S’il y a bien un joueur universitaire dont on parle en ce moment, c’est bien Trae Young. Le jeune prospect éclabousse cette première moitié de saison NCAA de tout son talent à la mène d’Oklahoma. A l’origine pressenti en fin de premier tour, les scouts parlent de plus en plus de lui comme d’un probable top 10 en juin prochain, voire top 5.
La hype qui l’entoure est hallucinante et il mène pour l’instant son équipe d’Oklahoma à un bilan de 15 victoires pour 4 défaites. Qui n’a pas entendu parler de Trae Young ces derniers temps ? Avec des performances tout simplement stratosphériques, le jeune meneur a su faire parler de lui. Parmi ses exploits, Young compte trois matchs à plus de 40 points dont une pointe à 48 points dans le derby face à Oklahoma State. Mais les fans de basket auront surtout retenu son match à 22 assists face à Northwestern State égalant ainsi le record all-time dans un match NCAA. Toutefois, le calendrier qu’ont eu les Sooners n’est pas vraiment le plus compliqué qu’on ait pu voir. C’est pourquoi ici chez QiBasket, on a trusté le petit meneur face à Kansas mardi soir pour vous sortir une analyse détaillée de son match face aux Jayhawks.
Après deux défaites face à deux équipes moyennes, les Sooners de Trae Young accueillaient Kansas avec quelques doutes et ce malgré l’énorme performance (48 pts) de leur meneur lors du dernier match dans le derby face à Oklahoma State. A l’approche du match, Young regrettait néanmoins son manque d’efficacité face aux Cowboys. Effectivement, ses 39 tirs – dont 20 tirs à 3 pts tentés – représentent, d’après ESPN, un record dans la Big 12. Alors certes, il a planté 48 points mais seulement à 35% de réussite. C’est pourquoi Trae Young a, par la suite, déclaré vouloir laisser le jeu venir à lui face aux Jayhawks pour rendre l’équipe plus efficace. Cela explique grandement son petit volume de shoot mardi soir : seulement 9 tirs, dont 3 pris derrière la ligne à 3pts.
Sa décision a clairement porté ses fruits, les Sooners repartant avec une victoire solide face à Kansas, 85-80, avec un Trae Young d’une grande propreté : 7/9 au tir, 2/3 à 3pts et 10/12 aux LF. Devonte Graham a eu beaucoup de mal à le contenir, et Young aurait clairement pu profiter de cet avantage pour scorer davantage. Bien qu’il n’ait pas monopolisé le ballon comme à son habitude, ce match fut très intéressant à analyser.
Un régal pour les yeux
Ce qui saute aux yeux en premier lieu c’est son incroyable maîtrise du ballon. Son handle est impressionnant et lui permet de se défaire de son vis-à-vis assez facilement. Il manque certes d’explosivité mais sa vitesse balle en main lui rend la tâche assez simple quand il s’agit de déborder son défenseur. Trae Young possède une conduite de balle très développée : par exemple, sur l’action suivante, le jeune Sooners réussit à se débarrasser de deux défenseurs par sa simple maîtrise du ballon, en splitant derrière l’écran et en fixant les aides, pour ensuite ressortir sur un coéquipier ouvert.
Vous l’aurez compris, son dribble a peu d’équivalent en NCAA, et Young l’utilise parfaitement pour se défaire de son vis-à-vis et se libérer l’espace nécessaire pour déclencher son tir. C’est tout simplement l’un des meilleurs prospects cette année en termes de shoot en sortie de dribble. La comparaison avec Stephen Curry n’est pas si erronée, effectivement, Young et Curry sont ce genre de joueurs capables de déclencher une banderille après n’importe quel type de dribble, ce qui les différencie des simples bons shooters en sortie de dribble.
Trae Young possède, en plus d’un excellent handle, une qualité de shoot assez exceptionnelle. La comparaison avec Stephen Curry continue sur ce point. Lors du match face aux Jayhawks, le jeune meneur a déclenché deux banderilles curryesques pleines d’insolence à un ou deux mètres derrière la ligne à 3 pts (cf ci-dessous).
Comme Curry, Young déclenche très rapidement son tir, ce qui lui permet de pouvoir shooter dès qu’un petit espace se libère. Toutefois, sa mécanique manque encore de fluidité et il relâche le ballon assez bas par rapport à la normale. Malgré tout, l’écran de son coéquipier lui permet à chaque fois de profiter du switch défensif adverse, les intérieurs universitaires sont assez lents ce qui lui offre plus de temps pour dégainer. En NBA, il devra néanmoins faire face à des big mens probablement plus mobiles et rapides pour contester le tir.
