A la sortie du calendrier 2017-2018, le 14 août dernier, la feuille de route était tracée. Nous partirions en « roadtrip » sur la côte Est, nous assisterions, comme chaque année au NBA Global Game de Londres et nous goûterions aux NBA Playoffs lors d’une ultime escapade.
Longtemps nous avons hésité à revoir lors de la postseason celui que nous considérons comme le meilleur joueur de la planète : LeBron James ! La première idée était donc de se rendre dans l’Ohio. Pourquoi ? En premier lieu parce que nous avons eu la chance de voir l’Elu sous les couleurs de Miami et Cleveland mais jamais sur ses terres, et nous avions le sentiment que le voir dans ses œuvres dans le Nord de l’Ohio valait le déplacement. En second lieu, parce que nous sommes plutôt « East Coast » dans l’esprit. Autrement dit, culturellement parlant nous préférons Wu-Tang à Snoop Dogg. Plus sérieusement, nous aimons les villes froides, industrielles, grises du Nord-Est américain. Probablement un rapport avec nos origines nordistes et l’habitude d’avoir un ciel bas au dessus de nos têtes…
Et puis petit à petit au cours de la saison, ma curiosité fut attisée par autre chose, un autre phénomène d’ampleur. Pour des raisons d’organisation personnelle, et paradoxalement aux affinités décrites plus haut, je regarde essentiellement en semaine des matchs de la conférence Ouest. Le fameux match de 4h30. J’ai donc très souvent l’habitude de voir jouer les équipes californiennes. Et particulièrement une, l’omniprésente équipe des Dubs. Ce n’est pas a priori le « basket » qui me touche le plus. J’aime les « big men » dominants dans la raquette et le « post up ». Par ailleurs, je faisais partie des gens très heureux en juin 2016…
Mais le phénomène de la Dub Nation initié en 2014 et la mutation de la ligue qui va avec, a de plus en plus retenu mon attention. Reconnaissant ainsi que cette construction démarrée fin des années 2000 avec un changement de management, et surtout la Draft de Stephen Curry, va profondément marquer l’histoire de notre chère NBA. Il était donc devenu important, et par extension prioritaire, d’aller voir de près ce qui ressemble au début d’une dynastie. Attention, nous n’avons pas choisi entre LeBron et les Warriors, mais en relativisant, nous avions déjà vu le King cette année et puis « toucher » les deux côtes américaines lors de la même saison représentait aussi quelque chose d’assez incroyable ! Sans compter que notre première expérience californienne du côté de Los Angeles nous avait enchanté.
C’était décidé : nous nous rendrions aux Pays des Champions du Monde.
Je connais suffisamment bien les États Unis et les sports US en général pour savoir que l’on ne peut pleinement les apprécier qu’en se rendant sur place. C’est l’aboutissement pour n’importe quel fan.
La géographie, l’histoire de la franchise, les rivalités et les performances sont autant d’éléments à prendre en compte pour comprendre la place qu’occupe une franchise dans son environnement. Sur ce point, les Warriors de Golden State sont un exemple extrêmement intéressant. Dans la plupart des ligues majeures, les équipes représentent une ville, un quartier à l’image des Nets, une agglomération voire même un Etat comme le Jazz d’Utah, les Wolves du Minnesota ou les Pacers de l’Indiana. Les Warriors ont eux une spécificité puisqu’ils n’ont aucune référence administrative officielle dans leur nom. « Golden State » est de longue date le surnom de l’état de Californie, héritage de la ruée vers l’Or à l’époque de la colonisation espagnole. Et avec trois autres équipes de basket dans l’Etat et son positionnement géographique au nord, il serait très déplacé de dire que les Warriors représentent toute la Californie. L’influence des Dubs est donc difficile à définir et l’Histoire n’aide pas : née fin des années 40 à l’autre bout du pays à Philadelphie sur la côte Est, la franchise déménage à San Francisco au début des années 60 où elle restera quelques années seulement, avant de partir de l’autre côté de la baie, à Oakland. Ville qu’elle quittera de nouveau pour regagner San Francisco fin 2019. C’est cet historique qui fait que de façon originale, les Dubs représentent deux villes de tailles importantes : San Francisco & Oakland
Et cette influence ne s’arrête pas là, dans la mesure où l’on résonne plus largement au sens de la « Bay Area », appellation couramment utilisée au delà du sport pour décrire cette région en forme de U emprisonnant ainsi un morceau d’océan Pacifique avec de chaque côté les villes de San Francisco à l’Est et Oakland-Berkeley à l’Ouest, auxquelles on ajoute la ville de San Jose au Sud. Région également connue grâce à la Silicon Valley.
