendemains sans aspirine avec au moins un joueur de calibre All-Star et donc une raison de venir au stade.
La franchise lui a même offert une année sabbatique l’année dernière où il n’a presté que 22 matchs parfois pour blessures, parfois sans doute pour moins sentir le poids de la défaite et ne pas miner son mental fragile. Cette année il entame sa saison de manière sérieuse et alors qu’il a participé à 19 matchs à compter de ce jour (nous sommes le mercredi 11 décembre) il a craqué… Ouais, niveau mental on est quand même pas bien ouf.
Love a donc demandé son transfert pour un contender et je vous avoue que je suis bien déçu par l’homme qu’on a appelé le soir où LeBron partait à LA pour lui tendre les clés du camion, des discours de début de saison, du rôle de modèle qu’il voulait récupérer, de la difficulté d’avoir été 2ème voire 3ème option en attaque,… Bref le Kéké déçoit. Mais soit, la NBA reste un cirque businnesso-ego-mégalo-tout ce que vous voulez et la vie à Cleveland va continuer et dans quelques temps on ne pensera plus qu’à ce titre de 2016 comme ce fût le cas avec Kyrie et LeBron.
En parlant d’eux, cherchez des franchises qui ont perdus coup sur coup un Irving puis un LeBron et qui ont avalé ça comme si de rien n’était. Vous avez 2h.
Mais revenons-en à la crise dans l’Ohio et déjà posons nous les bonnes questions ou plutôt la bonne question. Est ce que c’est la crise ?
Deux personnes semblent catalyser la fureur des médias et des sacro-saints réseaux sociaux : John Beilein et Collin Sexton. Je vous avoue de suite avant de développer que je ne comprends pas pourquoi mais on va bien se débrouiller pour essayer de comprendre.
John Beilein
Donc pour rappel, le coach des Cavs est un entraineur rookie et vient de passer, entre autre, 12 ans à Michigan. Voilà, de temps en temps il faut sortir la carte CV.
Il lui a été confié un roster de 23.12 ans de moyenne d’âge dont 5 rookies et 2 sophomores. Un choix judicieux pour Cleveland sur papier sauf que selon Joe Vardon et le Shams, les joueurs en ont marre qu’ils les prennent pour des gamins de NCAA/High School… Dans un premier temps on pense que seulement les vétérans gueulent (ce qui avait le mérite d’être “cohérent”) et puis on ouvre la vanne à la connerie avec des jeunes mêlés également et, entre autre, il est reproché au coach d’utiliser des noms d’animaux pour les systèmes ou des positions offensives… Le jour même, les Cavs se disent prêt à discuter pour Love. En gros, vous offrez une Ferrari rouge à votre fils qui pique une crise parce qu’il la voulait en bleu et là vous lui mettez une calotte sur le sommet du crâne pour oxygéner ses neurones.
Il serait peut-être temps d’arrêter avec la mythologie coach NCAA-rookie-petit génie. Certains sont des exceptions et pas des généralités. Chaque coach doit apprendre son métier à un rythme qui lui est propre. 23 matchs. Un peu plus du quart de la saison et on tire déjà sur un coach qui n’a cessé depuis qu’il est arrivé de modifier son approche du jeu.
Je conçois tout à fait qu’on ait pas tous l’oeil d’un coach quand on regarde les matchs et que certains se contentent du résultat ou des highlights, mais alors ne hurlez pas avec la meute.