Néanmoins, sa sélection de tirs est encore à parfaire : parfois il fait preuve d’un manque de discernement et déclenche un 3 pts compliqué alors que l’horloge est encore longue. Alors certes, quand ça rentre, c’est magnifique et insolent mais si le tir ne rentre pas c’est une possession clairement gâchée. Lors du game face à Kansas, Trae Young marque un panier primé en contre-attaque où il s’arrête à 3 pts alors que des coéquipiers partaient au cercle : l’exemple parfait.
Nous parlions précédemment de sa rapidité balle en main, cette dernière l’avantage grandement pour mener les contre-attaques à la vitesse de la lumière. Le jeune meneur est tout bonnement inarrêtable en transition, et c’est également dû à son centre de gravité très bas. Hier soir, Young a profité du début de match pour montrer ses qualités dans ce secteur de jeu que ce soit pour aller au panier rapidement ou trouver un partenaire en position de scorer. Il a su profité des mauvais replis défensifs des Jayhawks à plusieurs reprises, comme c’est le cas sur cette action.
Les pénétrations, secteur perfectible
En ce qui concerne son jeu offensif sur pénétration, il est en général encore à améliorer. Toutefois, face à Kansas, le jeune Sooners a vraiment été performant dans ce secteur de jeu. Souvent critiqué pour forcer un peu ses pénétrations sans forcément faire attention à ses coéquipiers ouverts, Young n’a pas fait cette erreur lors de la nuit dernière.
Concernant son touché de balle, il s’est amélioré tout au long de la saison. En effet, Trae Young possède un floater assez correct, mais il ne s’en sert pas forcément assez. En voilà un exemple face aux Jayhawks.
Ensuite, le fait que Young n’hésite pas à aller chercher le contact dans la raquette et sa rapidité balle en main ont mis Graham, le meneur de Kansas, en grande difficulté. En effet, à plusieurs reprises Trae Young a encore une fois montré sa capacité à absorber le contact face aux bigs pour finir par un circus shot ou un lay-up classique. C’est notamment le cas sur cette action où il n’a pas peur de bouger Azubuike dans la raquette pour marquer.
De plus, Young est un joueur clairement capable d’aller chercher ses points sur la ligne des lancers, il l’a encore prouvé face à Kansas avec 12 lancers obtenus. Cette saison il en obtient en moyenne plus de neuf par match. C’est un joueur qui n’a vraiment pas froid aux yeux quand il s’agit de provoquer le contact malgré son physique plutôt léger. Cela représente un bon point pour la NBA où les contacts sont bien plus fréquents et corsés qu’en NCAA.
Malgré tout, ce match n’est pas vraiment représentatif de sa saison dans ce secteur-là. Mais ce match est un bon espoir et montre qu’il est capable d’être impactant par son jeu en pénétration.
Une vision de jeu impressionnante
S’il fallait mettre en avant trois qualités chez Young, il y aurait donc son handle ainsi que son shoot, mais il y aurait surtout son incroyable vision de jeu. Vous devez sans doute être au courant, après son match record à 22 assists. Trae Young est tout simplement un régal à voir jouer. No-look passes, passes avec rebond, passes à une ou deux mains, passes tout terrain, il sait tout faire et est un adepte du show time. Un exemple de no-look passe :
Le plus impressionnant réside dans la précision millimétrée de ses passes. On a pu le voir à l’œuvre face à Kansas. Quand on le regarde jouer, on a cette incroyable impression qu’il voit tout avec un temps d’avance. A peine a-t-il récupéré le ballon qu’il l’envoie de l’autre côté du terrain pour trouver un coéquipier seul sous le panier, sans que la défense adverse n’ait eu le temps de se replier. C’est le cas, par exemple, sur cette action où il offre un caviar à James.
De plus, le meneur d’Oklahoma garde la tête relevée tout au long de ses dribbles pour voir la moindre faille dans la défense adverse. Sur l’action qui suit, il ne quitte pas son coéquipier des yeux pour lui envoyer une passe alley-oop pile au bon moment.