La zone d’influence des Warriors est donc vaste, à l’instar de ce que connaissent leurs homologues hockeyeurs de San Jose. Une zone que se partagent à l’inverse les 2 équipes de MLB (A’s et Giants) et les 2 équipes de NFL pour encore quelques mois (Raiders et 49ers). De quoi alimenter certaines rivalités.
SAMEDI 21 AVRIL
Le périmètre de mon immersion et ses données historiques étant précisés, je pouvais désormais me consacrer au phénomène.
Pour ce faire, nous choisissons dès notre arrivée de jouer la carte touristique à fond en nous rendant le lendemain à l’Oracle Arena pour faire la visite organisée du complexe. Une bonne façon, peu onéreuse (16€), d’établir un premier contact avec l’écosystème de la Dub Nation.
En réalité, tout commença à l’extérieur. Étant également là pour faire du tourisme de façon globale, nous avions choisi de séjourner en plein cœur de San Francisco. Après une courte nuit à cause du décalage horaire, nous empruntons donc le BART (sorte de RER reliant SF à Oakland et Berkeley). Le temps de traverser la baie et nous effectuons un premier arrêt dans le centre d’Oakland où se trouve le Rakuten Performance Center, centre d’entraînement des Warriors attenant à l’hôtel Marriot. Une bonne occasion surtout de voir le contraste entre San Francisco et Oakland, mais aussi de constater que l’identité des Dubs est bien présente au cœur des deux villes.
A notre retour dans la rame du BART, nous ne mettons pas plus de deux stations pour apercevoir de nouveau l’Oracle Arena, « De nouveau » car pour des raisons tarifaires nous avons atterri à l’aéroport d’Oakland la veille, un choix qui nous permettra dès quelques mètres après la sortie du parking d’apercevoir l’antre des Champions NBA, les deux structures étant voisines. Je ne vais pas mentir, cette entrée en matière après 11 heures d’avion et 9h de décalage a quelque chose de magique.
Sur la route nous menant au Bay Bridge, nous arrivons donc rapidement à côté de l’Oracle Arena et du Coliseum allumé à l’occasion d’un match de baseball entre les A’s et les Red Sox de Boston. Cette proximité me permet d’entamer une conversation avec le chauffeur de la voiture qui nous emmène à notre hôtel: « Vous suivez un peu les Warriors ? ». Immigré géorgien (non ce n’est pas Zaza), installé depuis un peu plus de dix ans à San Francisco il me répond « Oh oui ! Je les adore ! Il m’arrivait souvent d’y aller avec mon fils mais malheureusement avec le succès des dernières années il m’est dorénavant impossible d’acheter des places… ». Dès l’arrivée j’ai la confirmation (sans surprise) que la belle histoire n’a pas que des bons côtés. En fait sur ce point, je suis déjà au courant, car les tickets des Warriors ont la réputation d’être les plus chers de la ligue et à ce moment là nous avons déjà acheté les billets par anticipation pour les matchs susceptibles d’être planifiés durant le séjour. Et c’est vrai que jamais nous n’avions mis un tel budget. Aller voir les Warriors, qui plus est en Playoffs, ça se mérite ! Nous jouons le jeu, nous savons que l’accès à ce genre de théâtre et à la performance de ses acteurs de renom est onéreux, persuadés que ce que nous allons voir est unique.
Revenons à la visite de l’Oracle. Nous sommes donc dans la rame du BART et ne sommes plus qu’à quelques minutes de l’arrivée. Nous nous arrêtons à l’arrêt « Coliseum », station desservant le complexe multisports d’Oakland et aussi l’aéroport.
Je descends, je connais déjà ce genre d’environnement pour avoir passé quelques temps à Philadelphie, ville qui connaît une configuration similaire pour ses franchises au sud de la ville. Rien de très emballant à première vue, bien au contraire. Mais j’adore ce décor, ça pue le sport US et le barbecue sur les nombreux parkings environnants. Les Athletics jouent dans deux heures leur troisième match de la semaine face à Boston et nous y assisterons. Les abords sont plutôt froids, voire glauques. On pourrait penser que le temps s’est arrêté dans les années 80. Du béton brut à perte de vue. Ça a vécu c’est sûr. Sentiment confirmé au bout de la passerelle face aux bannières des deux équipes résidentes du Coliseum (A’s & Raiders) qui commencent à dater, c’est peu de le dire… On revient tout à l’heure, on ne ne s’attarde pas. Nous fonçons à l’Oracle.
