Y-a-t-il plus symbolique de la culture de l’instant en NBA que la saison 2018/2019 des Blazers ? Quasiment enterrée en début de saison après le sweep de l’année précédente, la bande de Terry Stotts, a fini cette même année en apothéose, comme l’une des seules équipes de l’Ouest qui ne ruminera pas de regrets tout l’été.
Au terme d’une saison où tout (ou presque) leur a sourit, les Blazers ont atteint les Finales de Conférence pour la première fois depuis 19 ans. Une saison qui s’est achevée sur une nouvelle défaite (la troisième en quatre ans) contre les Warriors. Pas de quoi gâcher la fête. 53 victoires, une troisième place dans la très relevée Conférence Ouest et un run mémorable en Playoffs, marqué par le shoot retentissant de Dame face au Thunder et le Game 7 non moins retentissant de CJ à Denver.
« Presque » tout, parce que la saison avait malheureusement commencée sur une note tragique, avec le décès du propriétaire Paul Allen. Comme un hommage, l’équipe s’est donc sublimée, faisant taire toutes les critiques. Mais le plus dur commence maintenant. Portland a prouvé qu’il n’était pas si loin du titre. Mais avec le niveau de jeu, les attentes augmentent tout autant. Et la question se pose de savoir si les Blazers peuvent assumer ce nouveau statut.
Résumé de l’été
Et pour ce faire, le management n’est pas resté les bras croisés cet été. Dès la fin de saison, Neil Olshey, le GM, est prolongé jusqu’en 2024, et Terry Stotts, le coach qui était sous le feu des critiques un an plus tôt, jusqu’en 2022. Une juste récompense pour les deux architectes de cette équipe. Une fois le hors terrain géré, place au jeu.
Contrairement à l’été précédent, pas de rumeurs de block buster cette fois. La base est solide, plus personne n’en doute. De quoi travailler sereinement, et flairer les bonnes opportunités si elles se présentent. La première arrivera rapidement avec le départ d’Evan Turner, échangé contre Kent Bazemore. Les Hawks cherchait à économiser un peu de salaire, et les Blazers se sont jetés sur cette occasion de se débarrasser des 18 millions d’Evan Turner. Si l’on ne doute pas de l’impact positif dans le vestiaire, prétendument très apprécié des tauliers, les 18 millions de l’arrière pesait lourd dans les finances de l’équipe, surtout en comparaison avec son impact limité. Le 6è homme n’a jamais confirmé les attentes placées en lui, et l’équipe a toujours été meilleure sans lui qu’avec lui. Ses soucis chroniques au shoot le rendait plus que dispensable. Pour l’anecdote, ses 29,6% de loin en carrière le place à la onzième place des plus mauvais shooteurs de l’histoire, parmi ceux qui en ont tentés au moins 900… Bazemore sort lui aussi d’une saison décevante, et a lui aussi un gros contrat, mais les Blazers peuvent légitimement espérer qu’un changement d’atmosphère face du bien à Kent, qui devrait sortir du banc, derrière Hood.
Rodney Hood, justement, fut la première (re)signature de la Free-Agency. Annoncé avant même l’ouverture officielle de celle ci, l’arrière a été gardé pour 11 millions sur deux ans, dans ce qui ressemble à un bon coup. En pleine errance à Cleveland, l’ancien du Jazz a été ramené dans l’Oregon pour la fin de saison, et a fait ses preuves. Sortant du banc, il amenait sa dizaine de points en 25 minutes, et surtout sa défense, un point de souffrance pour la second unit. Surtout, ses Playoffs (et son fabuleux Game 6 contre les Nuggets) ont donnés pleine satisfaction, de quoi convaincre Olshey de lui offrir ce contrat.
L’autre gros coup, c’est l’arrivée d’Hassan Whiteside. Indésirable à South Beach, le Heat devait s’en débarrasser pour signer Jimmy Butler. C’est chose fait donc, grâce aux Blazers qui, contre toute attente, récupèrent le pivot. Ils se débarrassent ainsi des contrats de Mo Harkless et Meyers Leonard, et viennent surtout remplir un trou béant à l’intérieur depuis la blessure de Nurkic, qui ne devrait pas revenir avant la toute fin de saison. Un pari au risque limité pour les Blazers, puis ce que Whiteside est en fin de contrat l’été prochain.
