Depuis 1946 et la création de la National Basketball Association, quelque cinq mille joueurs ont foulé les parquets de la Grande Ligue. Certains d’entre-eux ont laissé une emprunte indélébile qui ne sera jamais oubliée. D’autres sont restés bien plus anonymes. Entre les deux ? Des centaines de joueurs, qui ont tour à tour affiché un niveau de jeu exceptionnel, mais dont on oublie bien souvent la carrière.
Dès lors, @BenjaminForant et @Schoepfer68 ont décidé de dresser – littéralement – le portrait de certains de ces acteurs méconnus ou sous-estimés. Au total, ce sont 60 articles qui vous seront proposés : un par année, entre les saisons 1950 – 1951 et 2009 – 2010. Pour chaque saison, un joueur a été sélectionné comme étendard, parfois en raison d’une saison particulièrement réussie, d’une rencontre extraordinaire ou encore d’une action historique …
Chaque portrait s’inscrira dans une volonté, celle de traverser l’Histoire de la NBA de manière cohérente. Ainsi, ces portraits (hebdomadaires) seront publiés dans un ordre précis : un meneur, un arrière, un ailier, un ailier-fort, un pivot. Au bout de cinq semaines, c’est donc un cinq majeur qui sera constitué. Les plus matheux d’entre-vous l’aurons compris : au final, ce seront douze équipes, toutes composées de joueurs ayant évolué au cours de décennies distinctes, qui auront été composées.
A vous de déterminer lequel de ces cinq majeurs sera le plus fort, le plus complémentaire, le plus dynastique.
Premier volet aujourd’hui : intéressons-nous à la saison 1994 – 1995 à travers l’ancien meneur du Magic d’Orlando, Anfernee “Penny” Hardaway.
La jaquette
Pour chaque article, @Lusso98 vous proposera ses créations. Vous y retrouverez une illustration du joueur présenté (en tête d’article) ainsi une présentation de chaque cinq majeur projeté (chacun avec une identité visuelle propre).
Le synopsis
Le jeune Anfernee est né le 18 juillet 1971 à Memphis, dans le Tennessee. Nous aurons l’occasion d’y revenir, cette ville, berceau du blues américain, aura une place toute particulière dans sa vie.
Évoluant au poste de meneur, mais pouvant tout aussi bien être décalé au poste d’arrière, celui que l’on surnomme Penny possède la particularité d’être particulièrement longiligne. A l’instar d’un Ben Simmons aujourd’hui, il dépasse le double-mètre, ce qui lui permet d’avoir un avantage physique non négligeable sur l’ensemble de ses matchs-up. Rapide et agile près du cercle, il est particulièrement efficace en pénétration, ce qui compense son adresse longue-distance parfois aléatoire (31,6 % en carrière).
A l’aise dans tous les compartiments du jeu, Hardaway s’est imposé comme un scoreur efficace et un passeur redoutable. Ces caractéristiques, couplées à une clutchitude bienvenue et à une endurance remarquable ont fait de lui l’un des acteurs majeurs du milieu des années 90. Au point de le voir, très rapidement, être considéré comme l’un des tous meilleurs extérieurs de la Ligue.
Action !
Il est des carrières, des vies entières, qui reposent sur finalement que peu de choses. De ceci, Penny Hardaway peut en témoigner. L’ensemble de sa vie sportive a été frappé par une succession de faits, parfois positifs, parfois horribles, qui auraient pu, voire dû, bouleverser son existence. Procédons par chronologie.
Dès les années de lycée, il semblait absolument certain que Penny possédait un talent unique, générationnel, qui le porterait très haut dans les sphères du basketball américain. Si les lignes statistiques de ces périodes ci ne sont que peu significatives, celle du futur meneur du Magic force néanmoins l’admiration : 36,6 points, 10,1 rebonds, 6,2 passes décisives, 3,9 interceptions et 2,8 contres. Une activité de tous les instants qui lui ouvre (en grand) les portes de l’Université de sa ville de toujours, Memphis State.