11h00 : RDV à la boutique officielle (bien entendu)
Début de la visite. Une douzaine de personnes pas plus. Des étrangers comme nous mais aussi des « locaux » jamais assez fiers des performances des héros du coin après des années de disette.
Amanda, la guide, nous accueille. Très sympa, elle nous demande de nous présenter et teste nos connaissances au travers d’un quizz. Au programme : visite de la salle en configuration basket, mais avec le parquet protégé (faudra revenir lors d’un match pour en profiter), visite des espaces « pro », VIP, loges, photo sur le banc des joueurs et visite du vestiaire « Visiteurs ».
Les espaces « Corporate » et autre « Business » ne m’intéressent pas, sauf en tant qu’invité un soir de match bien sûr (LOL). En revanche, déambuler dans les couloirs et autres coulisses pour s’imprégner un peu de l’intimité des joueurs, beaucoup plus. Dans ces espaces, il n’y a qu’à fermer les yeux pour imaginer ce qu’il s’y passe lors des matchs. L’arrivée des joueurs, du staff, la mise en place du show… Dans les couloirs, l’histoire de la franchise est bien évidemment retranscrite (évolution du logo, titres…) et les joueurs tous mis en avant. Les Warriors ne partagent que très occasionnellement la salle pour des concerts, aucune autre franchise ne réside ici à plein temps. Ils ont les clefs du château et ça se sent aux quatre coins de la structure. Seul élément qui casse un peu cette magie de prime abord: le vestiaire « Visiteurs ». Endroit froid, banal et vieillot. L’Oracle est la plus vieille salle active de NBA. Elle est occupée par le basket depuis 1970 et Amanda nous précise qu’il n’y a eu que très peu de rénovation à cet endroit. Une vieille tradition pour les franchises NBA veut de ne faire aucun effort lors de la réception des adversaires. Je ne mets donc pas très longtemps à imaginer les Jojo, Magic, Bird, Kobe… installés dans les différents emplacements. Et évidemment, j’imagine l’ambiance lors du titre des Cavs en 2016.
En sortant, notre guide nous emmène vers un endroit symbolisant l’un des moments fondateurs de l’ère actuelle : le fameux épisode de « We Believe ». Cet « upset » face au Mavs, alors tête de série à l’Ouest lors du premier tour des Playoffs 2007, qui a vu Dirk Nowitzki propulser une glacière de Gatorate contre le mur, créant ainsi un trou énorme. Aujourd’hui, le trou est accompagné d’un teeshirt de la campagne de Playoffs de l’époque et d’une signature de l’allemand, fidèle à sa réputation de Good Guy le Monsieur.
A ce moment là, on en a déjà pris plein les yeux. Sans même être fan, c’est toujours impressionnant de pénétrer à l’intérieur d’une organisation comme celle-là. Sur le point de partir, Amanda nous indique qu’elle a une dernière surprise pour nous. Privilège pour notre groupe ou pas, elle nous propose de visiter individuellement le vestiaire des Warriors. Cette fois-ci, l’immersion dans l’intimité des Dubs est totale. Mon tour arrive, décor aux antipodes du vestiaire « Visiteurs » : grand confort, ça chouchoute ici, c’est évident. Je ne loupe pas un casier, regarde qui est à côté de qui, observe les chaussures, les différents équipements jusqu’à la bouffe laissée par les joueurs. Quelques photos pour immortaliser, je sors rassasié et des étoiles plein les yeux. Cette fois-ci, on peut quitter la salle après avoir remercié très chaleureusement notre guide.
Nous ferons peu de route, peut-être trois cents mètres pour rejoindre nos places à l’intérieur du Coliseum pour assister au match de baseball. J’ai encore la tête dans l’Oracle. Je ne suis pas monté dans le « bandwagon » mais l’expérience fut géniale. Je me demande à cet instant à quel moment je vais revenir pour assister à un match. En effet, il est 13h00. Les Warriors jouent dans une demi heure le match 4 d’un premier tour qu’ils dominent sans forcer à San Antonio. Je n’ai aucun espoir de voir un match de cette série. Ça sent le « sweep » à plein nez. En revanche, je sais depuis la veille que j’assisterai au moins au premier match des demi-finales de conférence contre les Pelicans dans une petite semaine. L’idée de voir Anthony Davis venir défier les champions en titre dans l’arène que je viens de découvrir me réjouit au plus point.