Depuis son arrivée et ses premiers matchs, les adaptations ont été nombreuses et je ne serai pas surpris d’en voir d’autres plus majeures arrivées (on y reviendra). On ne tient pas aussi longtemps en NCAA, qui plus est dans un gros programme aussi longtemps en étant un imbécile fermé. Votre valeur de coach est souvent liée aux résultats. Bien, alors expliquez moi Alvin Gentry la saison passée et cette saison. (Indice : Sourcil)
Prenons la peine aussi de se pencher sur le groupe qualitativement. Ouais, je sais, là ça calme un peu. Entre les rookies et les sophomores qui ne connaissent rien ou presque de la ligue, les vétérans usés ou simplement mauvais, il reste quoi à manger à Beilein pour aller taper des teams ? Cleveland a en point de mire l’été 2020 pour éliminer les derniers contrats gênants. Tout va dans ce sens (prolongations comprises) et ça voudrait jouer les PO parce qu’ils ont eu le malheur d’être chaud/chanceux pendant 10 matchs sans compter les matchs contre Orlando ou les Sixers ou pour le même prix les Cavaliers auraient pu remporter la mise. On ne serait peut-être pas entrain de gueuler sur le coach. Il l’a d’ailleurs bien dit en interview “Les autres équipes sont simplement meilleures”.
Personne n’aime perdre en NBA et c’est sain qu’un groupe se rebelle contre la défaite mais ce même groupe doit aussi être conscient des raisons de la défaite et ce n’est surement pas parce qu’un backdoor cut s’appelle belette ou qu’on te crie “OURS POLAIRE” quand tu dois faire un high post screen pour ton meneur.
Le basket, son essence même, c’est l’opposition d’un joueur par rapport à un autre, le célèbre 1v1. Celui qui exécute peut avoir toutes les tactiques offensives ou défensives, s’il est mauvais en 1v1, aucune tactique d’équipe ne pourra boucher le trou en permanence. C’est pour ça qu’en équipe de très jeunes joueurs jusqu’à adolescent on ne peut pas jouer en zone. Pour apprendre à affronter son vis-à-vis des deux côtés du terrain et à le passer ou le stopper. Il faut de la volonté, de l’intelligence, de l’agilité pour tout ça et on tombe vite dans une spirale négative en cas de défaites à répétitions en pensant que c’est la faute d’un autre. La défense c’est un effort collectif qui passe par la volonté de 5 personnes opposées en 1v1 contre 5 autres joueurs.
Mais alors John Beilein ne peut rien faire ?
Si, il peut. Et cela dépend de la présence de Kevin Love sur le terrain.
On le sait Love est en permanence ciblé en pick and roll parce qu’il est simplement nul depuis des années pour savoir ce qu’il doit faire et, plus surprenant, il en est encore à regarder le banc d’un air déconfit à chaque fois qu’il se fait retourner alors qu’il est fautif dans 90% des cas. Je ne vais pas développer pourquoi ici mais je vous le garantis, il l’est.
Donc dans le 5 de base on a : Garland, Sexton, Osman, Love et Thompson. Comment défendre ? Une tête de pont aussi fragile ne peut tenir. Beilein a changé depuis le début de la saison. Depuis peu il cache Garland sur le shooter dans le corner alors qu’avant il suivait son homme no matter what. Problème, Sexton a progressé en défense (on y reviendra) mais l’attaque adverse va toujours taper là où ça pique : le pick and roll avec Love. Sexton se bat bien dans les écrans mais est limité par son physique malgré tout et du coup derrière c’est open bar pour l’équipe adverse puisque Love ne fait pas de choix (remember les 90%). Il reste entre deux zones et de ce fait, les deux adversaires peuvent marquer. *regard d’incompréhension vers le banc. Bah oui Kevin ou tu sors fort sur le porteur du ballon pour empêcher de passer et les rotations se font par l’autre pivot qui prend en charge le poseur d’écran (cfr la défense des Raptors), ou bien tu colles le poseur d’écran et tu laisses toute la place à ton coéquipier pour qu’il revienne sur son homme et en dernier recours tu vas au contre. Mais restez planter entre les deux c’est NON !
Donc soit Beilein fait en sorte de créer une prérotation pour que Thompson se retrouve à défendre le pick and roll (soit l’attaque adverse devra changer d’idée ou se démener pour aller rechercher Love et isoler le 2v2), soit on sort Collin Sexton du terrain pour mettre Kevin Porter JR qui peut jouer 2/3 et peut prétendre à mener des chase down block et a un physique plus adéquat pour se battre à travers l’écran. Dure sanction pour un non coupable la plupart du temps.