Alors qu’il n’était pas éligible pour évoluer sous les couleurs de sa fac au début des années 1990, la vie du jeune homme qu’était Hardaway n’était pas bien loin de basculer vers la grande faucheuse. En effet, victime d’un vol à main armée, il se retrouve avec une balle logée dans la chair. Heureusement (si l’on peut s’exprimer ainsi dans de telles circonstances), celle-ci est venue le frapper dans la cheville droite, ne lui brisant au passage “que” trois os. Si son heure n’avait finalement pas sonnée, sa carrière de basketteur aurait pu en prendre un coup irréversible. Il n’en sera finalement rien, et ce premier coup du sort n’aura finalement que peu de conséquences sur sa vie d’adulte. Pour le plus grand bonheur de tous les fanatiques de NBA des nineties.
Il restera à l’Université jusque dans son année senior. Avec des résultats qui s’inscrivent dans la droite lignée de ce qu’il avait démontré au lycée. Son maillot est ainsi retiré, et il fut nommé “cinquième meilleur meneur universitaire des temps modernes” par le très sérieux site “collegehoopsnet.com”.
Armé de l’ensemble de ces certitudes, il se présente à la draft 1993, celle des Chris Webber, Jamal Mashburn et autre Vin Baker. Il ne fait nul doute que le premier cité sera d’ailleurs sélectionné en première position. Le first pick était d’ailleurs en possession du Orlando Magic qui, après avoir drafté Shaquille O’Neal la saison précédente, pouvait parfaitement se composer une incroyable raquette en associant C-WEBB au Big Diesel.
C’est là qu’un second événement vient chambouler l’existence d’Anfernee Hardaway, décidément. Avant sa draft, le jeune meneur se développait des talents d’acteurs, puisqu’il fut casté pour le tournage du film Blue Chips. Les autres acteurs ? Entre autre, nous retrouvons Larry Bird, Rick Pitino, Bob Cousy et … Shaquille O’Neal. C’est ce dernier, subjugué par le talent balle en main du gamin de Memphis, qui fera pression sur sa direction pour le sélectionner avec le premier choix de la draft. Un choix osé, culotté même, lorsqu’on sait à quel point Chris Webber dominait la concurrence du côté de la fac de Michigan.
C’est ainsi que le 30 juin 1993, la toute jeune franchise du Orlando Magic sélectionna … Chris Webber, avant de l’envoyer immédiatement aux Golden State Warriors (titulaires du choix n°3) contre … Anfernee Hardaway. Quand on vous dit que le Shaq est un argument de poids …
Direction la Floride, donc, pour le nouveau numéro 1 du Magic d’Orlando. A partir de là, tout va aller très vite. Terriblement vite.
La saison 1993 – 1994 est donc la toute première d’Hardaway dans la Grande Ligue, celle des Olajuwon, Robinson, Ewing et autres Malone. Sa franchise, toute récente dans le paysage NBA (créé suite à l’expansion de draft décidée en 1987, Orlando a disputé sa première saison en 1989 – 1990) n’avait jamais terminée la saison régulière avec un bilan positif. Elle n’avait guère plus goûté aux joies des joutes printanières. C’est ici que le premier impact de Penny sur sa nouvelle équipe va être ressenti.
Le jeune homme va être directement propulsé en tant que titulaire à la mène (82 rencontres disputées, toutes en tant que titulaire et avec 36 minutes de jeu de moyenne). Si la précision au tir n’était pas forcément fabuleuse (elle ne le serait jamais réellement au cours de sa carrière), Hardaway est déjà dominant. Trop grand pour les meneurs, trop rapide pour les arrières, il termine sa première saison avec une ligne statistique prometteuse : 16 points, 5,4 rebonds, 6,6 passes décisives et 2,3 interceptions. Ce qui lui vaut une place bien au chaud dans la First rookie Team. Il commence – déjà – à se murmurer dans les couloirs des arènes NBA que le duo Shaq – Penny risque d’être inarrêtable au tournant du vingt-et-unième siècle, tant les deux bestiaux, pourtant si jeunes, portaient déjà haut les espoirs de leur franchise. D’ailleurs, en cette saison 1993 – 1994, le Magic va terminer quatrième de la conférence Est, avec un joli bilan de 50 victoires. Un sweep plus tard au premier tour des playoffs (défaite 3 – 0 contre les Pacers de Reggie Miller), l’heure est désormais venue d’évoquer ensemble la saison 1994 – 1995, celle pour laquelle Anfernee Hardaway a été choisi pour porte drapeau.