Difficile de se remettre de la visite du matin, on parvient tout de même à passer en mode baseball. C’est grand soleil et ambiance familiale dans le Coliseum. Les nachos immergés de cheddar sur les genoux, le rêve se poursuit. C’est en parcourant le tableau d’affichage que je remarque qu’en bas à gauche l’évolution du score des Warriors à San Antonio est affichée. « Oh merde ! », 4 minutes à jouer les Spurs sont devant. Ils tiennent : 3-1 dans la série, retour dans la baie. Inespéré ! Ma bonne étoile nous offre un match dès le surlendemain et réduit l’attente à deux jours au lieu de six. On reviendra après demain et là il y aura du monde sur le terrain.
MARDI 24 AVRIL – Oracle Arena – Oakland, CALIFORNIA
(NBA Playoffs – 1st round, Game 5)
On est dans la baie depuis quatre jours. On s’oriente facilement et les transports locaux nous sont familiers. Après une journée de randonnée à vélo qui nous aura notamment permis de réaliser un rêve en traversant le Golden Gate Bridge, on grimpe de nouveau dans le BART à la station « Powell ». Excités comme des puces, la soirée peut commencer.
Ce n’est pas mon premier match NBA mais l’excitation et l’adrénaline sont toujours intactes. Je n’ai jamais vu les Warriors jouer en « vrai ». Ils affrontent les Spurs. J’aime cette équipe. Comme beaucoup de français, je suis fier de notre TP national, succombe facilement au charme de Ginobili et trouve incroyable l’alchimie que Pop’ a réussi à créer avec cette équipe. Tous les ingrédients sont réunis pour en prendre plein les yeux.
Comme deux jours plutôt, descente à l’arrêt « Coliseum ». Cette fois la foule n’est pas verte mais jaune. On a déjà parcouru ce chemin. On se mélange, on fonce, déterminés comme si on était là tous les week-ends. Au niveau place, pour atteindre une des meilleures sections (102), il en coûtera 350€ en revente sur StubHub. Le rêve n’est pas accessible pour tout le monde, ça pique.
Cette fois-ci, je découvre la salle animée et déjà bien remplie. Ici, les portes ouvrent deux heures avant le « tip off ». Ayant vu pas mal de matchs des Dubs cette année à la télé, j’ai presque l’impression d’être un habitué. Le décor, les effets sonores et le célèbre DJ D-Sharp me sont familiers. Je reconnais même quelques têtes parmi les membres du staff déjà présents et les commentateurs des différents médias.
Fidèle à mes habitudes lors des matchs NBA auxquels j’assiste, je lève les yeux pour observer les bannières et autres jerseys retirés. Je descends ensuite au premier rang et fait le « tour du propriétaire ». A un moment, je parviens même à « crosser » un stadier pour passer courtside. La passion n’a pas de limite. Le petit tour terminé, je me pose pour disséquer la routine des joueurs présents. L’application de chacun est toujours impressionnante. Même pour JaVale McGee, souvent moqué : le mec est en place et très concentré. La dévotion du staff est totale. Les assistants répètent aussi les gammes avec beaucoup de précision. C’est rodé.
Arrivé très en avance, j’observe tout. Le public notamment. Je connais pas mal de salles dans la ligue, j’ai des points de comparaison. Les gens sont sereins, habitués à ce qui se fait de mieux. Alors oui, on sait que parmi tous ces gens il y a les fidèles de longue date qui savourent après de longues années de galère et les « récents » venus profiter de l’embellie mais bon… L’ambiance est bonne, petit à petit ça chauffe. Ce sont les Playoffs NBA et on est chez les Champions en titre. Tout le monde enfile le fameux T-shirt offert qui attend patiemment sur le siège de chacun. Les festivités vont bientôt commencer.
Teintée ici de jaune et de bleu, la mécanique propre à chaque salle NBA est lancée. Échauffement collectif accéléré pendant vingt minutes, l’hymne national et son silence patriotique, présentation des joueurs à la sauce Warriors sur un sample West Coast pour mettre définitivement le feu à la salle. L’ambiance est électrique. J’ai la confirmation à ce moment là que les équipes qui vont venir jouer ici vont avoir la vie dure. Je me suis d’ailleurs toujours demandé ce que les joueurs des deux côtés pouvaient bien ressentir à ce moment là.