Pour compléter l’effectif, Portland est allé chercher l’expérimenté Anthony Tolliver, Mario Henzonja mais aussi… Pau Gasol. Une signature un peu surprenante tant on commence à douter de l’état de forme de l’espagnol. Il apportera cependant sa science du jeu, ce qui pourrait être utile derrière Whiteside dont ce n’est pas la qualité première.
Pour être complet, notons le bon coup réalisé par Olshey avec le « repêchage » de Nassir Little à la draft. Attendu lottery pick, voir top 10, l’ailier a finalement glissé jusqu’à la 25è place, celle des Blazers. Bon défenseur, bon shooteur, le produit de North Carolina est physiquement prêt à jouer en NBA, et pourrait bien ressembler au steal de la draft. À suivre, donc.
Enfin, peut-être plus important encore que ces ajustements pour l’année, la franchise de l’Oregon a sécurisé son avenir sur le (très) long terme, en prolongeant sa star Damian Lillard. Le meneur s’est d’ores et déjà engagé jusqu’en 2025, alors qu’il lui restait deux ans de contrat, pour 196 millions sur quatre ans. Il est désormais sous contrat pour les six prochaines années. Une éternité en NBA. En bref, un été rondement mené à Portland, de quoi nourrir de beaux espoirs à l’entame de cette nouvelle année.
Roster
Meneurs : Damian Lillard, Gary Trent Jr, Troy Caupain
Arrières : CJ McCollum, Anfernee Simons, Mario Hezonja
Ailiers : Kent Bazemore, Nassir Little, Rodney Hood, Jaylen Hoard (two way contract)
Ailiers Forts : Skal Labissière, Zach Collins, Anthony Tolliver
Pivots : Hassan Whiteside, Pau Gasol, Jusuf Nurkic
Un effectif, mine de rien, qui a beaucoup bougé autour du duo d’arrières Lillard/McCollum, avec pas moins de cinq nouveaux joueurs appelé à avoir un rôle important dans la rotation. Un effectif qui gagne beaucoup en profondeur, puisque tous les postes (sauf le poste 1), sont doublés, voire triplés. À noter aussi la présence d’un français, Jaylen Hoard, sorti de Wake Forest, en two way contract.
Jeu et Coaching
Même coaching staff et même traction arrière, le style de jeu ne devrait pas fondamentalement changer par rapport à la saison dernière. Si vous voulez un jeu léché où se multiplie les extra-passes, il ne faudra pas cliquer sur les Blazers : 25ème équipe à la passe l’année dernière, il y a peu de chances de voir évoluer le jeu de l’équipe. Et pour cause, ce fut efficace, avec 1,15 points par possession, l’équipe se classait quatrième la saison passée dans cette catégorie. De nouveau, on devrait s’appuyer sur pas mal d’isolation et de Pick’n’Roll venus de la ligne arrière et faire confiance au duo pour aller chercher des points. Si Nurkic ne sera pas là pour aller chercher des points en deuxième chance, Hassan Whiteside devrait pouvoir reprendre son rôle, et continuer sur la bonne lancée des Blazers dans ce domaine (deuxième en nombre de points en seconde chance l’année dernière). De l’autre coté du terrain, Portland était la seizième défense l’an dernier. Les arrivées de Bazemore et Whiteside pourrait bien renforcer ce secteur, et notamment à l’intérieur, où la doublette titulaire a de quoi faire peur aux attaquants adverses.
Le cinq majeur
Celui ci pourrait évoluer en cours de saison, tant Stotts dispose d’options différentes. Sur la ligne arrière, Lillard et McCollum sont évidemment indéboulonnables, et le poste 5 semble être réservé à Whiteside, en attendant un éventuel retour de Nurkic. Mais les postes 3 et 4 peuvent prêter à débat. Rodney Hood semble privilégié, mais on pourrait très bien imaginer Bazemore à sa place, notamment si le coach décide d’utiliser Hood pour solidifier son banc, comme ce fut le cas l’an dernier. Au poste 4, Zach Collins est désormais prêt à assumer un statut de titulaire, pour former une raquette très défensive avec Whiteside. S’il ne donne pas satisfaction, Bazemore pourrait prendre sa place, associé à Hood sur les ailes.