Trae Young se montre également impressionnant de facilité. Il est capable d’envoyer des passes très précises à une main ou avec deux défenseurs sur le dos de manière déconcertante. C’est par exemple le cas sur cette attaque au cours de laquelle il attaque le cercle afin de ressortir sur un coéquipier à trois points mais ce dernier ne déclenche pas son tir.
Malgré tout, son jeu nécessite encore de la réflexion, il est trop fréquent de le voir vouloir faire des passes parfois trop flashy et qui s’avèrent bien trop difficiles se terminant souvent par des pertes de balle évitables. La nuit dernière, il a su laisser le jeu venir à lui malgré un exemple parfait de perte de balle évitable lorsqu’il préfère envoyer une passe alley-oop compliquée alors qu’un autre coéquipier est ouvert.
What ? Jeu off the ball ?
Après tous ces éloges, il fallait bien mettre en avant le gros point faible de Trae Young. Et ce point faible n’est pas une mince affaire. En effet, le jeu sans ballon du meneur est tout simplement inexistant, mais alors vraiment inexistant. Fréquemment cette saison, on a vu Young donner le ballon à un coéquipier et être complètement déconnecté de l’action, à tel point qu’il disparaît parfois de l’écran, à se demander ce qu’il peut bien faire de plus intéressant (cf action ci-dessous).
Cela représente vraiment un poids pour son équipe, il pourrait proposer une solution supplémentaire ou participer à l’action en étirant la défense. Preuve de son jeu sans ballon inexistant, il score très peu en catch & shoot. Certes, ce point faible n’est pas si flagrant cette saison car il possède un usage rate record du fait que son coach, Lon Kruger, lui laisse le monopole du ballon. Mais une fois arrivé en NBA, en tant que rookie, il n’aura clairement pas un tel monopole du ballon et devra partager le terrain avec d’autres créateurs. D’où la nécessité pour lui de se pencher sur ce domaine de jeu, sous peine de faire face à quelques difficultés une fois arrivé dans la grande ligue.
Des difficultés en défense
Concernant l’autre côté du terrain, le jeune meneur est clairement limité. Ce n’est pas tant sa taille, assez moyenne pour un meneur (1m88), qui le pénalise en défense, c’est surtout son envergure très limitée (1m93). Elle l’empêche notamment de contester correctement les tirs adverses. Rajoutez à cela un manque d’explosivité, il est assez dur pour lui de tenir des meneurs athlétiques et explosifs comme le sont, par exemple, Dennis Smith Jr ou Russell Westbrook en NBA.
Trae Young est, comme c’est le cas de nombreux jeunes joueurs, atteint du syndrome du « je saute partout tel un enragé ». C’est pourquoi il doit apprendre à se contrôler et ne pas mordre à la moindre feinte adverse (cf action ci-dessous), mais avec l’expérience, les joueurs deviennent de plus en plus calmes et réfléchis.
Un autre défaut qui se corrige avec l’âge, celui du « je ne regarde que le ballon, peu importe le reste ». Dans ce domaine-là encore, le jeune Sooners a grandement besoin de faire un effort. Il a tendance à se focaliser uniquement sur le ballon, perdant carrément son vis-à-vis de vue par séquence, et offrant un tir ouvert à l’équipe adverse.
Enfin, Young a cette fâcheuse tendance à apporter des aides défensives inutiles en défense. La nuit dernière on l’a vu à plusieurs reprises laisser son vis-à-vis absolument seul pour venir en aide sans réellement apporter une aide. Sur cette action par exemple, il va venir aider au poste bas, délaissant totalement le meneur adverse. Heureusement pour lui les Jayhawks ne vont pas utiliser cette largesse défensive.
L’étoile montante de ce début de saison universitaire a donc fait un match presque parfait face à Kansas, prouvant qu’il ne brille pas uniquement face à des équipes de second rang et qu’il peut être déterminant face aux grosses écuries. Cette victoire fait du bien à Oklahoma qui restait sur deux défaites. Le meneur ne cesse de grimper dans les mocks draft et on se demande bien où est-ce qu’il s’arrêtera.
Ce week-end, on aura un œil attentif sur son duel face à l’autre gros meneur de cette cuvée, Collin Sexton qui avait démarré sur les chapeaux de roue en début de saison avec Alabama. Malgré sa petite méforme du moment, le duel devrait être très intéressant à suivre et si grosse performance il y a, soyez sûrs que QIbasket se fera un plaisir de vous proposer un résumé de cette rencontre.