L’oscar de la saison 1994 – 1995
Vous l’aurez compris, lorsque le top départ de cette nouvelle saison est donné, Penny débute sa saison sophomore. Celle-ci est généralement considérée comme celle des révélations, à tel point que les joueurs de deuxième année ne peuvent pas prétendre, en toute logique, remporter le titre de Most Improved Player en fin de saison (trophée qui récompense la meilleure progression de l’année). D’ailleurs, le début de saison de Luka Doncic démontre bien, actuellement, comment un rookie peut se transformer en véritable sophomore dominant.
Il en va exactement de même pour Penny Hardaway. De sa progression dépend, pas intégralement il est vrai, les espoirs de titre du Magic. Espoirs qui commencent à germer dans la tête de tout le monde au sein de la franchise floridienne. Il faut dire que le cinq majeur a de la gueule. Et quelle gueule ! La mène est, bien entendu, toujours confiée au sophomore maison. Le backcourt est complété par Nick Anderson, qui reste sur deux saisons à 20 points de moyenne. Si le plus anonyme Donald Royal occupe le poste d’ailier, la raquette est composée de deux légendes. Horace Grant, qui reste sur un three peat avec les Bulls de Jordan, est titularisé au poste d’ailier-fort, tandis que Shaquille O’Neal, en mode rouleau-compresseur (29,3 / 13,2 la saison précédente) est évidemment le pivot de cette équipe.
Braquons les projecteurs sur la saison complète d’Hardaway, tant elle vaut le coup d’œil. En effet, s’il a été choisi pour représenter, au sein de cette série, la saison 1994 – 1995, c’est pour rappeler à quel point celle-ci fut incroyable, tant individuellement que collectivement.
Individuellement, par où commencer ? Hardaway n’est clairement pas du genre diesel. Il commence ainsi la saison avec les deux pieds sur l’accélérateur et forme déjà, avec O’Neal, l’un des tous meilleurs one – two punchs de la Ligue. Voici quelques exemples qui vous permettront – nous l’espérons – de prendre conscience de ce qu’était Anfernee Hardaway il y a tout juste vingt-cinq ans.
Au bout d’un mois de compétition, toute la NBA était prévenue : Penny était l’un des tous meilleurs meneurs de la Ligue, si ce n’est le meilleur. Rappelons, à toutes fins utiles, qu’il n’entamait alors que sa seconde saison en carrière. Ainsi, après les quatorze rencontres du mois de novembre 1994, il est d’ores et déjà nécessaire de posséder deux mains pour compter les coups d’éclats du meneur du Magic. A tel point qu’il sera nommé – pour la première fois de sa carrière – joueur de la dernière semaine du mois de novembre. Et pour cause, voyez plutôt :
- 10ème rencontre de la saison à Boston (25 novembre 1994) : 35 points, 5 rebonds, 3 passes décisives, dans une victoire (+6) du Magic,
- 11ème rencontre de la saison à Milwaukee (26 novembre 1994, back-to-back) : Premier triple-double en carrière : 35 points, 10 rebonds, 12 passes décisives à 15/23 au tirs, dans une victoire (+8) du Magic,
- 13ème rencontre de la saison contre New-York (2 décembre 1994) : 33 points, 6 rebonds, 8 passes décisives, 3 interceptions à 10/15 au tir, dans une victoire (+25) du Magic. Mais surtout un dunk gigantesque sur la tête d’un Patrick Ewing pourtant monté au contre :
Au final, l’énorme coup de chaud durera une dizaine de jours, pendant lesquels rien ni personne ne pouvait le stopper. Entre le 21 novembre et le 2 décembre et la fameuse réception des Knicks, la ligne statistique proposée par Hardaway est Jordanesque : 30,8 points, 5,7 rebonds, 7,5 passes décisives, 2,8 interceptions à 56 % au tir dont 40 % à trois points. Le tout en six rencontres, pour six victoires.
Sur le dos de sa jeunesse, le Magic caracole en tête de la conférence Est. Au bout de vingt rencontres, le bilan est de 16 victoires pour 4 défaites (trois d’entre-elles de 2 points). Juste avant Noël, Penny connaîtra son unique coup de mou d’une saison, qui, vous le verrez, s’avérera pourtant très longue. Il passa ainsi un sale quart-d’heure (au sens propre du terme, 17 minutes de jeu, plus petit total de la saison) contre les Sonics de Gary Payton, reconnu pour sa défense extérieure (4 petits points). Auparavant, il ne scorera que 8 points contre Denver, avant de réaliser une dernière contre-performance contre les Lakers. Ce sera globalement les seules rencontres qui ont pu prouver au monde entier qu’Anfernee était bel et bien humain.