Damian Lillard – CJ McCollum – Rodney Hood – Zach Collins – Hassan Whiteside
En ce qui concerne le banc, Anfernee Simons, en qui les Blazers placent beaucoup d’espoir, devrait assumer le rôle de back up meneur. Kent Bazemore, donc, ainsi qu’Anthony Tolliver et Pau Gasol à l’intérieur devraient prendre beaucoup des minutes disponibles. Hezonja aussi, derrière McCollum. Enfin, les jeunes Nassir Little et Skal Labissière se battrons pour les minutes restantes.
Forces de l’effectif
La première force de cet effectif réside évidemment dans sa ligne arrière. Avec deux très forts joueurs, spécialistes de l’isolation. La majorité des points de l’équipe viendra de nouveau d’eux. Les Blazers peuvent se targuer d’avoir l’une des cinq meilleurs lignes arrières de la ligue, et pourquoi pas même un candidat au MVP avec Damian Lillard. De quoi partir confiants.
C’est un peu une nouveauté du coté de l’Oregon, mais l’équipe pourra s’appuyer sur un effectif très complet en nombre. Celui ci compte entre 10 et 12 joueurs capables d’apporter un temps de jeu conséquent, largement de quoi parer à d’éventuelles blessures.
Avec Whiteside et Collins, Portland va pouvoir verrouiller sa raquette. Si les deux ne sont pas réputés pour leur doigtés en attaque, coté défensif, cela devrait faire son effet. L’intimidation (malgré sa naïveté) de Whiteside et l’énergie de Zach ont de quoi faire peur aux attaquants adverses.
Pour finir, les rebonds, que nous avons déjà évoqués, devraient être une des forces principales de cette équipe. Grâce à cette raquette notamment. L’année dernière ils étaient la troisième meilleure équipe de la ligue dans le domaine, en étant particulièrement efficace coté attaque. Certes Nurkic est sur le flanc, mais les Blazers ont fait le nécessaire niveau recrutement pour compenser cette absence, et l’on devrait retrouver une nouvelle fois Portland maitre des raquettes.
Faiblesses de l’effectif
Tout d’abord, si l’effectif est profond, il manque sans doute de talents de premier plan sur les ailes. D’ailleurs aucun forward de métier ne devrait démarrer les matchs, puisque c’est Rodney Hood et Zach Collins qui s’en chargeront. Meyers Leonard et Mo Harkless étaient certes largement surpayés, mais venaient remplir un rôle que personne n’a recupéré. L’équipe a sans doute le talent ailleurs pour compenser ces manques, mais cela reste un point à surveiller.
Pour ne pas changer, l’autre faiblesse concerne la “Lillard dépendance”. Le meneur évolue à un niveau exceptionnel, et son acolyte CJ l’accompagne bien, mais il sera cette année encore assez difficile (surtout en l’absence de Nurkic) de trouver d’autres solutions en attaque.
Enfin, si, nous l’avons dit, la défense intérieure s’annonce très solide, le reste du secteur défensif des Blazers n’a pas le même niveau. Pour preuve, ils étaient bon derniers de la ligue la saison passée en ce qui concerne les balles perdus provoquées. Lillard et McCollum ne peuvent pas tout faire et, en l’occurence, ils ne défendent pas – ou peu. Cela a bien tenu l’année dernière malgré ces failles, mais l’on sait que la défense est une des clés de la régularité…
Le joueur clé : CJ McCollum
Alors qu’il était dans les rumeurs de transferts pendant un temps, CJ a signé une saison de très haut standing, dans laquelle il a pu prouver sa valeur dans cette équipe. Il a enfin gagné en régularité, et a sauvé les Blazers en sortant les Nuggets à Denver dans un dernier match époustouflant, alors même que Lillard, lui, n’y était pas vraiment. L’heure est maintenant à la confirmation. Être régulier sur une saison, c’est bien, être régulier sur une carrière, c’est encore mieux ! Il fut la clé de la bonne saison de l’équipe l’an dernier en élevant son niveau à coté de Dame, et il devra encore l’être cette année… La marge de progression de l’équipe se situe une nouvelle fois essentiellement dans les doigts de fée de l’arrière. Si il est capable d’encore s’améliorer et pourquoi pas de s’approcher du All Star Game, les espoirs les plus fous deviendrons permis dans l’Oregon.
La problématique de l’équipe : Comment faire encore mieux ?
La saison dernière fut magique. 3ème et finalistes de conférence, le groupe de Terry Stotts a fait taire toutes les critiques. Mais soyons honnêtes, ce fut une saison où tout a tourné en faveur des Blazers. Du calendrier facile de fin de saison régulière qui leur a permis d’accrocher la troisième place à leur partie de tableau en Playoffs où ils ont évité Rockets et Warriors, ils ont profité d’éléments favorables. Quand tout fonctionne comme cela, le risque de la chute et de la désillusion qui s’en suit est d’autant plus grand l’année d’après.