Certes ça ne réglera pas tout mais ça jugulera déjà les débuts de match catastrophiques qui te flinguent l’envie de te bouger. Il suffit de regarder les PER des starters pour comprendre. Et puis si Osman pouvait se reprendre en main aussi ce serait pas plus mal.
Autre point à améliorer, le jeu poste bas. Alors oui Thompson a perfectionné son hook main gauche mais ça bloque des lignes pour aller à l’anneau et quand on a des joueurs de drive dans son équipe c’est la galère niveau mouvement du ballon. Je m’explique, les gens confondent souvent jeu de passes et mouvement du ballon. Se mettre à 5 autour de l’arc et faire des passes n’est pas compliqué en soit mais ça ne vous facilitera pas la tâche pour autant. Par contre driver, kick out, passe au partenaire juste à côté, souvent ça suffit pour avoir un tir ouvert ou une ligne de drive ouverte elle aussi. Du coup, arrêtons avec les deux pivots proches de la raquette. TT est un bon joueur de pick and roll et Love de pick and pop. Ca ennuie les défenses et ça aidera le jeu “demi terrain” des Cavs.
Voilà deux pistes assez faciles à mettre en place mais qui changeraient déjà pas mal de choses en bien.
Collin Sexton
Et là on est dans les tréfonds des réseaux sociaux qui saluaient son évolution en début de saison. Alors qu’on trouvait qu’il était le seul à se donner et à être constant, maintenant ce serait lui le problème à cause du manque d’assist et de la défense.
Bon pour la défense je pense avoir proposé des pistes de compréhension. Bien sûr, il peut encore apprendre à travailler sa mobilité latérale pour slider sur ou sous l’écran et mieux les lire mais bon il est SOPHOMORE, SECONDE ANNEE, DANS UNE EQUIPE DANS LAQUELLE IL NE CONNAIT QUE LA DEFAITE ET CA FAIT 23 MATCHS QU’IL A UN COACH. Avons-nous oublié Kyrie Irving en seconde année. Allez revoir les stats, le nombre de minutes par match, le nombre de matchs joués, les points/rebonds/assists… C’est pas le but de les comparer mais on donne du crédit et du temps sans regarder les faits et ça c’est vraiment dommage.
Souvenez-vous où il en était il y a un an et sa progression sur seulement une année. Les gens ont une indulgence sans limite avec Garland parce qu’il vient pratiquement du collège mais Sexton n’a qu’une saison dans les pattes.
Une fois que Love sera tradé (pour en revenir avec la fin de mon explication dans la partie précédente), Il faudra mettre Garland sur le banc et lui laisser du temps pour prendre ses marques dans la ligue. Et on pourra cacher Sexton en défense comme on cache Garland cette année. Toujours bien sur avec Kevin Porter Jr sur le terrain et puis si dans le trade il y a un poste 2 ou 3 athlétique c’est bien aussi.
Sexton n’est pas un 6ème homme, c’est un meneur scoreur comme on en a connu partout dans la ligue et surtout récemment à Cleveland. Il n’a pas le talent d’Irving mais il se bat chaque soir, chose que Kyrie ne faisait pas (demandez aux fans de Boston et de Brooklyn). Il va apprendre encore cette année mais mettre les maux de l’équipe sur son dos, c’est faire la même chose que les vétérans l’année passée qui se demandaient s’il savait jouer au basket (c’est vous dire si on l’habitude des conneries de vestiaire dans l’Ohio).
Je terminerais en rappelant que Cleveland n’est pas dernier de la ligue, a un front office, a un coach, a des joueurs en devenir à condition de leur laisser quelque chose que peu de gens ont encore : du temps.
En NBA, on ne doit pas juste connaitre son métier, on doit exceller pour produire des résultats dignes de ce nom. Qu’on soit coach ou joueur c’est pareil. Alors après, combien de temps avez-vous excellé dans votre travail ? Les chiens aboient, la cavalerie passe(ra).
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