La domination du meneur se traduit aussi bien dans les chiffres, comme nous l’avons vu, que sur le terrain. Il devient une véritable machine à highlights et truste les plus hautes marches des top 10 hebdomadaires. Illustrons ces mots avec le top 10 des highlights de la semaine du 9 janvier 1995, où l’on retrouve notre meneur aux place 8 et 1 du classement.
Les matchs se suivent et se ressemblent. Orlando poursuit sa domination de la conférence Est, Shaquille O’Neal détruit l’ensemble des raquettes adverses tandis que Penny s’occupe de passer à la moulinette les backcourts d’en face.
Le 12 février 1995, Hardaway participe pour la première fois de sa carrière à un match des étoiles. Une première qui en appellera d’ailleurs d’autres, puisqu’il sera All-Star quatre saisons consécutives. Aux côtés, notamment, d’O’Neal, de Ewing et autres Reggie Miller pour représenter la conférence Est, on se rend compte que Penny est loin de faire tâche. Il est d’ailleurs titulaire et sera celui qui passera le plus de temps sur le parquet.
Juste après le All-Star Break, le Magic reçoit, pour le cinquante-quatrième match de la saison, les Chicago Bulls menés, une fois n’est pas coutume, par Scottie Pippen. Le match se déroule effectivement le 26 février 1995, soit moins d’un mois avant l’officialisation du premier retour en NBA de sa Majesté Michael Jordan. Sur le parquet, la rencontre est des plus serrées. 103 partout à cinq secondes de la sirène finale, balle aux taureaux. Nick Anderson subtilise le ballon et Penny s’en va claquer un dunk au buzzer pour donner définitivement deux points d’avance aux siens (numéro 3 du top ci-dessous). Une action clutchissime, qui vient ponctuer un véritable récital du meneur Floridien : 39 points, 5 rebonds, 6 passes décisives, 2 interceptions à 68 % au tir. Record au scoring sur la saison pour offrir la victoire à un Magic plus que jamais lancé vers le sommet de sa conférence.
https://www.youtube.com/watch?v=QFMBWqffvb0
Et si la “machine” d’Orlando va quelque peu s’enrayée une fois venu le mois de mars (12 défaites sur les 25 dernières rencontres), ce n’est pas faute pour Hardaway de continuer d’influencer sur le jeu de son équipe. Au final, pour la première fois de son Histoire, le Magic va terminer premier de sa propre conférence, avec 57 victoires. Shaquille O’Neal terminera second au vote du MVP (remporté par David Robinson), vote pour lequel le sophomore qu’est Penny Hardaway récoltera plusieurs voix ! Il terminera dixième de ce classement, ce qui en dit long sur la qualité extraordinaire de sa saison.
Ce n’est d’ailleurs pas tout à fait terminé pour cette saison régulière. En effet, pour la quatrième fois de l’Histoire “récente” de la NBA (depuis 1979, chiffres à jour à la fin de la saison 2018 – 2019), un sophomore est élu dans la All-NBA first Team. C’est donc Penny Hardaway qui a été considéré comme étant l’un des deux meilleurs arrières (au sens backcourt) de la saison. Et au vu de ce qui précède, nous espérons que vous comprendrez aisément pourquoi ce choix est logique. Avec lui, seuls Larry Bird (9 fois consécutives dans la première équipe NBA pour ses neuf premières saisons …), Latrell Sprewell (en 1993 – 1994) et Tim Duncan (8 fois dans la première équipe NBA pour ses huit premières saisons …) sont parvenus à intégrer cette équipe lors de leur deux premières saisons dans la Grande Ligue. Cela vous classe un bonhomme.
Comment qualifier un joueur qui, dès sa deuxième saison, contribue à porter vers les sommets sa franchise, et qui parvient encore à hausser son niveau en playoffs ? Un franchise player, sans hésiter. Une fois le printemps arrivé, Orlando fait figure de favori pour rallier les finales NBA. L’équipe floridienne n’est toutefois pas l’unique et grandissime favoris. Et pourtant, elle va y parvenir.
Le premier tour des playoffs, contre de biens moribonds Boston Celtics, n’offre pas réellement d’anecdotes à vous fournir. Si ce n’est que pour la première fois, Orlando remporte un tour de post-season, après l’échec retentissant de la saison précédente. La première rencontre est un blow-out en règle (+47 pour le Magic). Remarquons encore que lors du game 3, bien plus serré, Hardaway jouera les 48 minutes de la rencontre.