La marge de progression est pour le moins limitée. McCollum en a peut être encore sous le pied nous l’avons dit, et Zach Collins ne demande qu’à exploser, mais c’est à peu près tout. De plus, même si il a été remplacé, ils devront faire sans Jusuf Nurkic, si important l’an passé. Cette saison, les attentes sont plus hautes, et tout l’Ouest les attend au tournant. De quoi mettre une sacrée pression sur les épaules de ces Blazers.
Pronostic
7ème place à l’Ouest (entre 48 et 52 victoires)
Les années se suivent et se ressemblent dans la Conférence Ouest, et cette saison 2019/2020 n’échappe à la règle : une densité monstrueuse au-dessus de la huitième place. Et tout cela rend bien difficile de donner un classement, qui pour ma part, change environ toutes les deux heures. Mais il faut bien rendre un verdict, et QiBasket rend le sien : ce sera la 7ème place pour les Blazers. Comme nous venons de le dire, blessure de Nurkic mis à part, tout a sourit à l’équipe l’an dernier, et, logiquement, il est assez probable que la roue tourne un petit peu cette année. Ils ont prouvé être assez solides pour que l’on ne doute pas de leur présence en Playoffs, en revanche, rééditer leur parcours de l’année dernière semble assez improbable. L’on ne demande qu’à être (de nouveau) surpris par cette belle équipe.
L’Avis du Compte FR – @BlazersFrance
Quel bilan tires-tu de la saison passée ?
Exceptionnel, et ce, à tout point de vue. Damian Lillard a été énorme du début à la fin. Jusuf Nurkic a montré de gros progrès et a été très impliqué dans les systèmes de Stotts. Au fur et à mesure, le reste de l’équipe s’est mis au diapason, notamment avec les arrivées de Hood et Kanter à la trade deadline. Malheureusement, cette saison aura également été singulière dans la négativité. La blessure de Jusuf Nurkic a été très dur à encaisser pour chacun de nous je pense. D’abord, car on aime jamais voir un joueur se tordre de douleur à ce point, dans n’importe quelle discipline sportive. Puis, ça amenuisait considérablement nos chances de bien figurer en playoffs. Mais le roster a su bien réagir en s’appuyant sur nos deux leaders, qui ont porté l’équipe lors des deux premiers tours de playoffs avec des scénarios rocambolesques à chaque fois. Ce tir de Lillard, ce Game 7 de McCollum,.. ce sont des moments dont on se rappellera encore des années en tant que fan.
Que penses-tu de l’été de la franchise ?
Très actif, contrairement à d’habitude. Depuis quelques temps, on sentait qu’on s’orientait vers la fin d’un cycle. Tous nos contrats exorbitants (Turner, Harkless, Leonard) arrivaient dans leur dernière année de contrat et nous n’avions aucune place dans le cap, mis à part la mid-level exception. Il fallait donc tenter des coups sur le marché des transferts. La majorité des arrivées me plaisent dans le fit. On a amélioré notre spacing et combler le déficit de densité à l’intérieur. Malgré la re signature de Hood, le poste d’ailier restera encore notre talent d’Achille. On a privilégié notre arsenal offensif au profit de notre socle défensif. Les pertes d’Harkless et Aminu vont se ressentir tout au long de la saison.
Quelles sont tes attentes pour la saison prochaine ?
Clairement, les Trail Blazers sont en année de transition. Pas comme d’autres équipes qui établissent un nouveau joueur vedette mais plutôt pour reconstruire un effectif autour du trident Lillard-McCollum-Nurkic. Portland parvient toujours à s’en sortir durant la régulière, notamment à domicile. Après en playoffs, ça dépend beaucoup de la match-up et les places à l’Ouest peuvent encore bouger jusqu’à la dernière journée. Une 5-6e place serait déjà une belle prouesse avec un effectif chamboulée. Avec pourquoi pas, un 1er tour face à Denver pour un remake des derniers playoffs. Au-delà des résultats bruts, il sera surtout important de voir sur quels joueurs on pourra s’appuyer à l’avenir Les jeunes Anfernee Simons et surtout Zach Collins jouent gros cette saison.