C’est parti. Confrontation de styles de jeu collectif sophistiqués. Mais les texans sont diminués. Ils ont fait sans le fantôme Kawhi cette année et se sont qualifiés à l’orgueil. Pop’ est absent, toujours en deuil suite au décès de son épouse. De l’autre côté, Stephen Curry, absent depuis quatre semaines, a fait un rapide échauffement mais nous savons qu’il ne jouera pas ce soir, nous misons sur samedi contre NOLA. Nous ne sommes pas fans d’une équipe en particulier dans la ligue. Donc ce que nous aimons c’est focaliser l’attention sur les systèmes et les joueurs. Dans le jeu, les Spurs tiennent mieux que prévu. Je les ai déjà vu, mais sans Ginobili, blessé. Son entrée fait justement beaucoup de bien aux champions 2014. Sang froid et prise de risque, du « Gino » comme je l’imaginais. Le gars n’a peur de personne. Respect. Du coté des Warriors, c’est hyper huilé. Ce collectif se connaît bien, les systèmes sont un vrai récital. Comme on a l’habitude de dire entre potes, je fixe une caméra isolée sur les joueurs qui m’intéressent le plus. Je n’ai pas besoin de me forcer pour observer Klay Thompson. Sans Curry, il prend ses responsabilités. Je suis bluffé par sa capacité à se démarquer pour se créer des shoots. Sa technicité est précise, rythmée. Démarrage sur l’aile, passage ligne de fond pour remonter au delà de la ligne à trois points à l’opposé… Splash ! Je passe du temps ensuite à observer Kevin Durant. La plus value d’assister à des matchs, c’est d’apercevoir l’impact physique et le mécanique d’exécution des joueurs. En ça, KD constitue à lui seul un « clinic ». Il me parait immense. Positionné en tête de raquette, il réceptionne la balle au niveau des genoux presque des chevilles la tête légèrement en avant pour éloigner son défenseur. En une fraction de seconde, il se « déplie » intégralement pour prendre son shoot… Boom ! Enfin, je suis marqué également par Draymond Green, omniprésent sur le terrain. Sans allure certes, dégoulinant, je ne sais pas où il puise autant d’énergie.
A ma grande surprise, le match se joue dans la dernière minute. Les Warriors, peut-être à 80% ce soir là, jouent avec le feu. Le temps que KD calme le banc des Spurs… A l’issue d’une saison éprouvante les coéquipiers de TP, peu en vue ce soir là, sont en vacances.
La soirée se poursuit dans la Fan Zone coincée entre l’Oracle et le Coliseum. Boom Boom ! Feu d’artifices pour signaler à toute la baie que les héros locaux ont une nouvelle fois sévi. Difficile de dire ce qu’était l’ambiance ici pendant la décennie précédente mais la Fan Base savoure la supériorité et la facilité avec laquelle son équipe, privée de son meilleur joueur, écrase tout sur son passage.
Il est temps de regagner San Francisco et nos esprits sont déjà tournés vers samedi et le premier match des demi-finales de conférence contre les étonnants Pelicans, sortis vainqueurs de leur face à face du premier tour en « sweepant » les Blazers de Portland. Il y aura donc pour nous une troisième étape à l’Oracle.
Dans l’entre deux, on prend un peu plus conscience de l’empreinte des Warriors sur la baie. Comme souvent aux US, les franchises du coin sont fièrement mises en avant dans les boutiques, les bars et même sur les façades de certaines maisons. San Francisco est une ville hautement touristique et nous sommes aux États Unis. Il y en a donc pour tous les goûts. Les Warriors, seule équipe NBA de la baie, qui plus est championne en titre, sont un véritable argument commercial utilisé à toutes les sauces: Warriors, Dubs, The Bay, The Town, The City, Splash Brothers… Difficile de se retenir, il faut l’avouer.
Revenons au sport. Durant le séjour, on ne fera pas de différence entre les deux équipes de baseball de la baie. Un match de chaque côté. Aujourd’hui, c’est mercredi. Les Giants de San Francisco affrontent les Nationals de Washington. On en profite donc pour se rendre, non loin de là (moins d’un kilomètre), sur le chantier du Chase Center, la future salle des Dubs. Jamais loin d’une équipe de baseball, après 50 ans à Oakland, ils déménageront ici dans ce récent quartier d’affaires en front de mer à partir de la saison 2019-2020. Le projet est bien évidemment colossal et aura la lourde tâche d’incarner la suite de l’aventure actuelle.