Au second tour, ce sont les Bulls du duo Jordan – Pippen reconstitué, qui se dressent devant Penny et Shaq. Malgré Scottie Pippen, défenseur parmi les défenseur, sur le râble, Hardaway va contribuer à l’exploit d’éliminer Jordan des playoffs, une première depuis 1990. En six rencontres serrées (jamais plus de 11 points d’écart sur le boxscore final), le collectif d’Orlando va s’exprimer pleinement. La qualification en finale de conférence ne porte ici pas le sceau d’une quelconque individualité. Hardaway, O’Neal, Anderson et Grant affichent tous plus de 15 points de moyenne par rencontre. Quoi qu’il en soit, ce sont les Pacers d’Indiana qui se dressent entre les bleus et blancs et les finales NBA.
Les deux franchises vont se rendre coup pour coup. 2-2 après les quatre premières rencontres, chacune des deux équipes ayant remporté les rencontres disputées à domicile. Penny est toujours comme un poisson dans l’eau (23,5 points, 4 rebonds, 9 passes décisives, 3,3 interceptions de moyenne sur ces quatre premiers matchs) et remporte assez nettement sa match-up avec Mark Jackson, qui n’est pourtant pas le perdreaux de l’année.
Le point d’orgue de la série, pour Hardaway, aurait pu avoir lieu en fin de game 4. Alors que les Pacers mènent 92 – 90 à cinq secondes du terme, Hardaway va se défaire du marquage de Reggie Miller pour venir planter un énorme trois-points, permettant au Magic de reprendre le contrôle du match à 1,3 seconde de la fin (à 6min15 dans la vidéo ci-dessous). Une victoire qui aurait permis à Orlando de mener la série 3 – 1 au moment de retourner en Floride. Un tir qui vient d’ailleurs ponctuer une nouvelle excellente rencontre du meneur, qui, avec 26 points, a maintenu à flot son équipe lorsqu’elle prenait l’eau dans le second quart-temps. Las, Rik Smits, le géant pivot d’Indiana, plantera un dernier panier, offrant la victoire et l’égalisation à sa franchise.
Au terme d’un game 7 à sens unique (+24), Orlando et Penny découvrent les finales NBA. Finales dont l’issue ne sera pas heureuse (sweep par les Rockets d’Olajuwon), et dont la première rencontre restera à jamais comme celle où Nick Anderson a raté quatre lancers-francs consécutifs dans les dernières secondes, alors qu’un seul aurait suffit pour assurer la victoire à son équipe.
Alors que le Shaq, pour l’une des rares fois de sa carrière, semble perdre sa confrontation directe (face à Olajuwon), Hardaway se démène, avec succès. Il clôturera son incroyable saison avec quatre rencontres de hautes volées (mais perdues), au cours desquelles il aura, une fois de plus, survolé son vis-à-vis : 25,5 points, 4,8 rebonds, 8 passes décisives, 1 interception et 1 contre de moyenne. En face, Kenny Smith était dépassé (7 points, 2 rebonds et 4 passes décisives de moyenne).
Voici donc les multiples arguments qui nous ont fait choisir Anfernee “Penny” Hardaway pour étendard de la saison 1994 – 1995. Un ensemble de performances individuelles peu communes pour un sophomore et des résultats collectifs inédits pour une jeune franchise. L’on pouvait d’ailleurs se dire, au soir de la défaite en finale contre les Rockets, que ce n’était que partie remise. Il n’en sera malheureusement rien.
Le générique de fin
Si la saison suivante (1995 – 1996) sera à nouveau témoin du talent d’Hardaway (à nouveau nommé dans la All-NBA first Team), la suite de la carrière du bonhomme ressemble toutefois, et malheureusement, à un énorme What If. La faute à un corps meurtris, et surtout, selon les propres dires du joueur, à des rééducations précipitées. Tout commence suite à un contact au genou avec Joe Dumars, lors des playoffs 1996. Le ménisque semble touché. Pourtant, il continuera à jouer, se permettant même de remporter les Jeux Olympiques 1996 à Atlanta avec la seconde version de la Dream Team.
Il sera ensuite opéré et ratera une trentaine de rencontre lors de la saison suivante, ce qui ne l’empêchera pas d’être All-Star. La rééducation a néanmoins été écourtée et aura des conséquences terribles pour la suite de sa carrière. Il se reblessera au genou en février 1998, blessure qui sonnera le glas du joueur flamboyant que le Magic aura connu durant quatre années. Jamais plus, malgré de multiples come-back, Hardaway ne pourra évoluer au niveau qui était le sien en 1994 – 1995 et 1995 – 1996.
Transféré aux Suns, il disputera le premier tour des playoffs 2000 avec le ménisque déchiré. Il semble d’ailleurs, à ce moment-ci, retrouver ses jambes de sophomore, tant il permet à Phoenix de balayer les Spurs. La franchise de l’Arizona perdra avec les honneurs face aux Lakers du duo Shaq et Kobe, et perdra également son combo-guard, tombé pour avoir tenté de mener son équipe vers les sommets, comme il l’explique d’ailleurs :
“Certes, on a battu San Antonio […], mais ma carrière s’est quasiment terminée à ce moment-là”.
Des mots qui résument à merveille (si, une fois de plus, on peut s’exprimer ainsi dans de telles circonstances) la fin de la carrière du joueur, entre trades (aux Knicks et au Heat), blessures et retours ratés. Hardaway fait ainsi partie de cette caste de joueurs dominants mais malheureusement minés par les blessures. Il reste néanmoins dans les mémoires collectives comme l’une des plus grandes attractions de la période 1993 – 1996. Comme l’une des carrières gâchées également, tant les espoirs qu’il avait placés en lui étaient importants. Cependant, nous en parlions à titre liminaire, la vie entière d’Anfernee Hardaway a été guidée par des coups du sort. Et si le premier d’entre-eux n’aura finalement pas eu de conséquences, le troisième aura mis fin à la carrière d’un des plus beaux joueurs de l’Histoire. Putain de genoux, aurait dit Renaud.
Crédits et hommages
Lorsqu’un joueur domine tant son sport et, de surcroît, adopte un comportement bien souvent irréprochable, il n’est pas rare qu’il soit reconnu parmi ses paires. C’est ainsi qu’Hardaway s’est attiré les faveurs de plusieurs légendes du basketball, dont les louanges en disent long sur ce qu’aurait pu devenir sa carrière. Nous vous en proposons un petit florilège :
“C’est le meilleur arrière de la NBA”. Gary Payton.
Et pourtant, Dieu seul sait si Payton était plus coutumier du trashtalking que des compliments.
“C’est le meilleur joueur que Michael Jordan a eu à affronter en playoffs”. Bill Walton.
Walton, dont la carrière a, elle aussi, été écourtée en raison de multiples blessures, fait donc référence aux playoffs 1994 – 1995, que nous avons mentionnées ensemble ci-dessus. Il est vrai qu’éliminer Jordan au mois de mai au cours des années 1990, ce n’était pas chose aisée. Rappelons également que Magic et Bulls ont, à nouveau, croisés le fer lors des playoffs 1996, avec une victoire nette de Chicago. Au cours de cette série, et malgré un sweep retentissant, Hardaway s’est à nouveau comporter comme un véritable patron, avec plus de 25 points scorés par rencontre.
Et si les comparaisons avec Magic Johnson n’ont peut-être pas lieu d’être, tant la place qu’occupe celui-ci dans l’Histoire NBA est à part, certains ne se sont pas gênés pour comparer les deux joueurs, à commencer par Pat Riley, coach emblématique :
“Il n’y a personne d’autre comme lui. Ah, si ! Mais il est désormais à la retraite”.
Pour conclure ce portrait, laissons la parole à Hakeem Olajuwon qui, après la conquête de sa seconde bague en 1995, se disait soulagé d’avoir battu “ce” Magic, puisque cela risquerait d’être bien plus compliqué dans les années à venir, quand ses deux leaders auraient mûrit.
C’est dire, Mesdames et Messieurs, si la carrière de Penny Hardaway est l’une de celles que l’on regrette. Celle d’une étoile qui a filé trop vite. Mais néanmoins celle d’un joueur fabuleux, qui aura illuminé (notamment) la saison 1994 – 1995.
Bonus
Tous les joueurs présentés dans le cadre de cette série ont été classés les uns par rapport aux autres, par les trois contributeurs, en toute subjectivité, en tenant compte de leur niveau de jeu, influence, palmarès …