Comme dans n’importe quel voyage où l’on en prend plein les yeux tous les jours, le temps passe vite.
SAMEDI 28 AVRIL, Oracle Arena – Oakland, CALIFORNIA
(NBA Playoffs – 2nd round, Game 1)
Même horaire, on reproduit le même format. Cette fois-ci, on a obtenu nos places par le biais du circuit classique. Légèrement moins bien placé (section 104) mais l’addition est un peu moins salée: 270€ sur TicketMaster.
Le rituel appliqué le mardi ne change pas. Aux abords du terrain, je m’installe pour observer Anthony Davis, déjà présent et camouflé dans son hoodie noir, capuche sur la tête. C’est un géant. Shooting complet puis suite à ses nombreuses blessures, grosse séance de massage et d’étirements. Je l’ai suivi de près depuis son arrivée dans la ligue. Il sera une de mes attractions de la soirée. Il est rejoint assez vite par Jrue Holiday, l’homme en forme des Pels. Je l’ai vu deux fois avec Philly lors de son année All Star. Hormis les cheveux et malheureusement quelques gros problèmes personnels plus tard, il n’a pas changé. Il est toujours impressionnant avec ses tirs en extension. De l’autre côté du terrain et alors qu’il est toujours « questionnable » pour le match du soir, Stephen Curry s’apprête à venir effectuer sa célèbre routine.
Je suis alors à l’opposé mais je suis alerté par la foule qui se bouscule aux abords du tunnel. C’est tout juste si le speaker, n’annonce pas son arrivée. Je repense alors à la visite du dimanche matin, moi aussi j’ai emprunté ce tunnel. Le maître des lieux fait son entrée, aux côtés de son père qui s’installe sur le banc des hôtes. Le show va commencer. La légende dit vrai, le process est millimétré. Positions de shoot à gogo, sur une, deux jambes, main gauche, main droite. Des dribbles à mettre mal à l’aise les Harlem Globe Trotters. On passe ensuite à la phase 2. Il ne sait pas s’il est capable de jouer alors il va se tester. En totale cohésion avec l’assistant qu’il lui est complètement dévoué, il accélère et ça va vite, très vite. Je suis à 5-6 mètres. Je reconnais les détails évoqués par Thomas Berjoan dans son livre « Stephen Curry, La Révolution » qui me sert aussi de compagnon durant mon immersion dans la baie. Les appuis sont mis rudement à l’épreuve, il ne loupe pas grand chose. On est à l’échauffement donc c’est impressionnant mais pas si étonnant pour un joueur de cette qualité. En revanche, la vitesse d’exécution et la beauté du geste sont surréalistes. Quelques minutes après, fin de la prestation. 20 minutes avant le match, le verdict tombe: out. Les signaux n’ont pas été satisfaits, RDV manqué. On se reverra.
Le match est moins prenant que celui du mardi. Les Pels donnent l’impression d’être déjà contents d’être arrivés là. Les Warriors s’installent tranquillement dans le match. Tellement confiants, ils choisissent d’activer le mode « mise à mort » dès le deuxième quart temps. Mode généralement activé dans le troisième à base de « run». Ils passent un 18-2. Au retour des vestiaires Rondo et Davis décident de réagir à l’aide de back-door et d’alley hoop. « UniBrow » semble pouvoir toucher le plafond de l’Oracle mais il est trop tard. Le dernier quart temps permettra aux autres chouchous de l’Oracle (Bell, Cook, Jones…) et à Jordan Crawford, en recherche active de contrat côté NOLA, de s’illustrer. Fin du match. Nouvelle fiesta dans la Fan Zone, nouveau feu d’artifices. Dans deux jours, nous rentrons en France.
Ça doit se sentir dans toutes ces lignes, on s’est régalé. Pas grand chose à critiquer pour des fans de NBA comme nous avant tout là pour observer notre ligue préférée de l’intérieur, même en étant habitués à ce genre de balades. On repart sur un nuage. Qui ne l’aurait pas été ? On n’est pas devenu supporter pour autant, mais juste encore plus respectueux du travail accompli durant ces 10 dernières années. Il se passe un truc exceptionnel là bas, et il semblerait que se soit en train de s’installer pour longtemps. Confirmation dans quelques semaines…
Toujours aussi intéressant ces fan-inside proposés… je me revois devant le seul match NBA auquel j'ai assisté, il y a 20 ans maintenant.
Par contre le budget pique un peu !